(Prologue du roman) Je m’appelle Axel, j’ai vingt ans, dont la moitié passée à me demander si j’étais armé pour la vie. Un peu plus si je considère que j’en avais cinq quand elle m’a décroché ses deux premiers uppercuts. Alors j’apprends à relever la garde, à jouer avec elle, comme si chaque jour était un défi, genre rouler les yeux bandés à travers des anneaux de feu. Peut-être est-ce aussi une façon de m’en remettre au destin. Parce que pour être tout à fait honnête je dois également affronter mes mensonges, ceux dans lesquels on s’enferme quand on n’a pas encore réglé les dilemmes affectifs qui donnent envie de chialer ou de serrer les poings.
Je m’appelle Axel, j’ai vingt ans, et je veux croire qu’un jour j’aurai le courage de traverser la rivière.
Cette chambre c’était un peu notre tanière. Comme des louveteaux égarés on se sentait à l’abri des dangers extérieurs. Et pour aller encore plus loin dans la solitude, sans doute aussi pour défier nos peurs, on organisait des expéditions sur les toits. On alignait des petites bougies et on passait des soirées entières à discuter des vides qui remplissaient nos vies, à maudire tout et n’importe quoi, à repérer la Grande Ourse et Cassiopée, deviner les vies derrière les lucarnes illuminées, écouter la pluie rebondir sur les tuiles, et parfois à pleurer. D’ailleurs, Mila l’appelait le toit des larmes.
Amitiés troublantes, attirances contrariées. Quand les sentiments fantômes déchirent les rêves...
Je voudrais pouvoir expliquer à Chloé que j’ai besoin de ce voyage, que je reviendrai avec un autre regard sur moi et une vision plus sincère de nous. Dans ce conte je l’imagine courir sur le sable en apercevant de hauts mâts sortir de la brume. Je lui raconterai mes découvertes, mes expériences, elle aurait envie de les partager, elle s’accorderait avec mes parallèles. Mais ce n’est qu’un conte auquel même les gamins ne peuvent pas croire. Alors je dois me préparer à ce que la plage soit déserte à mon retour, s’il y en a un, même si je dois tomber à genoux devant les restes d’un feu.