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Citation de Cannetille


— Oh… Qu’elle s’inquiète si ça l’amuse. Ça l’occupe. Tu sais, la vérité, c’est qu’elle s’emmerde dans la vie. Elle soupire dès qu’il se passe quelque chose mais en réalité elle n’espère que ça. Elle se plaint des ennuis que je lui crée. Mais elle fait partie des gens qui aiment ça. Se lamenter à cause du souci qu’on leur donne. Alors qu’ils en jouissent. Enfin quelque chose leur arrive. Enfin ils peuvent se plaindre d’un truc concret. Elle fait partie de ces gens, quand leur gosse se casse le bras, c’est pas lui qu’il faut plaindre, mais eux. Pareil pour moi. Le problème, c’est pas ma prétendue fragilité psychologique. C’est pas pour moi qu’il faut s’inquiéter. Non, c’est pour elle. Elle voudrait qu’on la plaigne d’avoir une sœur comme ça. Comme si c’était plus dur à vivre pour elle que pour moi. Mais c’est comme ça. Il y a des gens comme ça. Tu en connais sûrement.
Bien sûr qu’il en connaissait. Par pelletées. C’était même le cas de la majorité des gens. On pouvait observer ça dans tous les domaines et à tous les échelons. Pauvres gouvernements qui devaient dépenser un pognon de dingue pour s’occuper des plus vulnérables, des plus précaires, rognant des crédits qu’ils auraient tellement préféré réserver à l’enrichissement des premiers de cordée. Pauvres États prospères qui devaient accueillir des crève-la-faim, des gens fuyant la guerre, la misère ou la catastrophe climatique. Pauvres villes bourgeoises obligées d’abriter des ghettos pullulant de chômage et de délinquance et de s’occuper un minimum de leurs habitants qui ne rapportaient rien et coûtaient beaucoup. Pauvres établissements scolaires forcés d’abriter en leur sein des élèves défavorisés, récalcitrants, délaissés, largués, inadaptés, turbulents, malheureux. Pauvres parents affublés d’enfants fragiles, difficiles, remuants, apathiques, hyperactifs, angoissés, casse-cou, ingérables, maladifs, ingrats. Pauvres enfants accablés de parents vieillissants, diminués, séniles, isolés, mourants, chiants comme la pluie. Pauvres individus forcés de prendre soin des leurs. Que d’ennuis. Que de soucis. On ne pouvait jamais être tranquille, profiter bien égoïstement de son petit bonheur individuel, de sa petite maison de son petit jardin de sa petite auto, on ne pouvait pas produire et consommer, se planter devant son ordinateur et partir en vacances sans que quelqu’un vienne nous emmerder.
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