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Citation de Luniver


Le python le plus obtus de la création – celui qui n'a qu'un œil – ruminait depuis pas mal de temps son animosité face à la condescendance de l'africaniste. À ce dernier cri, une violente torsion se manifesta à l'intérieur du Calvin Klein. Ils tombèrent sur le lit. Isookanga perdit tout contrôle et son instinct de chasseur ekonda prit le dessus. Avec une rapidité extraordinaire, il déboutonna le Superdry et, d'une poigne ferme, saisit le boa juste sous la tête pour tenter de le maîtriser mais celui-ci vibrait telle une pagaie maniée à contre-courant. Isookanga connaissait le phénomène, il l'avait lu sur un blog sérieux traitant de santé. Il savait que la testostérone, sécrétée à haute dose à cause des paroles de cette insensée, agissait à présent en lui, provoquant des sentiments de colère, certes, mais, en même temps activant une érection irrépressible doublée d'un besoin de conquête tenace. Ce mélange détonant fut cause que, bien que le jeune homme ne veuille aucunement satisfaire aux appels de la jeune chercheuse ni déroger à sa répugnance d'exhiber son sexe honteux, son corps alla complètement à l'encontre de sa volonté propre. La tête du boa cherchait une victime et Isookanga se sentit happé, le corps projeté de tout son poids vers Aude Martin. Il agrippa vigoureusement les jambes de la jeune femme et les appuya sur ses épaules. Celle-ci avait déjà levé tous les obstacles en se débarrassant de son jean. Avant qu'Isookanga ait compris ce qu'il faisait, sans même avoir besoin de regarder, il avait écarté le bord de la culotte d'Aude Martin et senti son sexe plonger dans un buisson de poils humides puis, sans transition, dans un puits sans fond, délicieux à en mourir. Des amarres faillirent lâcher, n'eût été le cri rauque que la jeune femme exhala du fond de sa poitrine, ce qui écorcha davantage les nerfs d'Isookanga qui commença à la marteler du bassin en butant avec hargne contre le fond d'un puits qu'il croyait infini. Le Pygmée Ekonda n'avait pas conscience de la sensibilité extrême des muqueuses de la jeune femme. Arc-bouté sur ses cuisses, il ignorait que chaque coup de rein qu'il portait était – pour elle – comme le fouet que ses ancêtres avaient subi lors de l'esclavage ; que chaque assaut entre ses cuisses ouvertes était aussi impitoyable que la hache tranchant des mains, que la chicote infligée par Léopold II et ses descendants ; que chaque pénétration de son membre provoquait une turbulence digne d'une émeute pour l'indépendance ; que les "Han!" émis par sa bouche rappelaient ceux proférés par le Belge Gérard Soete pendant la découpe à la scie du corps de Patrice Lumumba ; que chaque secousse dans son ventre sensible résonnait comme les salves tirées par le néocolonialisme sauvage, comme les diktats du Fonds monétaire international, comme les résolutions de l'ONU, comme une réédition de Tintin au Congo, comme le discours à Dakar d'un président français mal informé, comme la propagation de propos racistes dans la twittosphère. Dans cette tourmente, Aude ne résistait plus. Écartelée, elle avait l'impression de recevoir des coups de poignard qui la déchirait de part en part et elle se sentait comme ces femmes violées du Kivu, abandonnées de tous, méprisées, torturées, mutilées, persécutées, mises au ban, prises en otage, réduites en esclavage, souillées, ressouillées, mais luttant toujours. Il y eut alors en elle une déflagration interminable qui aurait pu égaler le feu déployé lors des guerres de l'Indépendance, du Katanga, de la rébellion de 1964, de Shaba I, de Shaba II, de Libération, et de celle dite Injuste, qui se poursuivait encore, et encore, et encore, et encore. Son cri – qu'Isookanga n'entendait même plus d'ailleurs – se répercuta dans sa conscience la plus intime, explosant en une énorme gerbe de lumière blanche, d'une pureté indescriptible, qui se décomposa en étincelles innombrables, semblables à ce que pourrait être la rédemption lorsqu'elle est perçue en myriades de flocons en forme d'étoiles, scintillantes à mort.
[...]
L'émotion avait été terriblement violente, sa méthodologie en avait pris un coup mais avait-elle suffisamment payé de sa personne pour acquitter la dette que ses ancêtres avaient contractée envers ces peuplades depuis si longtemps ? se demandai-elle, avec un délicieux sentiment de culpabilité.
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