Philippe Beck, Lyre dure.
TOUT A LIEU…
Tout a lieu :
déceptions,
alliance faible, renforts,
entente vague, vagueries,
peu à peu lointainement —
états changeants
conditions des avancées
profondes.
Ça ne fait pas de l’homme
un petit marchand d’allumettes
ébloui à l’idée
de partir sourire dans la lumière
froide et verticale
de l’hiver total.
(Hiver total
égale une saison
illustrant en principe exemplairement
la rudesse
du monde.
La vie n’est pas merveilleuse
du fait de sa rudesse,
mais quand elle est merveilleuse
elle est tout à fait rude,
annonce de rien de plus beau
que la résistance.
À du solide.
Pour du bien ferme.)
Musiques du nom
VII. La chance
Le nom est la chance intense de voir apparaître. Faire voir ce qui est déjà là dans la grisaille de l'oubli, nettoyer les portes bigarrées de la perception, c'est une tâche de l'enfant vrai en chacun, l'occasion de se tendre exactement, qu'il est tenté de saisir, en respirant, au risque de mal dire le prix du manège des noms côte à côte, de la lumière et de l'apparaître, où rien ne commence, où tout est commencé et recommencé diversement. L'enfant vrai dessine, danse (et dessine sa danse), remue les atomes rencontrés en compliquant sa propre densité atomique : il persiste et signe comme un principe d'agitation et d'inquiétude à même la force de nommer, de faire et défaire les noms des entités rencontrées. L'intensité est l'occasion et la cause de la chance de faire apparaître en sentant qu'il y a, là, un réel particulier et porté. La possibilité de nommer désigne la rencontre. Aller vers ou recevoir, c'est être nommé en nommant, être silhouetté en regardant ce que découpe le bain de lumière. La lumière du paradis des différences compossibles n'est ni blanche ni grise, ni incolore : ses chromatismes ne sont pensés qu'à les rencontrer chaque fois. La venue en présence de l'être nommé est l'apparition singulière de la chance.
Tout voyage est une agression. Il vous contraint à faire confiance à des inconnus et à perdre de vue le confort familier du foyer et des amis, on est en perpétuel déséquilibre. On ne possède rien en dehors de l'essentiel - l'air, le sommeil, les rêves, la mer, le ciel - toutes choses qui tendent à l'éternité ou du moins à ce que nous en imaginons. Cesare Pavese
XXXVI.
Une perspective de saillie.
Extrait 2
Mon assurance à l'imparité lattée.
Bienvenu au sonné (et au vase huilé
qu'est le "ni quatre, ni un million de planches").
Aimerais-je la pierre si elle m'aimait ?
Aimerais-je tous les amateurs de la massive
sur laquelle est assise l'inventeur
de la vache électrique ?
p.50
Musiques du nom
VI. Les noms intenses
Comment les noms découpants (qui attachent aux silhouettes), les noms silhouettants, les faiseurs d'aspects, de formes regardées ou longées, gagnent-ils en intensité ? Comment font-ils naître l'intensité de la reconnaissance ? Reconnaître une intensité spacieuse et pour ainsi dire adhérente, qui apparaît aux autres et s'offre à leur attention pour apporter, c'est livrer l'œil qui écoute à sa propre intensité oubliée. La gratitude que fait naître la chance de voir apparaître dans l'attache est une avec la connaissance qui recommence dans la lumière. Toute intensité nommée est un recommencement, une naissance continuée.
Fantaisie-Impromptu
Il y a un lit dans le dur rocher.
Mousse y fait un reposé.
Loin de Muse,
oui,
j’ai cette cornemuse,
non la harpe d’Éole,
En écharpe avant de reposer.
28 janvier 2006,
La main du sommeil, voilà l’objet. La table de sommeil,
pré-Journal, est l’établi de poésie à côté. Elle est florissable
ou fleurie (sureau, ciste, fuchsia) comme du George Eliot,
critique de la neige enveloppante. Et de la neige sur l’eau.
Le sommeil ressemble au « devoir de Noël », i.e. faire mi-
roiter les dons de chaleur et de couleur par un contraste
de neige et de gel. Eau ancienne fait miroitement d’ondu-
lations de membres d’enfants, ourlement des toits en pente,
découpage de lauriers et de pins, avant un frisson sonore.
Les accidents du terrain Monde sont habillés d’un blanc sous
ciel nuage immobile et pâle, étang levé près du Pays d’Atten-
tion. Un pan de neige tombe du toit parfois comme une cou-
verture se froisse la nuit, frisson de notations loin de la rivière
sombre qui est couverture de plaintes et suggestion de repos
dans le bruissement vif. Nuit a un air de cristal ou étoiles des-
cendues, mais elle est réversibilité, gant exploité, pré-ensoleil-
lement de visages communs sous le toit. Dehors, le ministère
du gel enferme les sonneries du réel, malgré les rougeurs du
houx en vitrine, et des visages sombres continuent dans le
« fantasque tableau ».
LYRE D’& XIV
Extrait 1/2
Une lyre loin, que dit-elle ?
Elle fait un bruit de corde de mer,
le chant-courrier des vagues dessous,
harpe d’ondes vers le nom-cercle,
comme une grille libre d’images.
Elle lance la tresse de mots
d’eau et d’air vers
famille portée.
Dicter = composer ;
décrire = copier ;
papier = balbutier,
et enformer, débriser,
après Villon.
Comme pluie-soleil
et hommage.
Bien….
"Je me sens seule", gémit Sophie. "Ah, comme je me sens seule..."
On peut rester des semaines comme ça...
Mais si Sophie s'écoute comme nous le proposons ici, elle transformera cette pensée tristounette en un "J'ai besoin de trouver de la compagnie" créatif et transformateur. A partir de ce constat en effet, elle peut s'interroger sur quel genre de compagnie lui ferait vraiment du bien... p.38
Variation XIII
Il s’appelle un poète ?
Question.
Silhouette nourrit
les vers à soie de Passé.
Et Passé éprouve un besoin hérité
de retourner
la terre versée en l’absence
de Paysan Dominant.
Car absence est ici
présence concentrée et déléguée.
Terre est posée en tournant
sur la Sphère.
Charrue d’époque, racadémique, commande
le discours du Bœuf Peuplé.