La roue de Fortune dont le symbole était cher aux hommes de la fin du Moyen Âge accélera son allure au début du XVe siècle. Il ne s'écoula pas dix-neuf ans avant que Jean Sans Peur ne connût, sur le pont de Montereau, le 10 septembre 1419, le sort auquel il avait sacrifié son cousin germain [Louis d'Orléans] en un coin obscur de la rue Barbette, à Paris, en novembre 1407. Les récits des deux meurtres laissent un égal relent de vendetta, venu de la tradition ou des antiques "faides", à travers les rivalités des lignages féodaux. [...] Dans l'alternance des "vendetta", la couronne n'était qu'un enjeu, et Paris moins une capitale que le théâtre préféré des règlements de comptes. [...] Ainsi, tout au long du siècle qui sépare Philippe VI de Valois de Charles VII, la royauté fut aux prises avec des forces adverses. Elle était à la merci des coteries aristocratiques et des intrigues de cour ; les bourgeois ont voulu la mettre en tutelle ou profiter des possibilités de contrôle que leur procurait la finance ; les universitaires ont estimé qu'il était de leur rôle de lui dicter des réformes ; les partis ont cherché à dominer l'État. Des épisodes sanglants rythmaient le jeu des forces concurrentes. En de telles heures troubles, le régime politique semble ravalé à une tyrannie des intérêts partisans tempérée [ou attisée] par l'assassinat. À défaut d'arbitrage politique, trop souvent impossible, il aurait fallu au moins que le déchaînement des cupidités, des haines et des vengeances rencontrât un frein sur le plan moral.