Jocelyn Lachance s'exprime au sujet de son dernier livre : "Les images terroristes. La puissance des écrans, la faiblesse de notre parole" publié dans la collection de l'Ecole de Parents, chez Erès.
Autrement dit, il ne suffit plus d'apprendre aux jeunes à moins consommer d'écrans, il faut leur apprendre à vivre à l'extérieur du périmètre rassurant de la connexion, à se déconnecter provisoirement et partiellement de leur smartphone.
La norme se réajuste alors : il ne s'agit plus d'être joignable en permanence, mais de savoir alterner les moments et les espaces connectés et ceux qui ne le sont pas. L'accompagnement ne se contentera pas d'insister sur ce qui est vécu alors, il soulignera également que chacun peut échapper, s'il le désire, à cette continuité qui s'impose à lui.
Nous possédons tous une expérience personnelle de la connexion.
A quoi ressemble la votre ?
Quand et comment a-t-elle commencé ?
Quel souvenir en gardez-vous ?
Et comment a-t-elle évolué au fil des années?
Avez-vous résistez ou non à l'achat d'un premier téléphone et pourquoi ?
Vous souvenez-vous de votre premier ordinateur ?
De votre première navigation sur Internet ?
Comment ces technologies, autrefois inexistantes, ont-elles fini par prendre une place minime, raisonnable, fondamentale ou envahissante dans votre vie?
Désormais, redoutez-vous de ne pas avoir accès à Internet ?
Que la batterie de votre smartphone soit déchargée ?
Etes-vous impatient lorsqu'on tarde à vous écrire ou à vous téléphoner ?
Vos réponses à ces questions révèlent l'écart gigantesque qui sépare votre point de départ de celui de vos enfants. Enfants que vous avez sans doute initiés, vous-même, au monde connecté !
Les efforts demandées aux parents à l'ère numérique ne sont pas négligeables. Ils doivent constamment se positionner : faut-il, ou non, contacter son enfant ? Lui demander, ou non, un petit signe de vie ? S'informer, ou non, de sa situation en temps réel, alors que c'est possible, facile rapide ?
Faut-il , ou non, ignorer ses traces numériques qui révèlent, peut-être, qu'il est en danger ?
Autant de décisions qui ne peuvent être prises sans connaitre les conséquences, parfois insoupçonnées, de l'usage cde ces outils information et de communication sur leurs relations.
On peut d'ailleurs se demander si l'achat d'une tablette, d'un ordinateur ou d'un smartphone s'accompagne toujours de conseils d'utilisation ou, au moins, d'un discours sur l'importance symbolique que revêt le fait de détenir un outil facilitant la recherche d'informations et la communication, donc l'ouverture au monde.
Les conflits entre parents et enfants surgissent notamment lorsque ces derniers ont le sentiment, puis la certitude, que la frontière de leur intimité a été franchie.
Nombre d'adolescents semblent associer les aspects visibles de leur surveillance à ce qu'ils considèrent comme des formes de contrôle.
Des études montrent que les individus attribuent au téléphone portable et au smartphone la fonction de les rassurer en cas d'éloignement des proches.
L'expérience de la séparation n'est plus vécue dans les mêmes conditions qu'autrefois, ce qui affectent les relations entre les parents et enfants.
Paradoxalement, nous pouvons penser que plus nous mettrons d'espoir dans la capacité des nouvelles technologies à protéger nos enfants des dangers en ligne et hors ligne, plus nous serons déçus, et donc enclins à dresser des rempart protecteurs mobilisant d'autres technologies.
Il serait pourtant simpliste de considérer les écrans comme une entrave à la vie de famille. Il semblerait plutôt que les écrans éloignent parfois les membres d'une famille quand ils sont réunis sous le même toit et les rapprochent lorsqu'ils sont séparés.
Chez ces derniers, l'angoisse de séparation est associée à cette croyance que le fait de savoir où se trouve sa progéniture la protège contre les accidents ou les mauvaises aventures. Ce n'est pas tout à fait faux... mais ce n'est pas totalement vrai !