Gérard Tixier

Et puis après
Qu'est-ce que ça peut vous faire
Je suis comme je suis
Je plais à qui je plais
Qu'est-ce que ça peut vous faire

Jacques Prévert

L'amas de tant de circonstances fortuites, l'élévation de tous mes plus cruels ennemis, affectée pour ainsi dire par la fortune, tous ceux qui gouvernent l'Etat, tous ceux qui dirigent l'opinion publique, tous les gens en place, tous les hommes en crédit triés comme sur le volet parmi ceux qui ont contre moi quelque animosité secrète, pour concourir au commun complot, cet accord universel est trop extraordinaire pour être purement fortuit.
Jean-Jacques Rousseau

« Tu sais que je passe mes nuits à gémir d’angoisse. Quand tu es en voyage, je souffre horriblement de ma solitude. Je n’ai plus rien à l’intérieur, je suis une enveloppe vide. Les choses qui étaient en moi sont mortes. Je suis vide, vide comme le vent. Tout ce à quoi j’ai cru pendant dix ans a été systématiquement détruit. Et c’est à cause de toi, Ingrid, tu es entièrement responsable. »

Dans un monde qui traite de la transparence comme l'un des effets sociaux de la vérité humaine, il semblerait sans doute légitime de devenir "un soupçon"paranoïaque" plutôt que de s'exposer en victime aveugle et consentante.

On me persuade
tous les jours
que je ne suis rien
chez moi,
rien dans le monde
et comme j'éprouve
que je ne suis rien
en moi-même,
j'essaie seulement d'entretenir
devant Dieu
la flamme vacillante
qui se consume sous mon nom.

Marcel Jouhandeau

Arrêtez le monde
je veux descendre.
R de Obaldia

Nous avançons donc vêtus de notre costume social, qui s'avère un bien précieux gilet pare-balles, filtrant en même temps nos émotions intérieures et les attaques extérieures. Quand nous revenons chez nous, nous voilà déshabillés, voire dévêtus. Après tout, c'est bien l'endroit [...]. Doit-on vraiment l'ōter, ce costume social protecteur ? Nous percevons souvent son utilité, et l'intérêt de faire «comme si» tout était finalement bien agencé. Par exemple, à quoi bon raconter sa vie à quelqu'un qui vous demande machinalement : «Ça va ?». Qu'arriverait-il si au lieu de répondre tout aussi machinalement, vous disiez vraiment comment vous allez ?

Je ne suis pas celui en qui je placerai ma confiance.
L. Aragon

Tout m'afflige
Et me nuit, et
Conspire à me nuire.

Racine

Imaginez que votre fille vienne de passer la nuit entière à parler et à rire devant son miroir. Imaginez que votre mari vous apprenne au petit déjeuner qu'il est tenté de se jeter sous un train. Imaginez que votre fils brandisse un couteau en criant : "Je vais vous faire la peau !" Imaginez que votre grand-mère, se sentant persécutée par le voisinage, hurle dans les couloirs de son immeuble. Imaginez que votre femme sursaute à chaque sonnerie du téléphone, persuadée que c'est Dieu qui l'appelle.

Il est surprenant de remarquer à quel point on se juge durement, en ne nous laissant aucune latitude pour se défendre ou se justifier. Si un ami nous tenait les mêmes propos, nous ne souscririons pas à un tel déluge de critiques.

Un jour, les vapeurs de la déprime se dissipent. Et alors, on retrouve l'énergie que l'on croyait définitivement envolée. [...] D'où vient ce retour de l'énergie vitale ? De quelle profondeur émerge la prise de conscience de notre valeur ? Une chose est sûre, une petite lueur, jamais tout à fait éteinte, brillait encore au fond de soi. Il aura fallu accepter d'être résigné; résigné mais pas vaincu.

Maman,
je sais que je suis
paranoïaque, mais
Ce n'est pas
parce que je suis
paranoïaque qu'ils
ne sont pas tous
après moi.

Pierre Desproges

Lâcher prise, [...] ce serait donc «renoncer à l'idée que l'on se fait de soi-même.»