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Critiques de Raymond Escholier (6)
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Delacroix et les femmes

Cette biographie commence curieusement par le récit d’une évasion, celle d’Antoine Chamans, Comte de Lavalette, aide de camp de Napoléon 1er après la bataille d’Arcole. Arrêté pour conspiration contre l’état, et conduit à la Conciergerie en attendant une éventuelle grâce qui lui ferait échapper à sa mise à mort en place de Grève. Emilie de Beauharnais, nièce par alliance de l’impératrice Joséphine, devenue la femme du Comte de Lavalette à l’instigation de Napoléon Bonaparte en remerciement de services rendus, organise, aidée de leur fille unique Joséphine âgée alors de 13 ans, son évasion ; c’est rocambolesque et je demandais en quoi tout ceci pouvait bien concerner notre Eugène Delacroix.



En fait tout ceci pour nous amener au cousinage, et plus car affinités, qui nous sont révélés entre ladite fille unique Joséphine, qui deviendra plus tard Madame la Baronne de Forget, et la Consuelo de notre Eugène.



L’auteur, Escholier, journaliste, romancier et auteur très prolixe qui, par ailleurs a beaucoup écrit sur Victor Hugo, y compris un « Victor Hugo et les femmes » itou, a épousé en seconde noce Claudie Léouzon Le Duc, descendante du peintre Léon Riesener et arrière-petite nièce de Delacroix ; il a ses sources et ses passions et vice-et-versa. En 1929, peut-on lire sur Wikipédia, apprenant que le dernier atelier du peintre Delacroix situé rue de Furstenberg à Paris est menacé de démolition, Raymond Escholier crée, avec les peintres Maurice Denis et Paul Signac, ainsi que l'historien d'art André Joubin, la Société des Amis d'Eugène Delacroix, collecte des fonds, intervient auprès de la Ville de Paris qui sauve l'atelier et le transforme en musée Delacroix. (le site, intéressant : http://www.musee-delacroix.fr/fr/)



Escholier nous livre ici une étude fouillée et érudite, tant au plan artistique et littéraire, qu’historique. Intéressant, et sans aucun doute une mine pour qui s’intéresse de près à l’homme Delacroix, ses amours et ses amitiés. Pour ma part, cet ouvrage fut une grande surprise, je m’étais faite une image d’un Delacroix austère, essentiellement préoccupé de son art et j’ai découvert un personnage d’une grande richesse humaine, et d’une grande dignité.

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Contes de Noël

Si les Britanniques ont la chance d'avoir Charles Dickens, chez nous, les contes de Noël sont plutôt de nos jours réservés aux enfants.

Avec ce petit recueil (186 pages), nous plongeons, nous, adultes assoiffés de la magie de Noël dans une série de courtes histoires écrites par les plus fameux auteurs du XXème siècle : les académiciens Jérôme et Jean Tharaud, Alphonse Daudet, Léon Tolstoî et François Mauriac, pour ne citer que les plus connus.

Des contes graves et emprunts de la sainteté de cette nuit très spéciale qui permet à nos, hommes et femmes du XXIème siècle de nous plonger dans une Nativité à notre hauteur.
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Un Amant De Genie, Victor Hugo

Une bonne excellente d'entrée vers la poésie amoureuse de Victor Hugo et ses sources d'inspiration.

On peut dire que Victor Hugo a consacré toute sa vie à l'écriture, aux femmes, à l'amour (dont l'amour charnel), sans oublier la politique. Cette biographie sentimentale nous révèle l'incroyable vie amoureuse et sexuelle de Victor Hugo, une force de la nature, d'un appétit insatiable pour la chair fraîche, jusqu'à son dernier souffle.

L'idéalisation de la Femme chez Victor Hugo n'a jamais été désincarnée. La Femme lui inspirait ses poèmes avant la rencontre, souvent pour séduire, à travers le fantasme, après la rencontre, à travers le souvenir, la projection vers de nouveaux plaisirs entrevus, pour continuer à séduire sa conquête et entretenir la flamme, enfin, troisième motif de séduction ,pour se faire pardonner. Combien de poèmes écrits à Juliette Drouet pour calmer sa jalousie, relativiser ses infidélités permanentes, lui rappeler le lien indéfectible qui les unit.



Victor a menti, manipulé, trompé toute sa vie. Sa célébrité lui apportait sur un plateau toutes sortes de femmes (actrices, artistes, bourgeoises, noblesse diverse) attirées comme un aimant ; ses initiatives complétaient le tableau avec les servantes, lingères, soubrettes qui défilaient au logis.



Très richement illustré des poèmes de Victor Hugo, le récit mérite la lecture mais aurait gagné en clarté à respecter un ordre strictement chronologique. Des projections dans le temps, des retours en arrière, des noms de femmes qui apparaissent et réapparaissent au point que parfois on ne sait plus s'il s'agit d'une nouvelle maîtresse ou d'une ancienne déjà présentée.



Parmi quelques femmes qui ont compté on trouve Adèle Foucher (1803-1868) l'épouse, Juliette Drouet (1806-1883), ancienne courtisane et maîtresse d'une vie, Marie Dorval (1798-1849) actrice, Léonie d'Aunet (1820-1879), écrivain, Louise Colet (1810-1876) future égérie de Flaubert, Alice Ozy (1820-1893), actrice et courtisane, Judith Gautier (1845-1917) danseuse étoile et ex-épouse de Catulle Mendès ; Esther Guimont (1807-1879) courtisane qui aura aussi pour amant les écrivains Musset, Alexandre Dumas fils, Emile de Girardin, Roqueplan, Sainte-Beuve, Guizot, Flaubert ; Marie Mercier (1850-1921), ouvrière et Communarde ; Blanche Lanvin, servante et dernier amour de Victor Hugo.
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Contes de Noël

c'est mon livre de contes préféré. Je ne me lasse pas de le lire et de le relire. Un pur trésor évangélique !
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Cantegril

Célèbre figure littéraire de l'entre deux-guerres, Raymond Escholier représenta toute sa vie un certain académisme de la littérature populaire, à une époque où celle-ci, influencée par de nombreux courants de littérature américaine, s'aventurait parfois dans des polars sordides ou des récits coloniaux teintés de brutalité et d'érotisme. Escholier se tenait rigoureusement à l'opposé de ces genres, offrant des thématiques souvent rurales ou au contraire culturelles pour un public très attaché aux valeurs françaises.

Haut fonctionnaire attaché à l'administration des Musées de la Ville de Paris, Raymond Escholier partagea longtemps sa vie entre la capitale et l'Ariège, d'où était originaire son épouse Marie-Louise. Le couple avait aussi en commun un certain goût pour la littérature qu'ils concrétisèrent ensemble dès 1919. Fort occupé par son travail à Paris, Raymond Escholier rédigeait une sorte de scénario, et le confiait à sa femme, qui en tirait pendant son absence un roman de 200 ou 300 pages. Ces livres parurent sous le seul nom de Raymond Escholier, à la demande de son épouse qui refusait de voir son nom imprimé pour des raisons personnelles. Néanmoins, Raymond Escholier n'a jamais publiquement caché que c'était principalement sa femme qui écrivait ses livres.

Le deuxième fruit de cette collaboration littéraire, au départ purement ludique et sans doute destinée à supporter les semaines et les mois de séparation entre eux, fut donc ce roman, « Cantegril » (1921), une chronique du village ariégeois de Saint-Gauderic, des années 1870 aux années 1920, à travers la vie joyeuse et festive de Philou Cantegril, le tenancier de "L'Auberge des Trois Pigeons", l'endroit le plus convivial de ce petit village de Saint-Gauderic (vraisemblablement inspiré de l'authentique village de Saint-Gaudéric, qui se trouve à peine à quelques kilomètres de Mirepoix, où vivait Marie-Louise Escholier).

« Cantegril » n'est pas à proprement parler un roman, chacun de ses 14 chapitres est une histoire à part, mettant en scène Philou Cantegril avec quelques autres personnalités récurrentes ou non de la commune. La camaraderie toute méridionale est ici exaltée dans une vie rurale conviviale, hédoniste et volontiers libertine, célébrant le culte du vin, de la biture et des relations adultères. Héros de la plupart de ces histoires, Philou Cantegril s'avère une sorte de Till L'Espiègle à l'aïoli, dont les farces pendables, les petites vengeances mesquines, les cocufiages d'amis et de clients, ou les manoeuvres de séduction pour se faire coucher sur le testament d'une vieille maîtresse sont autant de marques de malice, d'habileté, d'infantilisme sympathique et de décomplexion totale.

Ses aventures sont néanmoins d'un intérêt et d'une drôlerie inégales, l'inspiration n'étant pas toujours de la partie, et la brièveté de certains récits étant souvent frustrante compte tenu du potentiel de l'histoire.

On retiendra surtout les deux meilleurs récits : d'abord le plus long, « Le Dernier Voyage », l'histoire de Capoulade, le conducteur de la diligence qui fait plusieurs fois par jour le trajet de Saint-Gauderic à La Bastide. Marié avec une adorable jeune femme, vivant à Saint-Gauderic, il dort avec elle régulièrement, mais quelquefois, quand les trajets en diligence sont semés d'embûches, victimes d'arrêts arbitraires ou ralentis par la neige, Capoulade prend du retard et reste dormir à La Bastide, chez sa belle soeur, veuve et vivant seule. Comme on peut le prévoir, une romance adultère s'est nouée avec cette jeune femme, qui s'est bien gardée d'en parler à sa sœur. Cela fonctionne ainsi durant de nombreuses années.

Le brave Capoulade exerce un métier bien monotone, mais avoir un foyer à chaque terminus est un avantage en nature dont peu de gens peuvent s'enorgueillir. Capoulade n'en arrive pas moins à une situation extrêmement compliquée, sans le sens où il a un enfant à Saint-Gauderic avec sa femme légitime, et trois autres à La Bastide avec sa belle-sœur. La trentaine de kilomètres qui sépare les deux villes empêchent que les enfants soient amenés à se rencontrer.

Hélas, pour Capoulade, la double vie de ce mari fêlon se trouve soudain menacée par l'arrivée tardive de la révolution industrielle dans les terres reculées de l'Ariège. En effet, une voie de chemin de fer va bientôt traverser le canton et relier désormais La Bastide à Saint-Gauderic. Le temps des diligences est fini, le chemin de fer va le remplacer avantageusement, et il offre même volontiers une reconversion à Capoulade, mais comme chef de gare ! Ce qui veut dire qu'il devra se fixer définitivement dans l'une ou l'autre ville, et abandonner l'un de ses foyers, avec tout le scandale qui s'ensuivra.

Capoulade s'ouvre longuement à Cantegril, homme plein de ressources, pour l'aider à trouver une solution. Mais si Cantegril sait faire bien des choses, il ne sait pas encore arrêter le chemin de fer. Au final, après avoir passé quelques jours à partager le siège de la diligence avec Capoulade, il lui dit qu'il n'y a qu'une seule décision à prendre.

Sa femme légitime, Hélena, de par son statut, pourra bénéficier elle aussi d'un emploi au chemin de fer. La fille commune qu'ils ont eu ensemble est presque une adolescente, et d'ici un ou deux ans, elle pourra se marier. En revanche, à La Bastide, il y a la belle-sœur, Lise, sans profession et à charge de trois enfants en bas-âge. Pour Cantegril, la question, ce n'est pas laquelle des deux femmes Capoulade aime le plus, mais laquelle des deux a véritablement besoin de lui, et c'est bien évidemment Lise. Il faut donc régler le problème le plus vite possible, sans attendre que le train soit là, et tout apprendre le soir-même à Héléna.

Capoulade en a un gros chagrin, mais il sent bien, effectivement, qu'il n'y a pas d'autre solution. Pour le motiver, en bon copain qu'il sait être avec tout le monde, Cantegril offre à Capoulade un gueuleton énorme et bien arrosé dans son auberge, après quoi, repu et encouragé par le vin, il l'accompagne jusqu'à chez lui afin qu'il fasse son devoir en annonçant sa rupture avec sa femme légitime.

Autre récit, bien plus réjouissant, « Le Miracle du Vin » narre la "première mort" d'un bourgeois de Saint-Gauderic, Fortuné Cazalens, décédé subitement d'une attaque. Philou Cantegril ne le connaissait guère, Cazalens était célèbre pour être le seul habitant du village qui ne buvait jamais d'alcool. Pour Cantegril, il ne faut pas chercher ailleurs la raison de sa mort précoce. Néanmoins, dans les campagnes, la coutume veut que les proches veillent les morts pendant la nuit, le temps que leur inhumation se prépare. Hélas, l'un des veilleurs prévu est tombé gravement malade au dernier moment. L'autre, Boucabelle, client régulier de Cantegril, demande à l'aubergiste comme un service de remplacer le malade en urgence et de veiller le mort en sa compagnie.

Ce n'est pas trop là le genre de choses qu'aime faire Cantegril, mais on l'a vu, c'est un homme qui a profondément le sens de l'amitié. Boucabelle est un client exemplaire et un ami d'enfance. Cantegril accepte de veiller le mort en sa compagnie, mais attention ! Pas question de passer une nuit entière dans la maison d'un homme sobre sans emporter de copieuses provisions. Cantegril se charge donc d'une dizaine de bouteilles de vin pour se réchauffer. Ce n'est pas si farfelu : l'hiver règne alors à Saint-Gauderic, et rester immobile dans la maison d'un mort, même en s'aidant de la cheminée, cela peut être frigorifiant.

À peine installés, d'ailleurs, les deux hommes ressentent les premiers frissons, et après avoir jeté un timide regard sur le cadavre étendu sur le lit, ils commencent à sortir tire-bouchons et bouteilles, et les boivent à même le goulot. Il ne leur faut même pas une heure pour être complètement ronds. Cantegril pose alors un regard puissamment éthylique sur le cadavre roide de cet homme à la mystérieuse sobriété, et pris d'une inspiration subite, il se dit que le défunt ne doit pas se présenter au Paradis sans avoir jamais bu une goutte d'alcool, il risquerait d'y être refusé ! Aussi saisissant sa bouteille, Cantegril se lève, titube jusqu'au cadavre, lui ouvre la bouche, et verse au fond de la gorge une généreuse gorgée de sa bouteille. Puis, satisfait de son devoir de bon chrétien, il retourne se rasseoir.

C'est alors que le miracle du vin s'accomplit : le cadavre de Fortuné Cazalens écarquille brusquement les yeux, et se redresse d'un coup. Le mort porte les deux mains à sa gorge et pousse un hurlement d'épouvante ! Les deux veilleurs se mettent eux aussi à hurler, et persuadés d'avoir affaire à un spectre, s'enfuient en courant, sortent de la maison et se mettent à hurler dans la nuit, réveillant tout le village. On est d'abord outré de voir Cantegril et Boucabelle dans un tel état, et l'on pense à une hallucination d'ivrognes, mais Fortuné Cazalens apparaît alors, le regard émerveillé, sur le pas de sa porte.

L'homme, en fait n'était pas mort, mais plongé dans une sorte de catatonie. La puissance du vin ariégeois l'a ramené d'entre les limbes. Fortuné est le premier à rassurer ses deux veilleurs, et à les remercier de l'avoir ramené parmi les siens.

Ainsi, pendant les années qui suivirent et jusqu'à son inéluctable mort naturelle, Fortuné Cazalens, cet homme qui n'avait jamais bu une goutte d'alcool de toute sa vie, ne passa jamais devant "L'Auberge des Trois Pigeons" sans s'y arrêter pour vider deux ou trois godets, et saluer avec chaleur l'homme à qui il devait la vie...

C'est indéniablement la plus réjouissante histoire de ce recueil. il est néanmoins dommage que les autres ne soient pas toutes de cette qualité. Si « Cantegril » décrocha à la surprise générale le Prix Vie Heureuse (première mouture du prix Femina), et que le public lui fit un excellent accueil commercial, ce portrait d'un petit village jovial et bon enfant est surtout devenu par la suite un modèle qui eut beaucoup de continuateurs jusqu'à la fin du XXème siècle. Gabriel Chevallier, avec son « Clochemerle » (1934) et sa suite « Clochemerle-Babylone » (1954) donna à ce genre de chroniques rurales gauloises ses véritables lettres de noblesse. Bien que ces deux livres demeurent indépassables, il y aurait bien d'autres noms d'auteurs à citer, et encore plus de titres d'ouvrages. Le cinéma à son tour s'empara du genre et les adaptations cinématographiques des « Don Camillo » de Giovanni Guareschi témoignent encore de cet attendrissement méditerranéen pour les querelles de clochers, au sein de petit villages voués à disparaître, avalés par le monde moderne. Paradoxalement, l'une des dernières incarnations de ces chroniques rurales, débarrassée cependant de toute gauloiserie, fut la bande dessinée « Astérix le Gaulois » qui, aujourd'hui encore, transmet au sein de la société contemporaine le souvenir désormais révolu du fantasme d'une vie rurale idéale.

Si « Cantegril » fut l'un des pionniers - si ce n'est LE pionnier - de ces chroniques rurales joyeuses et farceuses, le roman souffre cependant du manque de tout ce que ses continuateurs y ont apporté. Comparé à son cadet « Clochemerle », « Cantegril » fait pâle figure. Ne s'attendant guère à un tel succès, ses auteurs n'ambitionnaient que de raconter quelques histoires drôles et attachantes. Il en reste donc un côté "premier jet" qui n'avait rien de dérangeant à sa sortie, mais dont la truculence et l'audace étaient encore trop retenues par rapport aux chefs d'oeuvre qui ont suivi.

Qui plus est, « Cantegril » avait grand souci de réalisme, aussi est-ce avant tout un livre anecdotique, qui ne s'encombre pas de précautions littéraires, ni d'intrigues trop alambiquées. Par le plus grand des hasards, ce livre a touché un point sensible auprès des lecteurs des années 20, en évoquant la nostalgie de la vie simple et insouciante du siècle précédent. Il y avait encore en 1921 des gens nostalgiques du Second Empire, de l'Ancien Régime, de la Commune ou des débuts de la IIIème République : difficile de fédérer une nostalgie patrimoniale autour d'un siècle que tant d'idéologies politiques s'étaient déchiré avec hargne. Le souvenir figé d'une ruralité immanente et fantasmée mit tout le monde d'accord, à gauche comme à droite, au sein de la République ou en dehors.

Mais paradoxalement, si « Cantegril » nous présente des anecdotes soucieuses de réalisme, Raymond et Marie-Louise Escholier portent sur leurs personnages un regard bien trop bienveillant, empreint de catholicisme humaniste. Il n'y a pas de "mauvaises personnes" à Saint-Gauderic. On y est volontiers noceur et mécréant, mais sans méchanceté aucune et sans renier les valeurs morales, qui sont bien évidemment jugées bonnes pour tous, même si on s'y autorise ponctuellement des écarts pour soi-même. C'est juste qu'on préfère "s'arranger" avec la morale, on l'adapte à son cas, on la marchande, on promet de faire brûler deux ou trois cierges en échange d'un mauvais coup. Quant aux trahisons, aux escroqueries, aux nombreux adultères, ce ne sont tout au plus que des enfantillages. Même le bigame Capoulade n'est présenté que comme un petit garçon qui a abusé de la confiture.

Marie-Louise Escholier s'attarde d'ailleurs longuement sur la détresse morale de Capoulade, mais des larmes de sa femme et de l'humiliation qu'elle subira, de la haine qui l'opposera nécessairement à sa sœur, aucun mot ne sera dit. « Cantegril » est une cuite joyeuse, mais il y manque regrettablement la gueule de bois du lendemain matin...

Il faut peut-être y voir seulement le terrible besoin d'insouciance et de légèreté au sortir du drame de la Première Guerre Mondiale, qui allait définir ce que l'on appelle aujourd'hui les Années Folles. Le succès de « Cantegril » ne faiblit d'ailleurs pas jusqu'au début de la Seconde Guerre Mondiale. Un opéra-bouffe éponyme fut même composé en 1931 par Jean Roger-Ducasse. Hélas, aucun document sonore ou visuel ne nous est parvenu, et c'est bien dommage car ce ne devait pas être banal.

Quant aux époux Escholier, ils connurent ensemble ou séparément (Raymond Escholier écrivit aussi quelques romans en solitaire sur des sujets plus exotiques) une carrière brillante et saluée par le public jusqu'à la fin des années 30. À la Libération, Escholier ayant atteint l'âge de la retraite, le couple s'installa définitivement à Mirepoix dans l'Ariège et n'écrivit plus que des livres régionalistes ou des biographies de peintres et d'écrivains.

Leur oeuvre romanesque fut donc brève, mais demeure très instructive sur la moralité et l'imaginaire des Années Folles, même s'il faut le préciser, Raymond Escholier s'inscrivait dans la continuité d'Anatole France, dans une démarche littéraire provincialiste qui ne s'adressait guère aux garçonnes ou à la jeunesse en général.
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Le sel de la terre

Lecture poignante même si je ne comprends pas tout...

Aucunes phrases, mots n'ont été changés et il a été écrit sans les tranchées voilà donc un témoignage pur, dur simple des sentiments de guerre.



Pas un grand style littéraire je vous l'accorde mais un livre à lire malgré tout pour ne pas oublier tous ceux qui ont servi de chair à canon.
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