Tout ça la crève. Ce vase clos. Ces pensées en boucle. Cette envie de sortir de là. La volonté de changer les choses. Le soir, elle est crevée , et parfois le matin, le midi, après déjeuner.
On ne sait pas toujours pourquoi on reste. C'est trop triste de partir encore une fois, de ne pas y arriver encore une fois, de ne pas faire face à un homme encore une fois.
Derrière ses Ray-Ban, elle a des crises d'angoisse. Derrière ses fenêtres avec vue, elle se débat. Derrière ses fenêtres, elle n'a pas toujours voulu vivre. Elle cherche une place.
Le soir, ni café, ni tabac, ni place, ni fontaine, le résultats des ronds-points à hypermarchés.
Comment peut-elle écrire dans une maison où tout stagne comme l'eau croupie, où chaque fois qu'elle entre, il s'abat sur elle une sensation morbide. L'angoisse que rien ne change.
Mesure-t-on la possibilité d'un certain bonheur à ces moments précis? Des moments qui restent en tête, vus de l'extérieur, des détails qui disent un changement, un basculement.
Ils sont allés jusqu'à la fin de l'été. Anne s'est habituée. Elle s'est habituée. Malgré elle. Avoir
traversé l'été c'est une victoire. D'habitude elle part avant. Elle ne tient pas jusqu'au bout.
Les êtres hurlent parfois comme des chiens, tristes, montrent les crocs, se défendent, luttent, s'arrachent les cheveux, se tapent la tête contre les murs, en bavent. Y a pas de honte. Ils ne lisent que des livres qui font vivre et supporter la mort.
Voilà, elle veut écrire un sirtaki de Zorba! C'est comme quand elle est arrivée à Paris, jeune femme, encore jeune fille, elle n'a pas aimé toute cette beauté, le Louvre, les immeubles aux façades décorées, les ponts, les moulures au plafond, les trucs en trop. C'était mieux dans son port. Les avenues mènent à la mer, des bourrasques vous arrachent, les bars sans terrasse, les rues vides où l'on n'est que soi-même.
Les vagues de l'Atlantique faites pour les enfants, les adultes à âmes d'enfants et les surfeurs dont le corps musclé jamais elles ne flagellent.