L’ancien soldat peut à loisir devenir transparent en émettant un simple souffle sur le bout de ses doigts. Ce phénomène provoque des anecdotes amusantes qu’il ne manque pas d’explorer. Rien ne l’empêche de s’attabler à une auberge et de s’évanouir dans l’espace au moment de l’addition.
Si son corps n’était pas déjà dans un état vaporeux, il pourrait se dire qu’il va mourir d’ennui.
Rigobert sait ce que sont des archives. C’est un endroit sombre ou poussiéreux où un homme âgé passe son temps à compulser, trier, soigner de vieux grimoires auxquels personne ne comprend rien et qu’aucun être ne consultera jamais.
Je vérifiais cet axiome tous les jours : l’ultra-richesse est un système qui se gère tout seul.
La soirée est douce et son état gazeux lui permet toutes les fantaisies. Il aurait pu prendre une chambre dans un hôtel de luxe et s’enfuir, invisible, sans payer son séjour. Ce genre de filouterie l’amuse beaucoup.
Le libéralisme économique utilise jusqu’à l’enveloppe charnelle des hommes pour faire toujours plus d’affaires au profit de quelques magnats.
Je suis le Diable. Nous sommes venus sur Terre, il y a très longtemps. Je dis « nous » parce qu’il y aurait une grave erreur à penser que le Diable est une entité identifiable et unique. Nous – le Diable – sommes les hommes. Je devrais dire « étions les hommes ».
Au début, il y avait une parfaite confusion, chaque homme était le Diable et le Diable était chaque homme. Autrement dit, à moi tout seul, j’étais l’assemblée des Hommes. Ceux-ci n’étaient pas encore atteints par les affres de la civilisation. Chaque être pouvait montrer son caractère singulier sans voile ni pudeur. Chacun exprimait tels qu’il les vivait ses sentiments et ressentiments, ses émotions, ses opinions et ses oppositions. Les relations étaient sans filtres, sans hypocrisie, sans retenue. Inévitablement, cette vie collective sans artifice dégénérait en combats sanglants. On s’écharpait, on s’entretuait pour des querelles futiles ou des différends mesquins. C’était donc insupportable. Je dirais même : diabolique.
Aux abords de l’agglomération lyonnaise, un conducteur de travaux qui surveille un chantier près de l’autoroute a une vision étrange : un grenadier napoléonien galope sur le dos d’une jument à la robe pommelée, le long de la voie de sécurité. Ce qui laisse l’homme pantois, c’est que le soldat tient un téléphone portable entre les mains.
Contrairement à ce que prétendent des esprits malveillants, c’est un moment qui leur est souvent profitable. De ce dialogue, peuvent naître de profondes créations artistiques ou des décisions historiques. Voltaire, Balzac, Rodin, Picasso n’auraient jamais été illustres s’ils n’avaient pas exploré leur part d’ombre. On dit que c’est dans un rêve qu’Einstein a parachevé la théorie de la relativité. Eh oui ! Ma contribution est passée inaperçue, mais je suis toujours là !
La civilisation progressait et avec elle, le droit, la justice et l’esprit de compromis. Certes, il reste quelques contrées lointaines, où la manie de la paix n’a pas encore frappé. Les combattants peuvent toujours y déchaîner leur méchanceté et leur bêtise, en s’étripant sans réticence, mais ce sont les derniers endroits ouvertement démoniaques.