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Critiques de Louis Paul Boon (3)
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Menuet

Nous sommes dans une banlieue industrielle flamande, au lendemain de la seconde guerre mondiale. Un ancien ouvrier travaille dans les caves d’une brasserie où il passe la majeure partie de ses journées. Comme passe-temps, il collectionne des coupures de journaux mais pas n’importe quelles coupures: toutes sont des sortes de faits divers insolites, pour la plupart atroces et/ou sordides. Les deux autres voix sont celles de sa femme et de leur femme de chambre.



Coup classique: il s’agit d’un triangle amoureux. Cependant, mis à part ce triangle, le roman n’a rien du cliché. Les trois voix expriment, d’une manière très juste, la grande solitude de ces trois personnages qui vivent ensemble et croient se connaître sans se connaître vraiment.



Le récit est écrit sur le trois quart de chaque page et le quatrième quart est réservé pour les titres de journaux et les faits divers. Ces coupures reproduites en italique ressemblent beaucoup aux nouvelles qui, de nos jours, déroulent en bas d’un écran télévisé. Bien que ces nouvelles n’ont pas beaucoup de rapports avec le texte (à part que l’un des personnages les collectionne), elles contribuent à accentuer l’univers glauque dépeint par l’auteur.
Lien : http://www.litteratureworld...
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Menuet

Dans un village quelque part en Flandre au siècle passé. Un ouvrier et sa femme : des gens très simples dans une petite maison. Une troisième personne vient s'ajouter dans le roman : une jeune fille vient donner un coup de main au ménage. On devine alors ce qui devait inévitablement se passer pour ajouter du sel à la vie si monotone de ce couple.
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Mieke Maaike's obscene jeugd

Louis Paul Boon (Alost, 15 mars 1912 - Erembodegem, 10 mai 1979) est connu comme un écrivain social. Bien qu'il ait perdu la pensée marxiste, son souci de l'humain demeurait, et il continuait à aspirer à une société utopique. Il possédait une énorme puissance de travail. En plus d'être écrivain, il était également peintre et sculpteur. Et s'il lui restait du temps, il travaillait à sa "Féminathèque phénoménale", une collection de plus ou moins 24 000 images pornographiques. Parce qu'il aimait la femme, pas en tant qu'objets de luxure, l'image idéale cultivée par le capitalisme comme dans les concours de Miss, non, il aimait la femme ordinaire et sympathique, telle qu'elle est.





L'enfance obscène de Mieke Maaike

Le livre est né d'une oeuvre satirique et pornographique antérieure, « Eens op een mooie avond » (Un jour, lors d'une belle soirée), que Boon avait conservée dans son propre portfolio. Boon a supprimé les passages les plus obscènes de ce livre et, dans son nouveau livre, a également attribué tous les actes pornographiques à une seule personne : Mieke Maaike. Après quoi l'oeuvre a pu être publiée sous son propre nom.





Intrigue

Première partie : La thèse de l'étudiant Biteraide

Mr. Biteraide est étudiant en Sciences Pornographiques et doit rédiger une thèse « sur et dans le phénomène du modelage chattédélique chez les futures femmes enfant ». Mieke Maaike lui raconte son histoire.





Dans sa thèse, qui précède le récit de Mieke Maaike, l'étudiant Biteraide donne un bref résumé de comment Mieke Maaike vit. Il décrit le style dans lequel elle raconte son histoire, les vêtements qu'elle porte lorsqu'elle s'adonne aux actes sexuels, l'aspect folklorique (souvent, Mieke Maaike se livre à des rapports sexuels exhibitionnistes pendant qu'une procession folklorique se promène à l'extérieur). Il ne prend pas position sur le comportement de la jeune fille. Tout ce qu'il dit, c'est : "Pour les sociologues qui veulent étudier la ville de nuit, l'histoire de Maaike ne manque pas de matière".





Biteraide n'aime pas tout dans l'histoire de Maaike. Non pas à cause des évènements ou du vocabulaire qu'elle utilisait, mais à cause de la façon dont elle lui a raconté : elle ne pouvait s'empêcher de gazouiller et de glousser sans arrêt, et au point culminant de Biteraide, elle s'est même esclaffée de rire. Ce qui ne l'a pas vraiment stimulé. (En effet, le profiteur avait apparemment encore d'autres intérêts que la simple recherche académique).





L'histoire de Mieke Maaike

Le développement sexuel de Mieke Maaike est suivi de ses neuf à 19 ans. Mais nous savons aussi quelque chose sur sa petite enfance.

Lorsqu'elle nait, son père est parti pour de bon et sa mère est trop occupée à s'assoir sur les genoux de son employeur pour se soucier de son éducation.

Mieke Maaike est donc un cas social, et développe son propre monde pour attirer l'attention. Pour attirer l'attention il faut du pouvoir, et Mieke Maaike choisit la voie des "fluides corporels". Dans un premier temps, c'est limité aux fluides corporels d'un bébé : elle est « une pleurnicheuse », ce qui peut arriver aux bébés qui veulent attirer l'attention, et ceci donne du pouvoir à Mieke Maaike sur les personnes qui s'occupent d'elle et qui doivent la changer et la dorloter. Ainsi, Mieke Maaike apprend à acquérir du pouvoir, ce qui lui procure du plaisir.

Après une telle enfance de satisfaction grâce aux fluides corporels, il n'est pas surprenant que, plus tard, Mieke Maaike appréciera les jeux de pisse, et qu'elle aimera quand "le bouillonnement gicle de sa chatte".

Lorsqu'elle a neuf ans, un pasteur lui lèche la fente, ce qui éveille sa curiosité. Elle veut voir de plus en plus le membre masculin, elle est autorisée à les mordre, voir les hommes jouir. Mieke Maaike veut tout explorer. Mais même si les hommes aiment une enfant femme, ils ne sont pas des pédophiles lourdement pervers. Ils lui montrent beaucoup de choses, font de l'exhibitionnisme, les attouchements et les pipis sont autorisés, mais ils refusent de la pénétrer jusqu'à ce qu'elle ait treize ans, et qu'elle soit sexuellement mature.





Après sa première pénétration, il est encore plus difficile de retenir Mieke Maaike qu'avant, car maintenant elle a vraiment pris du plaisir. Avec une imagination et une énergie débridées, elle recherche continuellement des hommes pour vivre de nouvelles aventures sexuelles. Son corps les charme, ils ne peuvent lui résister. Avec son corps, Mieke peut exercer du pouvoir sur les hommes. Elle fait de l'exhibitionnisme, des jeux de pisse, du sexe en groupe, elle s'amuse à la folie. Elle reste cependant toujours habillée de manière élégante, avec de jolis slips de pute en dentelle, des rubans, des noeuds, des bottes hautes. Elle n'est jamais complètement nue.





Quand qu'elle a presque quatorze ans, elle se saoule avec une amie et avec son consentement. Mais, sans s'y attendre, les filles se font également gifler par un homme tout aussi ivre mort.

Ceci semble être un point de basculement.

Bien que cela ne semble pas la déranger, c'est la première fois que Mieke ne mentionne pas qu'elle a joui, alors qu'elle le fait toujours extensivement. C'est peut-être parce que, dans ce cas précis, elle a perdu le contrôle, le pouvoir.

Lentement, alors, un changement s'installe chez elle. Maintenant, il lui arrive aussi de faire subir aux autres des choses qu'ils n'aiment pas. Par exemple, elle pousse un frère à déflorer sa soeur, même si la fille se débat. Le pouvoir est de nouveau entre les mains de Mieke Maaike.





Plus tard encore, un prêtre fouette également Mieke Maaike, et une fois encore, elle ne dit pas qu'elle a aimé cela - au contraire, elle en vient à détester les prêtres. Cependant, fouetter, gifler, elle trouve cela inspirant. Parmi ses autres aventures sexuelles excentriques, elle apprend maintenant à être une sadique sexuelle. Pisser sur le corps entier d'un enfant de trois ans pendant qu'il pleure, battre un petit garçon pendant que le père regarde et peut s'attendre à des rapports sexuels avec elle en guise de récompense, battre les femmes ou les faire battre par leur mari, elle fait ce qu'elle veut.

Mais elle reconnait que c'est une anomalie chez elle. « J'avais de plus en plus envie de cela, comme certaines personnes qui ont une anomalie, de pouvoir gifler en baisant. »





Le style

Mieke Maaike utilise un langage dialectal, ce qui donne immédiatement l'atmosphère d'une jeune fille dans un environnement socialement difficile. Elle parle avec une aisance incroyable, peut continuer pendant des heures et a un usage très varié de la langue. Non seulement elle utilise tous les mots courants possibles de toute la littérature pornographique réunie, mais grâce à sa riche imagination, elle invente une foule d'appellations en plus. Elle invente également des images pour décrire ses expériences ; son langage est tout aussi créatif que les nombreuses aventures sexuelles qu'elle recherche. Mieke Maaike a son propre humour, c'est une personnalité fougueuse, et dans ses rapports, bien évidemment, elle raille régulièrement l'église et les prêtres frustrés.





De plus, elle décrit ses expériences sexuelles avec tant de détails que nous ne pouvons que conclure que Louis Paul Boon connaissait bien la sexualité féminine.





(Voir aussi les citations du livre)





Que penser de ce livre ?

On peut penser beaucoup de choses sur Mieke Maaike. le dernier mot n'a probablement pas encore été prononcé à ce sujet, et les opinions changeront au fur et à mesure que les valeurs et les normes de la société évolueront. Dans une très modeste tentative d'en dire quelque chose - et tout ce qui suit peut être faux, seul Louis Paul Boon pourrait nous donner son avis - je peux signaler ce qui suit :





Dans un essai, Kris Humbeeck écrit :

"Quand le livre est sorti, les lecteurs pensaient qu'ils étaient des personnes ouvertes d'esprit et libres s'ils approuvaient tout ce que Mieke Maaike faisait, y compris la violence à la fin. En contrepartie des l'obscénités et de la violence de la fin, qu'ils ont acceptées, les lecteurs pouvaient avoir l'idée d'eux-mêmes qu'ils étaient larges d'esprit. Ils ont transformé le livre en un plaidoyer pour la liberté individuelle. Ainsi, à travers ce livre, Boon est devenu la victime de ce qu'il dénonçait."





Livre de sexe joyeux

Et peut-être, en ce qui concerne Boon, ces lecteurs étaient-ils autorisés à lire ce livre comme le joyeux livre de sexe pour lequel ils l'ont pris ? Mieke Maaike est si bien écrit qu'on pourrait vraiment le lire comme un bon roman pornographique (et également comme une parodie du roman pornographique), et l'apprécier. Après tout, Boon était heureux lorsque les tabous sexuels ont été brisés dans les années 1960, et il s'est laissé aller à une agréable littérature pornographique (bien que extravagante vers la fin) dans ce livre. Ce n'est pas parce qu'on lit tout cela, qu'on le fera aussi.





Social

En revanche, Boon reste un écrivain social. Par conséquent, il est certainement justifié de lire Mieke Maaike comme l'histoire d'une fille qui a été délaissée pendant sa jeunesse. Elle n'apprend ni l'amour ni l'empathie et on peut lire dans ce livre ce qui peut arriver à une enfant élevée ainsi. Mieke Maaike dégénère d'une enfant curieuse de tout mais déjà en cherchant des moyens d'attirer l'attention, elle passe par une adolescente enthousiaste et dissolue, pour devenir une furie infernale assoiffée de pouvoir.

Voilà le résultat des enfants malmenés pendant leur jeunesse.



Ecrivain progressiste et social

Enfin, on peut faire le lien entre la désillusion de Boon et l'esprit de l'époque. Dans les années 1960, Boon était satisfait de voir que les tabous sexuels étaient enfin brisés, et que la libre expression et les expériences sexuelles détendues étaient possibles. Cependant, il a été témoin de la façon dont cette rupture des tabous a été mise à mal par le capitalisme, qui voulait vendre toujours plus, et de la façon dont les personnes qu'il avait aidées à briser les tabous à l'époque se sont laissées transformer en consommateurs aveugles, sans aucun esprit critique ni introspection. La nudité et le sexe devaient être de plus en plus choquants, les passions sont devenus grossières, les femmes sont devenues des objets sexuels.

Vu sous cet angle, Mieke Maaike, publié une première fois en 1972, dresse le portrait d'une société qui aurait pu être aimante, libre, ludique et détendue, mais qui a déraillé, générant des gens durs. Aussi bien en faisant de la femme un objet sexuel commercial, que en n'étant pas sociale : il y avait et il y a bel et bien beaucoup d'enfants et adultes laissés pour compte, qui finissent par être des gens durs.





Dans le journal "De Morgen", l'écrivaine pornographique érotique Pia Fraus a déclaré lors d'une interview :

"Si vous regardez la littérature érotique, cela date depuis Louis Paul Boon qu'un bon auteur a écrit de l'érotisme. C'est triste à quel point ? Par le passé, les ouvrages érotiques étaient toujours écrits par des classiques. Et mince, Boon a si bien réussi qu'il s'en est tiré avec du pédoporno dans 'Mieke Maaike's obscene jeugd'. Mais depuis que le sexe apparait aussi dans des romans normaux, le genre érotique a été repris par les publications commerciales."

Ce qu'elle dit est vrai, ce livre est le plus beau livre pornographique depuis longtemps. Mais on peut se demander si c'est l'ère du temps qui fait ça, ou bien le fait que depuis lors, il n'y a plus eu d'aussi bon écrivain que Boon. Et puis après, on devrait se demander, pourquoi n'y a-t-il plus eu de si bons écrivains ?





Pia Fraus est une autrice de livres de sexe lesbiens et de sexe transgenre, c'est-à-dire où l'on ne sait pas si le personnage est un homme ou une femme. Elle a publié les livres "Vrijages" (Caresses) et "Meer vrijages" (Plus de caresses). Mais à mon avis, les livres de sexe de Boon sont (beaucoup) plus beaux.





Conclusion

Si l'on est conscient de l'arrière-plan possible des valeurs sociales et sociétales contre lesquelles Boon a voulu répondre dans ce livre, et si l'on n'y est pas aveugle pendant la lecture, alors "Mieke Maaike's obscene jeugd" n'est pas seulement une merveilleuse pornographie à apprécier et qui fait jouir, mais également une merveilleuse oeuvre de littérature qui a une dimension sociale.







Référence :

« Smeerlapperij voor gevorderden. Louis Paul Boon en pornografie als satirisch procédé 1. » (Saloperies pour avancés. Louis Paul Boon et la pornographie comme procédé satirique 1.) par Kris Humbeeck. Extrait de : « Pornografie in de Nederlandse literatuur » (Pornographie dans la littérature néerlandaise), essais rassemblés par Arnon Grunberg. Cop. les divers auteurs. Première édition 2012. Nijgh et van Ditmar. ISBN 978 90 388 9531 NUR 320

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