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Citations de Ion Vinea (14)


Poème votif

À toi la gloire
de cet automne,
l'agenouillement
pâle du soleil.

À toi les trésors
descellés des bois,
la ronde des fontaines,
la légende du mirage,
le halo des deltas,
le sommeil des marées.

À toi l'orchestre
haut-sidéral,
le doux chalumeau
des troupes pâles,
à toi les fenêtres
vastes des noces
et à toi les Lions
rouges des sommets.

À toi le silence
du cellier des cieux,
la pourpre vivante
du cœur de Dieu.

(p. 257-259)
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Destin

Les heures s'égrènent calmement dans l'œil de l'étranger.
Haut est l'automne sur le vol des fontaines.
Tu voudrais t'enfuir du parc de la cité,
des vieux murs, contournant l'infortune.

Tu sème des pas sans nombre sur les pierres du chemin
et berces un rêve insurgé dans le frémissement des arbres,
d'une nuée sauvage de mots tu as envahi la place.
Vain est aujourd'hui le repos sur chaque banc.

Défait en obscurs combats solitaires,
tu flottes dans le foulard décoloré, ton drapeau
fuyant, sous la victoire indifférente de personne…
Seules les nuits voûtent pour toi l'arc vaste de l'Exil.

[1938]

(p. 423)
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Réclame

À l'épicerie, chez Ciobanu,
sur les cédrats glisse le soleil.
Tant d'ombre sous les bocages
autant de fraîcheur à la vitrine aux fruits.
Sont arrivés
les premiers raisins du Sud,
les bananes en chevrotin
et les noix de coco
atrocement testiculaires
où l'on entend encore les cris des Noirs.
Ici, ici
où fait ses emplettes Mira Popovici
compte tes ans en espèces sonnantes, devise forte,
et tâte le méridien Bucarest-Paris.

(p. 579)
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Ion Vinea
L’étoile du sommeil

Là dans l’abîme où l’oubli n’y est
et rien qu’en rêve tu pénètres
par du sommeil sans trêve abysse
tu m’attends en les larmes de jadis.

Pâle rencontre, seul instant de vivacité
à la traîne des larmes d’autrefois,
tu as marqué ta place pour l’éternité
là dans l’abîme, où l’oubli n’y est.

Ca fait longtemps depuis et tu es près, existes
près d’une limpide et muette source
que tu écluses avec la soif d’autrefois
des regards ravivant sous paupières tristes.

Fondue dans le frisson d’une attente,
t’es l’étoile du sommeil où mes eaux dorment
et ta veillée monte en moi une repentance.
Le jour est inutile, la nuit est toute lumière
là dans l’abîme, où l’oubli n’y est.
*
traduit du roumain par Cindrel Lupe
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Ion Vinea
Mots creux

métro, métronome, mécanique, constructif : nickel,
express, radium, téléphone, T.S.F., câble,
ascenseur, thermomètre, bitume, calcul
intégral, vermouth, vitesse, passeport,
radiateur, arc voltaïque, pneumatique, moteur,
alcool, turbine, etc.
– l'opinion courante est que rien qu'en
employant un vocabulaire de contre maître
d'usine, en guise de paroles en
liberté, on devient pour cela poète
moderne…
C'est une révolution de lexique.
C'est une conception de garçon-coiffeur autodidacte.
À quand la révolution de la sensibilité, la vraie ?

(Texte original en français publié dans la revue « Punct », N°14, 1925)
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Touzla
  
  
  
  
Flot pâle, rochers brûlés,
le bleu village en une bague de chaux.
Les femmes de la rive ont des joues de corail
et se vendent pour du clinquant et des fards.

Je veux rester ici, à Touzla,
près des valses mortes dans la maison blanche
quand partent les écoliers rachitiques
et sur la plage saigne le coquelicot sauvage,
caillot craché en ce frêle midi.

Le soir clignote dans le phare
au-dessus des trompes indécises d’eau
quand rentrent les pêcheurs des étoiles sur les mains,
quand passent bateaux et planètes.


/ Traduit du roumain par Dan Ion Vasta
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Que m’importe que tes yeux
mentent aux autres aussi,
que tes pas folâtres s’enlacent
à leurs pas,
que ton souffle se donne
aux profanes visages,
que des mains étrangères
s’emparent parfois de tes hanches ?
(L’Indifférent)
p. 325
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L'oiseau merveilleux
(à C. Brâncuși)

L'Esprit est dans les esprits – sur la terre de l'ombre.
Nos yeux traînent les étoiles dans les gares.
Les senteurs ont coché les bruits, –
de ses brises nous tâte la plaine, –
la soie de la mer se donne à nos pas,
le temps vente dans les branches accablées,
les nouvelles, sens-les, mûres, tombent partout dans la nuit.
Le soleil, aux mains du ciel nous les avons tendus.
Sur les dalles vierges des tombes, poussés,
nous portons nos fontaines de sang.
On voudrait élever à nouveau la Tour de Babel
et voûter nos élans au-dessus du mot tel un nid.
Comme devant une grande chanson
l'oiseau de la soif, duvet de flamme,
qu'il vienne crucifier son avènement merveilleux
saint à s'y méprendre sur le retable.

[1920]
p. 541
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Ion Vinea
Victoire

Sous les frondaisons du silence,
ainsi qu’un cerf l’écho se cache.
Ô, comme te perd le chant
de mon attente dans l’automne !
Parmi les deuils d’il y a longtemps,
j’erre sans chemin.
Partout, l’aile des carrefours
fend le brouillard, effraie un vol d’oiseaux.
Aucun feu nulle part. Personne dans la nuit.
Du paradis perdu,
il neige des murmures et des cendres.
Je n’ai pas su, je n’ai pas su
chasser ma pensée, suivre ma destinée.
Aux blanches mains
confier mes tempes,
aux blanches mains.
Près des trophées vétustes
de la solitude,
je ne suis aujourd’hui qu’un vainqueur assombri,
assombri.

(traduit du roumain par Claude Sernet)
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Ion Vinea
Voluptas

Parmi de faux Tanagras et fleurs persiennes en fil
dormant en mers d’ambre et d’ombre, dans l’alcôve,
vers ton corps je me glisse, je nage vers une île
aux baies chaleureuses et aux lianes mauves.

Naufragé, j’ai soif à tout jamais de tes secrets,
en découvrant des angles de parfum quand je promène
sur tes contours abstraits mes mouvements concrets
en toi l’heure je flaire, que ton nimbe m’amène,

et le toucher, cet art étrange et subtil,
sur dépolies allées à serpenter j’adore,
conduisant ma bouche vers cette fleur immobile
qui luit entre les boucles, stigmate de phosphore.
*
traduit du roumain par Tudor Mirică
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Aevum

Nappes de brumes.
L'offrande des cheminées n'est plus reçue.
Des lumières éraflées sur le ciel
nord–sud–est–ouest–vibrations,
les phares boivent le nimbe où ils avancent,
les sonneries égrènent des appels dans les salles,
côte à côte, tous ensemble,
on glisse vers un même instant.
Sans oriflammes nous descendons le siècle
vêtus de notre ombre.

(p. 577)
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Au total

Printemps, des clairons
s'enrouent dans le soir.
Mouillé, le regard des phares.
À force d'herbe crue
le sang des chevaux se caille.
En haut, comme un noyé,
l'avion fait la planche dans les cieux.
Les affiches et les vergers
pleurent une glu fraîche.
Dans les plaines aux chardons
s'arrêteront les trains,
les sauterelles et les chenilles.

(p. 575)
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Gamme
(à Tamás Aladár)

Le miroir boit des couleurs dans la l'orgue de braise
des heures dans les clairières de la musique.
Le crépuscule, escarpins en fils d'or,
traverse la chambre aux joujoux dans laquelle
les poupées retiennent leur souffle.
Sur le gobelin effiloché,
des troupeaux dans la guipure d'une flûte
et un berger par la poussière des âges.

Dans l'âme au Samedi des morts
passent les sons entre des cierges,
le soleil se débat comme un vocéro,
gémissent dans le colombier les présages.

Les vers à soie se sont lovés en boucles d'oreille.
La pendule paye son tribut en ducats effacés.
Sous les fenêtres gît le jardin blêmissant,
les moulins à vent sont ses fleurs.

[1920]
p. 539
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Au-delà

Corps en repos, longue attente dérisoire,
doucement le temps met au jour sa ronde de merveilles
ombres et lumières en leur seul et vaste miroir.
Le square désencadré, brisé en mille fenêtres,
déploie lentement dans l'azur ses détails terrestres,
chaos foisonnant telle une ruche,
galop sans lieu ni frontières.
Au neuvième ciel, par le fil du midi soulevée,
mon âme comme un linge ondoie dans l'éternité.
(p. 573)
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