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Citation de Sol_Petchorine


C’est la difficulté de raconter sa vie aux autres : les choses douloureuses sont prises globalement et deviennent insupportables, alors qu’il n’en est pas ainsi. Parce que dans la douleur aussi il y a de la vie, et puis les douleurs sont diluées dans le temps, avec des parenthèses de parfait bonheur, de sérénité et de satisfactions.

Mais une fois au moins il faut tout raconter de soi, si on a la chance de trouver quelqu’un en qui on a confiance. Personne ne peut garder le silence sur soi-même toute sa vie, sous peine de folie. De fait, je dois te remercier : si je ne t’avais pas rencontrée, je serai presque sûrement à l’asile aujourd’hui. Et puis la vie est toujours un roman non écrit si elle reste ensevelie en nous, et je crois dans la littérature. Seul ce qui est écrit reste et avec le temps devient vie, la seule vie lisible, bien que ce soit à partir d’innombrables points de vue et, même si ça peut paraître un paradoxe, la seule véritable dans l’absolu. Ce petit sermon t’est dédié, Goliarda, à toi et à ton problème dont tu as voulu me faire part : donne-toi au métier de raconter, ne te laisse pas effrayer par la misère qui poursuit toujours celui qui s’apprête à entreprendre ce métier, et ne t’attriste pas. Qui sait d’ailleurs pourquoi, à chaque fois qu’on parle de toi, tu deviens triste ! Ça t’inquiète de ne pas avoir la certitude d’être Gertrude Stein ? Tu m’as dit toi-même qu’une Peverelli*, c’est toujours mieux qu’une écrivaine castrée par trop de conscience critique. Sortons de cet absolu catégorique et pour une fois au moins soyons pragmatiques. Essaie, au moins. Et sache que ce conseil que je te donne est intéressé : malgré toutes mes défaillances, je suis assez narcissique pour désirer ne pas disparaître complètement une fois morte. Peut-être qu’avec le temps, dans vingt, trente ans, tu écriras sur moi. Où que je me trouve alors, il me plairait de revenir à travers ton esprit et de me montrer aux autres. On ne vit pas que pour soi, c’est peut-être ce qui nous distingue des animaux… Voilà que tu me fais un petit visage apeuré à la Iuzza. Laisse tomber ce diminutif et lance-toi dans le royaume des adultes, en quelque lieu qu’il doive te conduite.

* Luciana Peverelli (1902-1986) était un auteur à succès de romans sentimentaux policiers
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