Avis Le mystère Lagerfeld de Laurent Allen-Caron
Karl Lagerfeld est mort.
J’avais demandé cette biographie parue chez Fayard bien avant de connaître son décès. Avant cette lecture, j’ai vu deux reportages, magnifiques, sur Arte. L’un concernait sa vie en dessins et l’autre la vie, la création d’un défilé par Karl Lagerfeld pour Chanel. Les dessins racontant la vie de Karl Lagerfeld m’ont donné énormément d’indices sur sa vie, sur ce qu’il voulait bien raconter. Cette biographie en dit un peu plus sur cet homme. Mais je n’aurais peut-être pas dû voir ce documentaire de Loïc Prigent avant.
Depuis plus de 30 ans que je m’intéresse à la mode, les créations de Karl Lagerfeld pour Chanel en font partie, même s’il ne fait pas partie de mes couturiers favoris. Je n’ai pas toujours aimé ce qu’il a créé, mais chacun réagit différemment. Derrière le créateur, il y a l’homme, un homme avec énormément de verve, de petites phrases assassines. En ce sens, il ma fait penser à sa mère découverte dans ce reportage et encore plus dans cette biographie.
Karl Lagerfeld est un homme mystérieux, notamment avec ses lunettes noires, son éventail. Il voulait être le seul, l’unique et il a réussi. Il a pris son temps pour apprendre, même si très vite, il se lasse. Il a appris toutes les ficelles qui ont fait de lui un as, le maître en matière de confection, de tissus, en dessins. Erudit, il se passionne pour tout, les gens, les époques, tout est prétexte à s’instruire. La mode, oui, pour de nombreuses marques pour lesquelles il a travaillé en même temps, avec toujours un goût très sûr, en avance sur son temps, mais il n’a jamais réalisé les mêmes croquis. Karl Lagerfeld savait ce qu’il faisait et si cela ne lui plaisait pas, il défaisait et recommençait. L’art sous toutes ses formes, les livres, malgré une vie trépidante, il prenait le temps d’assouvir ses passions, nombreuses. Il achetait également. Homme qui avait de l’argent, de par sa famille, de par son travail, mais qui a su donner des fêtes extravagantes, donner à ceux qui comptaient pour lui. Karl Lagerfeld a trouvé les bons partenaires pour créer comme un échange de bons procédés.
Cette biographie se lit comme un roman. L’auteur, avec les nombreux témoignages, nous fait traverser de nombreuses époques. Il y a l’enfance de Karl Lagerfeld, son arrivée à Paris, son amitié et ses virées avec Yves Saint-Laurent, sa rencontre et sa vie avec Jacques de Bascher, plus tous ceux qui gravitaient autour d’eux. C’était une sacrée époque avec de la drogue, du sexe, de l’alcool. Mais Karl n’est jamais tombé là-dedans. Est-ce pour cela qu’il n’est jamais tombé, qu’il a continué à travailler autant jusqu’à 85 ans ? Bourreau de travail, propriétaire terrien, j’ai découvert un homme que j’aurais bien aimé rencontrer, en définitive. Ce roman relate ses rapports, notamment avec son père, sa mère, Jacques, un petit peu Inès. Il voulait se créer, il voulait vivre son rêve, lui qui a été adulte très jeune. A-t-il eu le temps de tout accomplir ?
Toute la documentation qui a servi à l’écriture de cette biographie est notée en fin de chapitre mais aussi à la fin du livre. L’auteur se penche, en quelques mots, sur l’après Karl chez Chanel. Rien n’est dit sur son bras droit qui a travaillé avec lui de nombreuses années et que l’on a pu voir dans le reportage. Une femme qui a pris les rênes de Chanel et qui était déjà bien présente lors des nombreuses collections.
Pas un seul ennui à la lecture. Je me demande comment, en si peu de pages, on peut écrire autant sur un homme, plusieurs êtres humains, plusieurs époques. Je remercie Fayard et Netgalley pour cette lecture.
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