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Citations de Michel Chaillou (44)


On l'a déjà compris, je voyage comme je parle, à bâtons rompus, m'attardant si le lieu m'enchante, m'esquivant dès qu'il me fâche, flânant, recherchant à perte de vue l'objet toujours en fuite de ma flânerie, digressant, aspirant à respirer aussi bien la fleur d'une idée que celles , odorantes du chemin (...)
m'aventurant aux abords, aux abords de tout, hameau, village ou clocher, ville ou cathédrale, préférant le vicinal, le cantonal, le départemental au national, à ces forcenés d'autoroutes (...p. 77)
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Le fané ? Le démodé de la fleur.
(...)
Une chose folle me revient : l'âne serait-il en définitive le démodé du cheval, un cheval démodé ?
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"Fin de siècle", expression désabusée qui m'a toujours enchanté. J'y lis l'élégance d'une mode surprise juste à l'instant où elle se démode, une fin qui s'éterniserait dans sa finitude, une fin qui n'en finirait pas de s'achever. Etre "fin de siècle", se prendre les pieds dans la traîne du temps qui passe, se servir de cet embarras pour devenir une sorte de dandy du passé ! p 24
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A dire vrai, je n'ai jamais su partir. D'abord pour partir, il faut être là, or je suis tellement toujours ailleurs, distrait, préoccupé, filant ma laine...Ensuite quitter, s'en aller, tous ces mots qui tournent le dos, pas mon être. (p.13)
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Et la télévision, la radio ont beau mettre leur voix aux enchères, je deviens sourd à leurs alarmes, cherchant un coin retiré de l’espace où la solitude pourrait s’asseoir avec moi sur un banc. Car la solitude a aussi ses bancs. J’y patiente, m’amusant de mon ombre, si le soleil m’en fournit une, songeant à mes dernières lectures dont la page se tourne alors en moi. Cette anecdote par exemple, tirée d’un vieil almanach où la poussière a inscrit son nom. « Monsieur de Fontenelle souriait quelquefois, mais ne riait jamais. On lui en demandait un jour la raison. Je ne me suis jamais senti le besoin de faire ah, ah, ah ! répondit-il. » p 44
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Cette manie de me rendre à la gare des heures à l'avance pour endormir le voyage dans les nuages de l'attente.
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Extrait (première page)

J'aimerais parler d'un livre, l'Astrée, très lu sous Louis XIII, je souhaiterais qu'il fût pays, pays avec villages et collines, hameaux et fermes isolées, pays que les pas peuvent atteindre et les troupeaux investir, mais les prés restent à leur place entre Roanne et Saint-Etienne et la lecture n'est pas la marche, à première vue.
Tourner la difficulté au lieu du bosquet (passez-moi le mot vous aurez les branches vives), en rire comme d'une idée de sommeil (allongée en ellipse du sud au nord, la plaine du Forez, lieu-dit de l'Astrée, est d'ailleurs un lit, bientôt le vôtre, le lit d'un lac dissipé depuis le tertiaire, le prouvent, outre l'analyse des sols (oligocène recouvert d'alluvions), la tournure flottée des Foréziens, leur indolence qui garde en mémoire le fil de l'onde), si cela se nomme sommeil cette permanente impression en lisant d'ouïr des paysages : l'arbre glissant dans l'arbre, la rivière dans ses eaux (le Lignon se jetant en Loire à Feurs, 6 692 habitants, y perdant son nom propre, écrit Honoré d'Urfé, l'auteur de l'Astrée), croire à un leurre montant de la troupe des syllabes (l'Astrée a ses mirages, son espace moutonnant, poissonnant où des ombres au fin fond du discours échangent des paroles aussi chimiques que l'eau des sources), arguer d'une illusion d'oreille ou d'oeil (il faudrait des sens intermédiaires, ni le toucher ni l'odorat, ni les autres, un mélange) ne m'empêchera pas de poursuivre la chimère d'un livre engagé dans le relief (le volcanisme du Forez s'expliquerait-il ainsi ?) dont j'entends le murmure végéral, les chaumes, quand la phrase s'éternise en phrases - les longueurs tant décriées de l'Astrée, ses engourdissements d'argile et de sable -, de sorte que plus personne ne sait de quoi il est question, à part l'écho, signe d'une terre proche (sous quels mots les mottes ?), qui interroge encore, subtil arpenteur.
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Feu, préhistoire d'une femme et d'un foyer, lenteur, vaste demeure, kyrielle de portes, couloirs, réduits, torche des escaliers, possible criaillerie d'un toit, parquets cirés, meubles, bibliothèques, assemblée de housses, hautes croisées, visions sur terrasse herbue, chemin de ronde, château vu de l'extérieur, composite, partie dégueulasse, l'autre féodale, bien encroûtée dans la terre, une tour, un porche, la serre, carreau cassé (matin avec carreau cassé), bêches, brouette, fouillis agricole, plantes exotiques en pot, bric-à-brac, poussière, homme de dos s'affairant, il se retourne.
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-D'ailleurs les villes aussi désertent. Exprès pour les attacher, retenir, qu'on a créé des boulevards de ceinture.
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Un livre souvent me leste. J'en ai plein d'ouvert à la fois et de toutes espèces, de tous côtés. Je réfléchis, remue les phrases comme on fourche dans la paille à la recherche du fond obscur de la remise.
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Mon problème, à moi, c'est que dans mon enfance, vers dix ans, je vous le disais tout à l'heure, j'ai lu des livres qui n'étaient pas de mon âge. En effet, le hasard de la vie a fait que j'ai eu à disposition pendant quelques mois, une bibliothèque fantastique qui venait de mes ancêtres et qu'on a été obligé de vendre à la salle des ventes de Nantes. Et j'ai donc vu disparaître devant moi, à dix ou onze ans, tous les livres que je devais recevoir en héritage. Peut-être que j'ai écrit pour recomposer, je l'ai souvent dit, cette bibliothèque. (p.11)
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On va rentrer dans l'intelligible du roman, mais l'inintelligible du roman est plus important que l'intelligible du roman. C'est l'inintelligible qui reste à la porte qui explique l'intérieur. (p. 21)
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-lire ce qu'il y a entre les choses, et dans les grands livres en définitive, ce qui est beau ce ne sont pas seulement les mots, c'est ce qu'il y a entre les mots.
Je dirai qu'un grand livre, c'est quelque chose où il y a beaucoup de choses entre les mots. Beaucoup de non-dit entre ses dits, et peut-être que tous ses dits sont écrits pour frapper, comme deux armures, le choc du non-dit entre les mots. Et peut-être que les grands livres ont entre eux d'autres livres qui se profilent entre les mots qui les composent.(p. 8)
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Les habitants paraissent indifférents au souvenir de Montaigne, mettant le doigt dans le nez de la question, s'esclaffant. Personne n'ignore qu'autrefois quelqu'un méditait le haut de la tour, mais toiture enlevée, cloche fondue, chacun prend ses aises, même château, donc même chemise, cotte durant des semaines, chaud, on débraille, neige, glace, boue, on brûle. De Lamothe, on sent déjà la merde, néanmoins dans un an, monsieur du Buc va reprendre la gestion du domaine.
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Il entendait le tumulte de la baignade sur l'autre versant de la butte féodale, et Condé, Rohan, Turenne, Béthune, (le futur Sully marié depuis un an à la fragile Anne de Courtenay) s'ébattaient dans l'eau vaseuse, en compagnie d'autres gentilhommes de la suite royale, tel ce capitaine Roux que Montaigne mentionne dans ses "Éphémérides", sorte d'agenda semblable à ceux que Gabriel Lorgerie égare perpétuellement, retournant ses vêtements, dans l'espoir toujours vain de ressaisir, mélangé aux fientes de ses poches, le calepin, indispensable croit-il alors à sa fumée songearde.
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C'est Michelet, dans son Journal, qui avoue voyager plus en lui-même que dans le pays qu'il traverse. Mais les "électricités" diverses des régions qu'il sillonne ont développé la sienne. Il étincelle, tressaille d'un rien, la main lui brûle de l'impossible passé, un savoir exquis dirige ses pas. Il cherche sur la route poudreuse à tirer des limbes du paysage les fantômes qui le peuplèrent.
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La littérature c'est la vie intérieure des choses et des êtres, et cette vie a des origines, un mystère à syllaber, à faire pressentir, d'où l'importance pour moi de la généalogie. La généalogie c'est la traînée d'ancêtres qui vous a produit. Eh bien il y a aussi une traînée des choses qui produisent les choses. Et quand on rencontre un personnage dans un roman, si l'on ne sent pas derrière lui cette traînée d'ancêtres, il a moins d'épaisseur. Si vous arrivez à faire percevoir au lecteur inconsciemment la traînée d'ancêtres qui ont produit le personnage qu'il découvre sur la page, à ce moment-là, vous avez gagné. (p. 22)
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  Serait-ce de ce film que je tire mon goût du dé-
modé ? D'espérer contre toute raison une histoire
passée de mode d'une veste qui se fatigue, un conte
désuet de vieux pulls usés aux coudes ? Quand je
croise quelqu'un dans la rue, ce sont des détails
ce cette sorte qui en premier me retiennent. L'im-
perméable où se déchiffrent encore d'anciennes
pluies, le ciré d'allure plus farouche qui s'ameute
encore d'avoir fréquenté des tempêtes, et si je me
trouve alors au bord de la mer, d'imaginer aussitôt
le pont battu d'écume d'un bateau de pêche, frêle
coque de noix se cognant contre l'horizon.
  Sans doute jugera-t-on futile un tel intérêt pour
de simples frusques ? Pourtant, c'est dans leur
replis que se cachent les premières apparitions du
démodé.

p.23
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Et pourtant ce matin-là, chose étrange, il me semble bien dans mon souvenir qu'il resta muet comme la carpe qu'il n'a pas pêchée. Pourtant, avec son air fureteur et ses
mains potelées promptes à déballer n'importe quoi, il sait tout avant tout le monde ! Ah j'oubliais de vous préciser, prise par le charme de leurs personnes, qu'à sa fenêtre
pendant que je vous parlais d'eux la soi-disant Clémence que j'étais alors fut soudain témoin…
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Voici donc point par point et ligne après ligne, sans en omettre une virgule (bien que la ponctuation d'aujourd'hui ne soit plus celle d'hier et on a vu des innocents expédiés en prison pour moins que ça), tous les détails de cette ténébreuse affaire, à ce jour pas encore résolue de manière à mon sens satisfaisante. Peut-être que vos lumières s'ajoutant aux miennes nous permettront d'approcher au mieux la vérité, si inattendue soit-elle !
Aussi, tempérant mes audaces (on me reproche assez dans mon parentage mes outrecuidances de style), ai-je décidé de me lancer dans une relation que j'espère sobre et dépourvue d'artifices. À vous de juger, de vous faire une louable opinion. Voici donc vous dis-je, une à une et comme encore saisies par le vif ou la mort de la chose, les
pièces uniques du dossier.
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