Devant elles, c’est la vie qui s’allonge, obscure et froide, une vie de sacrifices et d’effacements ; des vieillards mourants, les plus pauvres des pauvres, qu’on choisit pour ses frères ; ce sont les heures monotones et insipides, les jours où ne luira sur leur âme pas un seul petit rayon, et les nuits sans repos, et les semaines si banales et si mornes, et des mois, des années de tout cela, et la vie toujours recommençante au contact des tristesses douloureuses de la Mort…
Vous avez beau faire, ils sont toujours sales, dégoûtants. On les lave, on les peigne, on les bichonne, on les habille, on leur dit : voilà, mon brave X… ou mon brave Y…, vous êtes beau comme un ange à présent ! Et dix minutes après, ce cher X… ou ce cher Y… a déjà la figure barbouillée on ne sait comment ; il a bavé à son habitude ; il a commencé à se déchirer les vêtements… Quelques heures plus tard, ils sont redevenus ce qu’ils étaient ce matin, ce qu’ils seront demain, oui : « pas à prendre avec des pincettes.
Tous les jours, la maison est ruinée deux fois. Après le repas du matin, il ne reste rien pour le repas du soir : après le repas du soir, il n’y a plus rien pour le repas du lendemain.