Le ciel au dessus de sa tête est immense, s'étire au-dessus des cyprès jusqu'aux sommets lointains des Apennins que l'on aperçoit à l'horizon dans la brume gris-violet. À mesure qu'elle progresse au milieu de ce voile, Lucrèce voit changer son spectre de couleurs et le rose de l'aurore se muer en rouge, en orange.
Ça, pense-t-elle. Tout ça. Les cyprès rangés comme des pinceaux qui attendent, tête en haut , la main géante d'un artiste, le vent doux, enfin docile, la ligne crénelée des montagnes au fusain sur l'horizon, les cris étouffés des serviteurs qui se hèlent , quelque part dans son dos, les portes ouvertes de la ville, le tintement des cloches au cou du bétail, les rangées infinies d'arbres fruitiers qui déroulent devant elle des avenues, Lucrèce veut tout ça. Tout cela agit comme une caresse divine sur sa peau, comme les premières gouttes de pluie après des mois d'aridité .