Citations de Renaud Rodier (66)
Ceux qui parlent « d’amour impossible » n’ont rien compris. C’est l’impossible en nous qui est amoureux.
L'art est une extension du champ de l'âme.
Donne-moi juste une branche où me poser, le mirage d'un nid tiède, puis une balance et une plume, que mon âme passe en jugement.
Les chagrins sans nom ont l'intinérance des apatrides.
N’aie pas peur du temps qui passe ; l’aiguille des horloges est plus douce que la guillotine, tu verras.
Repousse les frontières avant qu'elles ne me refoulent. Mon passeport a expiré, et je ne saurais quoi leur dire.
J'aurais tant aimé te rendre ce que je te devais mais n'ai jamais su tenir des registres.
L’amour est une chute qu’on aimerait sans fin dans un univers en expansion.
Tu dis que l’hiver te suit comme un loup affamé. Moi qu’il voit en toi une promesse de printemps dans la lumière froide du matin. Ralentis ton pas, et tu verras que le monstre n’est qu’un chien qui suit son maître.
Laisse-moi me perdre dans le labyrinthe de mes plaies; elles se refermeront avant que j’en trouve la sortie, m’absorberont, et tout redeviendra calme.
J’ai appris il y a bien longtemps à me méfier des choses heureuses. Si la tristesse s’élime à force d’être portée, le bonheur, lui, s’effile avec le temps, et plante ses crocs dans notre gorge dès qu’on ne l’attend plus.
N’aie pas peur du temps qui passe ; l’aiguille des horloges est plus douce que la guillotine, tu verras.
Ne regrette pas ce que je n’ai pas su te donner. On ne se donne jamais vraiment, on se laisse emprunter, une date de retour imprimée au coin des lèvres, des pénalités de retard tatouées au bout des doigts.
Je m’octroie un sursis en découpant les secondes en lamelles si fines qu’elles en deviennent transparentes, essaie de tuer le temps, littéralement. Le sablier de notre histoire commune n’a que faire de mes atermoiements, et continue à déverser ses grains patiemment jusqu’à m’enterrer vivant.
Tu me jettes violemment sur un lit encore froid, me dépouilles de mes vêtements,
me dépouillerais même de ma peau, m’écorcherais, si tu en avais encore la force.
![Renaud Rodier](/users/avt_fd_556948.jpg)
Au petit matin, tu abandonnes ton poste de garde et rejoins ton bureau en titubant, indifférent aux remous d’une capitale qui s’éveille. L’aube était pourtant notre moment à nous, ne te souviens-tu pas? Quand je donnais un baiser sur la joue aux éboueurs pour les remercier de laver la ville de ses faiblesses ? Quand on sentait le souffle chaud du premier métro au travers des grilles d’aération ? Quand nous nous moquions des lève-tôt à qui le jour appartient alors que Paris est tellement plus belle la nuit. L’aube, où tout commence et tout finit, était à nous. Et l’amour que nous faisions sur les draps encore frais d’une nuit expirante ? Nos haleines âcres d’un alcool bon marché qui s’entremêlaient? Tes mains un peu trop lourdes sur mes seins? Ma bouche un peu trop brusque sur ta verge? Cet amour pressé par la fatigue, débarrassé des sentiments, qui ignore les détours. J’aimerais que tu te souviennes de mon corps couvert de sueur, de ma bouche qui salive, du blanc de mes yeux à moitié clos, de toutes ces choses que les photos des morts négligent, escamotent, telle une dernière onction qui effacerait ces péchés qui ont pourtant donné du sel à ma vie. Le paradis m’indiffère.
Chaque minute qui passe a le poids d’un univers qui s’écroule.
Je ferme les yeux et m’abandonne à la nuit. Le plomb de mes obligations quotidiennes, de mes paraître, coule dans mes veines comme une gondole égarée dans la brume d’un canal, puis transpire et lévite quelques pieds au-dessus de moi, ciel bas qui finira bien par se rompre, ne me laissant que quelques heures de répit, de sursis, entre deux orages.
Je me refuse à ce que notre histoire se réduise à quelques photos écornées, délavées, qui ne montrent que ce que l’on a su enfouir sous nos sourires, ces masques mal ajustés ; qu’on résume tout ce que j’étais à une épitaphe ambiguë sur une stèle de marbre qui luit parfois sous la pluie ; qu’on m’enferme à tout jamais dans le rôle d’un ange déchu qui a perdu ses ailes.
Tu sais, toi, que si mes plumes étaient trop fines pour porter le 7 poids de mes regrets, j’étais faite pour voler.
Seuls les soldats savent que le bruit de la mitraille vaut mieux que le silence de l’aube.