"Vous avez 10 sur 10 ! " : Phrase historique prononcée à Montréal, en 1976, par un jury olympique à une petite gamine roumaine de 14 ans. Historique ? En effet, car la petite Nadia Comăneci, venait par sa performance gymnastique, pour la toute première fois dans les annales olympiques, de realiser ce qui est appelé : un 'score parfait' !
Rassurez-vous je ne vais pas vous ennuyer avec des statistiques sportives. N'étant personnellement pas très sportif, en chiffres sportifs je serais vite paumé. Quand, à 16 ans, il m'est arrivé de sortir victorieux d'un championnat local de saut en hauteur, je suis incapable de vous dire aujourd'hui, même approximativement en cm. , mon score.
Ce qui m'intéresse c'est de comprendre comment un tel phénomène est possible et ce que cette star est devenue !
Qui, des quelques 30,000 habitants d' Oneşti en Moldavie occidentale, aurait pu prévoir, en novembre 1961, que Wikipedia, caractérisait des années plus tard cet endroit tout simplement par : "Municipalité...connue pour être la ville natale de Nadia Comăneci" ? Issue d'une famille simple, sa mère décida de lui donner le nom diminutif de Nadiejda (d'après une héroïne du cinéma russe ou de la femme de Lénine, Krupskaia ? ) le choix de Stefania est prémonitoire, car il signifie en français 'Espoir' . Môme, cet espoir débordait tellement d'énergie, que pour la calmer, sa mère l'envoya à une école de gymnastique. C'était le point de départ d'une fulgurante carrière. Déjà à 9 ans, elle remporta le titre de gymnaste national. Et jusqu'à Montréal, c'est une longue liste de victoires, que je ne vais pas énumérer ici.
Je préfère analyser ses performances à la lumière des maux principaux du sport au plus haut niveau. Schématiquement, j'en vois trois : 1) l'argent et son corollaire la corruption et la magouille ; 2) l'abus de drogues et de traitements nocifs et 3) les contraintes découlant des considérations de prestige national.
1) L'athlétisme n'est pas exactement un sport où l'on brasse des millions. Ce n'est pas comme le football, où un Joseph 'Sepp' Blatter de la FIFA, était assis, comme Balthazar Picsou de Walt Disney, sur une montagne d'or. Il n'y a pas ces sommes folles pour les transferts de joueurs, les pots de vin pour pouvoir organiser des compétitions et les salaires faramineux payés aux joueurs de première division. Beaucoup d'athlètes ont, en revanche, des problèmes de revenus en fin de carrière sportive et certains champions olympiques ne survivent que grâce à une misérable subvention d'État. Donc, l'argent peut être exclu comme facteur d'explication des prouesses de la jeune Nadia.
2) le problème drogues et traitements médicaux est, dans son cas, plus délicat. S'il n'y a aucune indication qu'elle aurait eu recours à des produits prohibés comme les sportifs de l'ex- République Démocratique Allemande (RDA) et certains russes même de nos jours sous Poutine, il paraît, au contraire, qu'elle a subi des traitements pour retarder la puberté. Ce qui nous amène au prochain point.
3) Les contraintes de prestige national ont certainement joué un rôle important dans son cas. Pas surprenant quand on a le bonheur de devenir adulte, bourrée de talents dans le paradis de l'affreux couple Ceauşescu ! Pour le dictateur roumain toute victoire était importante, dans la mesure qu'elle l'aidait dans ses rêves de grandeur d'occuper une place centrale entre l'est et l'ouest. Ces contraintes se sont traduites pour elle dans un rythme d'entraînement et de compétitions hallucinant.
Quoi qu'il en soit, ses accomplissements demeurent fabuleux, en dépit des exigences nationales et malgré le scepticisme des jaloux et la critique des mauvaises langues. Totaliser 16 médailles or : aux JO 5, aux championnats du monde 2 et 9 aux championnats d'Europe ont fait d'elle la sportive avec le plus grand impact bénéfique sur la jeunesse.
La défection de son entraîneur Béla Károlyi aux États-Unis en 1981, marqua un tournant dans sa vie et 3 ans plus tard, à l'âge de 23 ans, elle met fin à sa carrière sportive. Privée, de son petit salaire et interdite de voyager, elle devint, comme elle l'a noté elle-même dans ses mémoires, "prisonnière" de son pays. Sa fuite, en 1989 peu avant la chute et l'exécution des Ceauşescu, lui a ouvert de nouvelles perspectives. En 1996, elle se marie avec l'athlète américain, Bart Conner (2 médailles or) de qui elle a eu un fils, Dylan, à 45 ans. Sa vie actuelle est toujours sous le signe du sport, comme cogérante de la Conner's Académie à Oklahoma et leurs efforts joints pour les JO spéciaux (handicapés).
Que lire ? Il y a plusieurs ouvrages qui lui sont consacrés : son autobiographie, 'Letters To a Young Gymnast', non-traduit en français, la biographie de Gloria Miklowitz de l'université de Michigan et l'ouvrage à succès de Lola Lafon, 'La petite communiste qui ne souriait jamais', duquel Aela de Babelio a fait une excellente critique. Si vous préférez juste revivre les moments glorieux de sa carrière, il y a 'The Picture Story' de George Sullivan et le magazine 'Time' d'août 1976.
Nadia Comăneci est la seule au monde à avoir reçu 2 fois la distinction olympique suprême, le prestigieux 'Ordre olympique', en 1983 et 2004. La première fois, elle était aussi la plus jeune. Un autre record !
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Je suis venue à ce récit autobiographique par hasard, alors que je venais de lire un roman jeunesse sur le régime de Ceaucescu et que j’avais envie d’aller plus loin. Et cela a été un vrai plaisir de lecture, contre toute attente. Le récit, décomposé en chapitres marquant les grandes étapes de la vie de Nadia, se lit très vite et facilement. La gymnaste s’adresse à une jeune fille indéterminée et répond aux questions qui lui ont été posées auparavant. Chaque chapitre commence par le descriptif d’un mouvement de gymnastique et le récit intéressera forcément les adeptes de ce sport. De nombreux conseils sont prodigués pour réussir certains mouvements, des propos peuvent également aider les jeunes athlètes à connaitre leur niveau de volonté pour poursuivre ou non la compétition. On constate par ailleurs, en lisant ce livre, les évolutions qui ont marqué la gymnastique : la sécurité du matériel moderne, l’apparition des sponsors, l’accompagnement musical… J’ai aimé le fait que l’auteur remette certaines vérités sur le tapis, qu’elle mette certains faits au clair : elle n’a pas été riche, n’a pas cherché à se suicider, n’a pas vécu ses entrainements comme une torture… La force de travail et la détermination de Nadia Comanecci m’ont stupéfaite et je la considère, après cette lecture, comme un modèle pour tout sportif (les dix règles qu’elle s’impose sont tellement raisonnées !). Enfin, la réalité du régime communiste est décrite et, même si j’étais au courant de certaines réalités (la faim, les files devant les magasins où on ne trouvait rien, l’omniprésence de la Securitate, la délation…), j’en ai découvert d’autres comme le salaire des femmes de 25 ans sans enfant presque intégralement retenu. Une belle surprise donc pour cette autobiographie sur laquelle je ne misais pas grand-chose !
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