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Citation de missmolko1


Il fait chaud dans la cuisine sombre du rez-de-chaussée. Khadija prépare un couscous et des salades pour le dîner. Assise a coté d'elle, Mara lui passe les ustensiles, épluche les carottes, lave les navets, ajoute un peu de cannelle et de fleur d'oranger dans un plat, du cumin dans un autre. Les casseroles sifflent au-dessus du fourneau. La lumière est filtrée par des carreaux de couleurs vives. Seule une lampe rouge est allumée, sur une table. La pénombre se répand peu a peu, dissimulant les deux femmes dans des vapeurs lourdes. Mara se sent bien, Khadija l'apaise, l'agitation de ses mains et l'immobilité de son corps l’apaisent, son odeur l'apaise. Dans cet espace chaque geste a un sens, une histoire. Chaque pincée de sel distille un héritage.
Mara voit des générations et des générations de femmes confinées aux cuisines, ou se murmurent les secrets, les rumeurs, les drames insoupçonnés, les angoisses, les amertumes, les espoirs ; ou s'expriment les frustrations du corps mais aussi ses délices, ou les tabous sont levés, les propos échangés sans pudeur, la parole libérée par le cancan de la cuisine. Un lieu clos d'ou rien ne sort que les plats destinés aux hommes, guindés et s'ennuyant dans la salle a manger, représentant... représentant la position sociale, la position familiale, la position politique, la position assise. A la cuisine on ne représente rien, on transforme les aliments, on les malaxe dans des mains écorchées, parfois manucurées lorsque des fêtes ou des mariages obligent a recouvrir les ongles incarnés de carmins étoilés, on goûte, on rit, on se tait quand un homme rentre, on rit encore quand il sort. Et puis on soupire.
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