"Le sens du calendrier" lu par son autrice, Nathalie Léger-Cresson (extrait)
Avec le vide sous les pieds, le froid qui monte et la lumière qui baisse, sans l’amant, pourtant gros et grand, inexplicablement disparu dans cette chute verticale de l’année, j’en suis réduite à lire des ouvrages sur l’hibernation des marmottes et la dormance des arbres. Laquelle est plus difficile à imiter mais très belle, si tu songes aux bourgeons qui contiennent déjà toutes les fleurs et les feuilles du printemps en miniature.
Erreur : L'idée que nombreux sont n'y était pas, tu l'as ajoutée. C'est comme ça, on fait des erreurs, on n'est pas des machines.
C'est parce que L'ADN est fait de deux brins complémentaires que je suis dans vos bras, que Tristan et Iseult, Roméo et Juliette, les douches séparées à la piscine, le voile intégral, Viens Poupoule et la salsa, les lits deux places, pour le meilleur et pour le pire, papa est en haut qui fait des gâteaux, bats ta femme elle sait pourquoi, les beaux ténébreux, les filles faciles, la courbe de tes yeux fait le tour de mon coeur.........
je ne peux plus vivre comme avant dans
une
interprétation personnelle
de la réalité.
On voit d'abord, gravés au doigt d'un large trait blanc dans la paroi tendre, un beau cheval avec d'autres animaux. Puis un hibou, debout, les ailes repliées. Sa tête nous fait face, il nous regarde de ses grands yeux, mais son corps est de dos, comme il arrive aux vrais hiboux.
LE HIBOU
Il est difficile de parler de ces choses, même avec vos mots d'aujourd'hui -si aujourd'hui est ce jour où nous nous regardons, toi par terre et moi dans mon arbre, pendant que nos vies s'écoulent, mais ce n'est pas exact. Ma vie ne coule pas comme la tienne, de la naissance à la mort. Aujourd'hui n'est pas seulement pour moi ce jour où je te rejoins, dans un futur si lointain que son existence même est inenvisageable pour la plupart de moi.
Je, nous, voulons te parler de ces moments où ma vie, si je peux employer ce terme, touchait le battement profond du temps. Comme si l'essence insaisissable du temps me devenait sensible.
...
Pour moi ces moments étaient d'une joie grave que je ne pouvions dire à personne. Nous en recevions le secret avec les obligations de notre charge, quand le Hibou précédent nous la transmettait, et c'était bien ainsi.
On voit d'abord, gravés au doigt d'un large trait blanc dans la paroi tendre, un beau cheval avec d'autres animaux. Puis un hibou, debout, les ailes repliées. Sa tête nous fait face, il nous regarde de ses grands yeux, mais son corps est de dos, comme il arrive aux vrais hiboux.
LE HIBOU
Il est difficile de parler de ces choses, même avec vos mots d'aujourd'hui -si aujourd'hui est ce jour où nous nous regardons, toi par terre et moi dans mon arbre, pendant que nos vies s'écoulent, mais ce n'est pas exact. Ma vie ne coule pas comme la tienne, de la naissance à la mort. Aujourd'hui n'est pas seulement pour moi ce jour où je te rejoins, dans un futur si lointain que son existence même est inenvisageable pour la plupart de moi.
Je, nous, voulons te parler de ces moments où ma vie, si je peux employer ce terme, touchait le battement profond du temps. Comme si l'essence insaisissable du temps me devenait sensible.
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Pour moi ces moments étaient d'une joie grave que je ne pouvions dire à personne. Nous en recevions le secret avec les obligations de notre charge, quand le Hibou précédent nous la transmettait, et c'était bien ainsi.
Et puis, ils tenaient la preuve qu'ils étaient tous de la même famille. Aucun anchois, baobab ou moucheron en se posait la question, et la plupart des humains non plus. L'idée qu'ils descendaient d'une même poignée de singes flottait en l'air sans les atteindre.
Si l'on trouve un visage suspendu par l'étreinte.
Si l'on trouve des racines éléphantesques.
Si elles soulèvent le cheval et le font décoller avec son cavalier.
S'il rejoint la cime des arbres pour disparaître dans les nuages sans se retourner vers nous.
Il est trop tard!
Regretter.
Terriblement regretter, jusqu'au remords, la honte.
Laisser remonter les vies humaines écrasées, les animaux empoisonnés, les amours perdues, toutes les heures.
Tout ce qu'on n'a pas fait, pas sauvé.
Tout ce qu'on a raté, perdu, oublié.
Se laisser couler.
Pleurer dans les ruines.
AH LALA AH LALA
IL EXISTE UNE TENDRESSE AH LALA, SOULEVEE PAR L'ETREINTE, OUVERTE, SUSPENDUE.
QUI FAIT PLEURER
Bison:Je ne t'écrase pas trop? Ma tête, surtout, doit peser sur ton ventre.
Lionne: Je vais peut-être t'étonner mais j'aime sentir ton poids sur moi, Bison. Ta joue laineuse et ton souffle me prouvent que je suis vraiment ici.
Bison: Bien sûr, tu es ici! Ici dans le noir avec moi et nos enfants qui courent en dormant sur les murs. Je sens ton ventre sous ma joue, et ta cuisse qui, sous ma patte, tremble parfois quand tu rêves. Autour de nous rien ne bouge, sauf un peu d'eau. Mais depuis des milliers et des milliers d'années nous sommes les seuls ici à pouvoir parler. J'aime ce calme, Lionne. Ceux qui nous ont peints nous ont oubliés.
J'étais décidée à baisser la tête et remercier. Et paf, les ours blancs !