L’Ange de la mélancolie suivi de Quand je serai grand je serai mort est paru initialement chez Asgard en 2012. Ces deux recueils de nouvelles « noires » ont ensuite été réédités séparément par Flatland avec deux magnifiques couvertures de Victor Soren. Heureuse initiative, car ils ne sont pas exactement dans le même registre.
J’ai chroniqué le second dans Gandahar 28 en lui donnant une note de 4,5/5 sur Babelio : « Le contraste, entre ce contenu macabre et la délicatesse de la langue que nous offre l'auteur, en fait une œuvre rare qu'il ne faut pas manquer ».
L’Ange de la mélancolie reflète une démarche un peu différente : la mort est toujours très présente, ainsi que la maîtrise de la langue, mais cette fois s’y ajoute une forme de catharsis de la part de l’auteur, affirmée dans sa revendication homosexuelle.
On voit, par exemple, un magicien planter des clous dans la tête de son amant ou deux tourtereaux se déchirer de jalousie jusqu’à s’arracher les yeux ou encore un garçon “différent” réparer les cœurs de toute la ville.
Mais qui va réparer le sien ?
Sous les assauts pervers de son aimé, un garçon se dissocie de son corps, observant une merlette accompagner ses petits dans leur premier envol. Vont-ils réussir ce défi ?
Dans « Priapées », parfaitement accomplie dans l’horreur et ma préférée, un frère et une sœur récoltent des sangsues dans le marécage imprégné de buée...
La cruauté affutée de ces nouvelles en quête de beauté révèle la grande souffrance d’un cœur écorché vif.
Cela m’a touchée.
D’aucuns ont pu être dérangés par le côté sexuel parfois brut de ce recueil, à peine travesti par une spéculation allégorique, mais Nicolas m’avait bien prévenue de lire cet ouvrage à petites doses et j’ai effectivement pris mon temps. Ce témoignage de désespoir ne peut pas laisser indifférent. Loin de me faire lâcher le livre, il m’a donné envie de relire Quand je serai grand je serai mort qui reste pour moi un petit bijou de noirceur. CB
Chronique parue dans Gandahar 32 de juin 2022
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Quand je serai grand, je serai mort de Nicolas Liau
Flatland éditeur, 2020
Aussi noir que la très belle couverture, brossée à la pierre noire, vous le laisse présager, ce recueil de nouvelles est un petit bijou.
Dans une écriture ciselée et d'une haute tenue, Nicolas Liau nous délivre quatorze nouvelles d'une égale noirceur, plus une qui sert de lien dans cette promenade funèbre.
On y croise une petite fille qui joue à dompter des corbeaux autour d'un pendu ; un mort qui vient récupérer des objets dans son ancienne maison à l'insu de son épouse ; un simplet qui essaie de tirer son père de la mort avec une clé ; une femme en fin de vie qui se sert d'une viole pour absorber la quintessence de la mort ; une rescapée d'un double suicide, hantée par son amie défunte, qui finit ce qu'elle avait commencé ; une pauvre diablesse qui fait un marché de dupe avec le cadavre d'une femme riche, à propos de son fastueux linceul dont elle veut protéger son petit ; un homme qui recueille les confidences des arbres où se sont nichées des âmes égarées ; un avare qui acquiert par hasard des bottes enchantées mais se voit punir de son avidité maladive ; le fantôme d'une vierge qui cherche un candidat pour lui ravir sa virginité ; etc.
Toutes ces nouvelles commencent par « Il était une fois » ou « Il y avait une fois », comme les contes de fées, mais leur contenu les apparente davantage à la veine fantastique des contes de revenants.
Le contraste, entre ce contenu macabre et la délicatesse de la langue que nous offre l'auteur, en fait une oeuvre rare qu'il ne faut pas manquer. CB
Chronique parue dans Gandahar 28 en juin 2021
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Voici une lecture qui a fait émerger diverses sensations en moi mais surtout des émotions fortes grâce à cette belle écriture poétique teintée de romantisme, et ce malgré la noirceur des textes.
Donc chapeau bas M. Liau !
Le recueil se compose de 15 "contes déliquescents" + un dernier "Les rêveries du promeneur suicidaire" qui est fragmenté entre les différents textes.
Le récit qui ouvre le recueil "Pour qui croassent les corbeaux ?" est en lien avec la couverture qui nous montre bien l'univers dans lequel nous allons rentrer...
C'est aussi un de ceux qui m'a le plus marqué. Avec également : "J'irais marcher sur vos tombes" et "Le martyre des cendres".
Je n'irai pas plus loin dans le détail de ses nouvelles, mais une chose est sûr : vous ne devriez pas être déçu !
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Attention au piège : ceci n'est pas un roman, mais un recueil de nouvelles (même deux recueils : L'Ange de la Mélancolie et Quand je serai grand, je serai mort). Prise dans ma frénésie d'achat, je n'avais même pas pris la peine de lire attentivement la quatrième de couverture. L'illustration me plaisait bien, j'aimais beaucoup la maison d'édition, et ça m'a suffi. Je me suis plongée dans cette aventure sans à priori, me doutant que l'histoire serait gore et angoissante (le magnifique dessin sur la couverture est, disons, assez parlant). J'ai été un poil désillusionnée en me rendant compte que ce n'était pas un roman. Mais finalement, les histoires courtes conviennent à ce style, cela permet de segmenter la lecture.
Le texte tient ses promesses : c'est gore ! Je dirais même, âmes sensibles s'abstenir. Nicolas Liau écrit fantastiquement bien, ses récits sont remplis de merveilleux et d'une poésie pleine de sensibilité ; mais c'est une beauté mise au service du sang et de l'horreur. Merveilleux dans le sens de réel merveilleux, attention. Par exemple, dans « Enfer et Damnation », Léandre arrache les yeux de son amant et plante dans les deux globes sanglants deux bagues qui resteront enchâssées dans la chair quand les plaies guériront.
En fait, tout ce qui peut symboliser le beau, l'innocence, la douceur est finalement détruit. Dans « Pour qui croissent les corbeaux ? », une petite fille joue sur une balançoire accrochée à un arbre… dans les branches duquel un pendu est en train de pourrir. Les corbeaux veulent le béqueter, bien sûr, et elle défend son « ami » en s'efforçant de faire peur aux oiseaux. Mais finalement, ceux-ci devenant plus audacieux, elle reconnait qu'elle est incapable de lutter contre la nature et renonce à ce jeu. Elle en joue à un autre, plus cruel : c'est elles qui, telle une maîtresse d'école, orchestre leur festin. Elle y met tant de rigueur que ses sous-fifres se rebelleront et transformeront en bourreaux.
L'enfant, symbole de l'innocence et de la pureté, côtoie donc l'immonde très naturellement. C'est un peu perturbant, je vous l'accorde. Ce style d'écriture évoque le spleen baudelairien, où la beauté se mélange à la laideur et conduit à la souffrance (car elle est éphémère) : « Le Masque », « La Charogne »…
J'avais lu dans la préface que l'éditeur avait dû faire une pause dans sa lecture tant il avait été pris aux tripes (oui, c'est la première fois que je lis une préface en entier…). Et moi, avec mon orgueil de lectrice, je m'étais cru suffisamment rodée pour tout lire en quelques jours, sans couper ma progression. Erreur ! Au bout d'un moment, gorgée de sang et de malheur, j'ai dû laisser le livre de côté pendant quelques semaines le temps de me remettre. L'horreur est tellement banale, presque gratuite, qu'une pause est nécessaire pour se ressourcer.
Mais il faut dire aussi que le schéma est très semblable d'une nouvelle à l'autre. En général, tout commence normalement (soit à notre époque, soit dans une autre), on rencontre un personnage principal banal (soit heureux, soit malheureux) dans le quotidien duquel le surnaturel fait irruption (en fait intriguant ou alors en guérison de la souffrance). Au début, ce n'est pas forcément menaçant, mais dès qu'on s'en rapproche, on se rend compte que c'est quelque chose de peu ragoutant voire de franchement mauvais. Toutes les histoires finissent mal, tous les personnages sont aspirés par cette maléfique magie. Le héros est presque systématiquement une victime qui se fait trahir par un être aimé, et c'est là l'origine de toute souffrance. L'amour est ainsi source d'un bonheur tout illusoire, et surtout de grands malheurs. Tellement de malheurs que ça en devient – et j'insiste là-dessus – gratuit.
La même chose se produit pour le surnaturel : dans « La Gueule des Deux Mignonnes », la fille du protagoniste tombe dans un puits qui n'est autre que l'antre de vouivres jumelles. La seule chose qui ressort de ce puits est la matière inorganique, parfaitement intacte (vêtements propres et pliés posés sur le bord du puits, s'il vous plaît). Toute chair, tout ossement disparaît mystérieusement. L'histoire commence à partir de là, car le père va chercher à se venger de l'homme qui a vu sa fille mourir, mais n'a rien fait pour la sauver. le surnaturel dans cette nouvelle n'a pas d'utilité particulière, à part renforcer le sentiment d'horreur et de dégoût. La jeune fille aurait tout aussi bien pu tomber dans un puits tout simple, ç'aurait été la même chose.
Nicolas Liau abuse un peu trop de ce fantastique, qui gagne finalement à être moins révélé. Je trouve que c'est un peu trop exposé et qu'il perd de sa force.
Au final, j'ai quand même aimé lire L'Ange de la Mélancolie. L'écriture fluide de l'auteur m'a impressionnée. Mais je ne pense pas que je relirai ce livre de sitôt, parce que tant de désespoir mine le moral et qu'au bout d'un moment, on a envie de dire aux protagonistes de se secouer et d'arrêter de se complaire dans leur tristesse. Ils sont tellement sensibles qu'ils souffrent alors qu'il ne leur arrive rien de spécial, comme dans la nouvelle « Fleurs de barbelés », où Wulfan a un coeur si rempli d'amour qu'il est obligé de se l'arracher et de le suspendre à un arbre parce que ses sentiments, ne trouvant pas d'exutoires, le font pourrir…
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J'ai mis 2 étoiles parce-que c'est bien écrit et poétique
Mais, je n'ai pas pu finir ce livre, où je me suis perdu dans l'horreur et les mauvais sentiments, la mort est permanente, le sexe lesbien est dérangeant
Dormir après une telle lecture est difficile, peut être que c'est trop bien imagée et morbide
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Un documentaire classé par ordre alphabétique qui vous présente les créatures et êtres fantastiques issus du folklore berrichon.
Vous pourrez ainsi mieux les identifiez et les reconnaîre si par mégarde vous les rencontriez dans cette région uniquement
Valérie Berton Médiathèque de Chevilly Larue
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