Quatre fois par semaine, l’artère principale de la ville de Bundsk était monopolisée par le marché, l’un des plus grands de toute la région. Et rien n’aurait pu empêcher une bonne partie des habitants de venir y faire leurs emplettes, ni le bruit assourdissant des conversations, ni l’air empuanti par la présence des chevaux, auxquels ils étaient tous accoutumés depuis bien longtemps.
Au milieu de tous ces étals, dont certains dégageaient tout de même d’agréables odeurs, se trouvait celui des Amicar, un père et son fils qui vendaient des fruits et légumes. Enfin, pour être tout à fait juste, seul le père était là pour travailler. Âgé d’une cinquantaine d’années, pratiquement chauve, ses mains calleuses aussi ridées que son visage, Djivin Amicar avait travaillé toute sa vie pour nourrir sa famille composée de trois enfants, deux fils et une fille – sa femme étant morte depuis près de huit ans. Mais l’aîné des trois, Erzatz, ainsi que Djana, la seule fille de Djivin, avaient quitté le domicile de leur père depuis quelques années déjà – le premier vivait avec sa femme et ses deux enfants et la deuxième avait choisi de parcourir le monde et envoyait de temps à autre de ses nouvelles à son père pour l’informer de l’endroit où elle se trouvait. En ce qui concerne le dernier, Edjor, les choses n’avaient pas toujours, pour ne pas dire jamais, été simples. Âgé d’à peine seize ans, Edjor Amicar était à l’origine d’un nombre incalculable de problèmes – Djivin avait même la nette impression de ne pas être au courant de tout – et avait toujours, pour des raisons plus ou moins confuses, été détesté par la famille ; d’où une volonté de son père de couper les ponts avec la quasi-totalité de leur entourage. C’était son fils avant tout.
Il s'agissait de Victor et de Laure Donnance
— Je vous ai posé une question, fit l’homme au chapeau. Êtes-vous bien Djivin Amicar ?
Djivin hésita encore quelques secondes avant de se décider à répondre qu’il était bien ledit Djivin Amicar.