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Critiques de François Rannou (4)
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La chêvre noire

selon l'auteur : une suite narrative -

des citations introduisant et concluant des récits, ou des airs, en strophes espacées, de tonalités différentes, de voix différentes, la grand-mère, la mère, le fils, le voisin, en une composition musicale

au centre une histoire familiale - comme un noyau

s'ouvre sur la mère, la grand-mère, la maison jaune et les deux autres, l'homme qui n'est plus présent que pour la mère, l'Afrique, les corps, le lyrisme, ... une construction basée sur des correspondances davantage que sur un ordre logique, une énonciation logique.

les paroles qu'on pense, qui prennent forme, libérées (par la grâce du sacrifice de la chèvre noire, comme l'agneau et la brebis dans l'Odyssée)

une maquette soignée, chaque partie, chaque air, introduit par une image, une belle composition (et, via un lien, la lecture d'une partie par l'auteur)
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La Pierre à 3 visages (d’Irlande)

François Rannou, poète à l’âme celte qui se souvient du shamrock irlandais, nous offre avec ce recueil une ballade immémoriale et symbolique, un triple chemin de libération, d’accomplissement et de renouvellement.

Comme l’indique le titre, trois ensembles rythment ce voyage initiatique au cœur du temps. Le premier, intitulé « La femme à la tourbière blanche », sorte de « reine de la tourbe » que ne renierait pas Seamus Heaney cité en exerxgue, relève d’une écriture mythique, légendaire, énigmatique à l’image de ces pierres gravées de la campagne irlandaise. D’où la mise en page particulière des poèmes répartis en deux colonnes séparées par une ligne centrale verticale qui rappelle les stèles oghamiques du sud-ouest de l’île, monuments commémoratifs ou bien frontières. Il y est question d’une femme « couchée / coulée / avalée » dans la tourbe qui demande à être réveillée de son long sommeil. Comment s’arrachera-t-elle à la gangue de boue qui la retient captive ? « Peut-être un jour un baiser » ainsi que dans les contes… Poème au sens crypté à l’instar des pierres, cette femme est-elle la conscience en éveil qui se cherche un chemin vers la lumière, vers la connaissance ? Est-elle à elle seule le début de l’humanité, de l’Histoire ?

La seconde partie « Next station » contraste par son retour au concret de la ville moderne de Dublin où les livres de l’université de Trinity apparaissent comme autant de petites stèles oghamiques dressées à un carrefour de vie : de là on suit le narrateur dans un bus, puis en taxi jusqu’à Arklow, une cité du Comté de Wicklow. On voit défiler le paysage urbain au fil de la conversation avec le chauffeur, les gens, les objets, la circulation... Bientôt la mer entraperçue de la voiture déroule ses couleurs « comme au rythme d’une lanterne magique ». Une femme apparaît : n’existe-t-elle que dans les songes du passager ou ce dernier va-t-il la rejoindre dans quelque lieu de passage au pouvoir magique ? Réminiscence ou femme réelle, elle aussi se retrouve à un tournant crucial de sa vie : elle a quitté son amant et perdu son père. Dans « la prison de nos âmes », peut-on sauver quelque chose de « l’oubli du rêve », lorsque la distance devient « râpe enduit dans l’oreille » ? Là encore le texte prend une couleur énigmatique très marquée au cœur d’une situation concrète, le passé et le présent s’entremêlant librement dans une même continuité de conscience, deux faces d’une même pierre.

Le troisième ensemble « La pierre à trois visages » donne la parole à une autre femme. Celle-ci s’adresse à l’homme qu’elle aime pour lui parler de beauté, d’amour, d’attente, de mémoire. Le poème vertical, très aéré, comme libéré de la pesanteur des choses, croise deux autres textes placés, eux, horizontalement, qui se déroulent sur les pages suivantes, en haut et bas de page, l’un en italiques, l’autre non, comme si le poème tournait autour d’une pierre dans une autre dimension, exprimait une autre histoire, un autre temps, appartenait à une autre partie de la sculpture mentale… Le poème, qui a fait un tour de temps et d’espace, semble chercher sa longueur d’onde, à travers les « morceaux d’une mémoire / plus ancienne plus fraîche / que celle de nos gestes ».

François Rannou rappelle à la fin de son ouvrage le célèbre conte irlandais du Saumon de la Boyne qui sous-tend son triptyque. De même que la pierre possède trois visages, le chemin de la sagesse comporte trois stades : « la connaissance qui illumine, l’illumination du chant et le don d’improvisation ». En somme trois moments « de l’accomplissement du poème ». L’ouverture de la conscience, le chant révélé et la liberté de création, n’est-ce pas le voyage d’une vie, celui du poète comme celui de quiconque sur cette Terre ? On relira le poème en italiques de la page 27, une légende irlandaise elle aussi, et on se souviendra du mot de Cendrars : « Il faut partir, quitter sa famille ». On méditera alors les mots de la légende du pont magique : sur le chemin de la sagesse, sans doute la porte à franchir est-elle plus large que nous ne le pensions. Les pierres oghamiques, qui ont défié le temps, nous invitent à passer les frontières et à sublimer le poids de nos existences tourbeuses, « notre parole est de l’autre côté, dehors toujours. »



À noter qu'un extrait de ce recueil est visible sous la forme de poéfilm sur le site internet des éditions Lanskine : http://www.editions-lanskine.fr/livre/la-pierre-3-visages

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La chêvre noire

La chèvre noire

Peut-on imaginer ce titre comme celui d’un roman familial ?

Livré comme une musique intérieure, il délivre en bottes rouges, en clé qui raye le frigo, … les bras sur le fauteuil ne sont pas consolation. Les mots éclaboussent à faire des trous dans les plis de la peau. Loin. Profond. Tard. Tard dans la nuit de la vie.

L’écriture de François Rannou se respire, se soupire, se touche, s’apprend.

Peut-on dire d’une écriture qu’elle est impressionniste ?

Oui, quand la couleur des mots se juxtapose entre spontanéité et sens. Ce sens qui parfois vous saute au visage, parfois vous engloutit dans les méandres de la mémoire. Votre mémoire. En lents mouvements, en stabiles à la Calder, au gré du vent de votre lecture : liberté ! Emoi et respiration. Coquelicot rouge et noir. Le cœur. Coups de pinceau comme un scalpel. Le velours-pulpe au bout des doigts, en teinture indélébile se trace, sur les pages, entre pouce et index; les mots lentement graves, sans que rien ne s’efface. Pulsation. Rythme.

Une suite de Bach, un Bach d’aujourd’hui qui swinguerait les battements du cœur-cymbale. Fla ! Appogiature. Anacrouse. Les doigts s’enroulent sur la baguette. Sur un fil électrique, équilibre, des pattes d'oiseau se dessinent sur le fil de la portée imaginée. Phrasé musical en chair.

Dans la constellation du Cocher, les yeux perdus dans le ciel, la chèvre noire est une double étoile lumineuse. Il suffit de lever le nez et regarder la mer, en va-et-vient de bourrasques, la vie vous fouette plus fort que le vent, chargée de sable et de galets, les larmes du silence couleront en dedans.

Petite chèvre noire aux cheveux mouillés, résistante aux sortilèges, femme engrossée, terre féconde, telle une créature diabolique, Amalthée.

« L’église, ça forge des remords, des vices, et des solitudes coupables » p34.

Il faut - parfois - puiser sa respiration au milieu des accélérations, apaiser le tempo qui s’emballe, tant les vagues tourbillonnent, vous mènent sur la grève, comme un poisson sans eau, amoureux d’un oiseau. Larmes invisibles, d’une rive à l’autre, parce que vous auriez oublié le regard de l’enfant devenu grand, « quitter le lit d’un saut d’oiseau » p59.

Du rire à la folie, image du supplice. Attaché nu sur la roue, la langue rappeuse de la chèvre aux rectangles pupillaires, sous la plante des pieds, apprendre à se tenir debout. A l’envers. Contre tous.

"Quoi de plus concret

que la mort

Quoi de plus abstrait? a écrit A. Saâdi

L'entendez vous le rubato, ce libre arbitre que sait préserver F. Rannou?

« Oh oui, me laisser haler le long du courant, glisser , comme on s’évanouit, dans les plis de tulle que l’eau du fleuve exhalerait en une respiration continue se mêlant à mon haleine » p75.

La mère. La pluie. Les pieds nus. De l’autre côté du jardin. Une maison jaune. Le plaisir à tâtons.

Une incertitude à flot, une tête d’épingle « (un roman) ramené ici à une tête de jivaro incandescente qui brûle à froid » nous indique la 4éme de couverture

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Voix intermédiaires

François Rannou réinvente l'anthologie de poésie avec cet ouvrage de la collection l'inadvertance qu'il coordonne aux éditions publie.net : voix intermédiaires, anthologie de poésie contemporaine. Afin de tendre vers une plus grande objectivité dans les choix de poètes retenus, mais aussi et surtout pour tenter de mieux répondre aux attentes des lecteurs, et bien c'est à un groupe de lecteurs que François Rannou a confié ce choix.



Le concept, présenté en introduction, est basé sur une journée de résidence de lecture, où des volontaires (pas forcément lecteurs de poésie habituellement) doivent choisir parmi plus d'une centaine d'auteurs tous vivants. Certains de ces volontaires ont accepté de lire à haute voix le texte choisi et ont été filmés. Ces vidéos viennent augmenter l'ouvrage en version électronique.



Mais au-delà du concept éditorial, cette démarche est intéressante car elle renforce l'appropriation du lecteur de ce florilège de la poésie actuelle, si variée, parfois inclassable, toujours bien vivante. Le fait que des lecteurs (ces intermédiaires) choisissent pour d'autres lecteurs les voix qu'ils entendent nous faire découvrir, permet d'offrir une certaine forme d'assurance dans le choix des textes qui peuvent ainsi plaire à un très grand nombre de lecteurs, avides de découvrir des poètes bien vivants dans toute leur variété. 

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