Je suis un enfant de la DASS. Pas un orphelin, cela aurait été trop simple. Savoir que mes parents étaient morts m’aurait sans doute permis de me construire autrement. J’aurais même probablement été adopté par une tribu débordante d’amour. Ce n’était pas le cas. Ma situation ne m’offrait pas cette chance, du coup, je fus trimbalé de foyers en centres spécialisés jusqu’à ce que les fonctionnaires chargés de l’enfance en danger me confient à ce que l’on appelle « une famille d’accueil ».
Dans Les Misérables, je ne considérais pas l’enfance de Cosette particulièrement triste. Folcoche, de Vipère au poing, m’inspirait une certaine humanité si je devais trouver une corrélation avec la sorcière qui s’occupait de moi. Pour cette nouvelle mère de substitution, je ne représentais qu’un moyen de gagner un peu d’argent, et pour son compagnon, qu’un « fils de pute » sur lequel il pouvait s’adonner aux jeux sadiques les plus vils.
Chacun de nous possède enfoui au fond de soi un espace dans lequel se dissimulent les secrets les plus lourds, une petite cachette où se blottissent les souvenirs les plus douloureux, un recoin où s’entassent les comportements les plus honteux.
Il tourna la tête de Legros afin de la bloquer entre ses jambes. Il dégagea son oreille. L'homme n'opposa aucune résistance. Des borborygmes s'échappèrent de sa bouche. Il restait encore pas mal de liquide bleu dans la seringue. Adolf l'enfonça jusqu'au tympan. Il jaugea à vue de nez l'angle de l'aiguille avec le crâne puis, d'un coup sec, pesa de tout son poids sur le dispositif médical. Un craquement sordide s'échappa de l'oreille et la seringue s'enfonça jusqu'à la garde. Très vite, il poussa sur le piston pour vider le reste de liquide dans la boîte crânienne. Il observa les yeux inexpressifs qui avaient pris une teinte pastel. Ce qu'il restait de l'homme bavait un mélange de salive et de sang. Un son faible s'échappait de sa bouche. Ses lèvres remuaient comme celles d'un poisson dans son bocal. Avec ce qu'il lui venait de lui injecter, son QI ne dépasserait plus celui d'une carpe.
Ah ! Les livres ! Ils étaient devenus mes compagnons de route, mes seuls amis, mes abris d’infortune.
Quand on est une femme, faut mériter ses galons !