Serge Le Strat

La philosophie a besoin de la physique lorsqu’elle cherche à comprendre la structure de la matière ou à définir la nature de l’espace temps.
La physique, en retour, a besoin de la philosophie dès qu’elle réfléchit sur ses principes méthodologiques ou sur la validité de ses lois.
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Rudolph Carnap (1891-1970) est un logicien et philosophie allemand, il fut l'un des plus éminents représentants du cercle de Vienne.
Adepte du néo-positivisme ou positivisme logique. Il s'est proposé d'unifier le savoir scientifique par la construction d'un langage rigoureux, fondé sur la logique formelle, afin d'éliminer les concepts et les problèmes vides de sens.
Pour lui, la science de la logique en commençant par la syntaxe doit servir à former des langages idéaux, c'est-à-dire formels et exacts.
Il faut apporter au langage de la physique des précisions et des clarifications.
“Malheureusement, les physiciens présentent rarement leurs théories sous une forme qui convienne aux logiciens.
Ils ne disent pas : “Voici mon langage, en voici les termes primitifs, en voici les règles de formation, en voici les axiomes logiques.”
“Comme les autres sciences, la physique n'a cessé d'améliorer l'exactitude et l'efficacité d'ensemble de son langage. Elle continuera certainement à le faire. Pour l'instant, cependant, le langage physique, dans son progrès vers la précision et la rigueur, n'arrive pas encore à refléter avec fidélité le développement de la mécanique quantique”
“Faut-il purifier le langage de la physique de ses imprécisions, ambiguïtés et postulats implicites ? Cette question s’est posée de manière particulièrement aiguë à la suite des découvertes de la physique quantique, qui mirent en évidence les insuffisances du langage ordinaire.
Les concepts habituels, de même que notre logique bivalente (qui ne reconnaît que deux valeurs de vérité : le vrai et le faux) semblent en effet ne pas pouvoir s’appliquer correctement aux phénomènes subatomiques.
…Rudolf Carnap propose aux physiciens de réformer leur langage en ayant recours aux logiques plurivalentes (reconnaissant au moins trois valeurs de vérité : le vrai, le faux et l’indéterminé, par exemple) ainsi qu’à la méthode axiomatique.
Celle-ci impose en effet qu’on commence par énoncer les termes premiers à l’aide desquels on définira tous les autres (termes primitifs), les propositions premières à l’aide desquelles on démontrera toutes les autres (axiomes) ainsi que les règles d’inférence qui permettent de déduire les propositions les unes des autres.

La vanité de toute recherche des causes
Quelle doit être l’ambition de la science ? Expliquer le pourquoi des phénomènes ou en décrire simplement le comment ? Découvrir la structure intime des choses ou rechercher plus humblement les lois qui permettent aux hommes de les appréhender avec plus d’efficacité ?
De ces programmes antithétiques sont nées deux démarches irréductibles, mais qui ont chacune leurs adeptes : le réalisme et le positivisme.
Disns en quelques mots que le réalisme postule une réalité connaissable et absolue, indépendante de nos observations comme de nos instruments de mesure, alors que le positivisme abandonne (à la métaphysique) la recherche de la nature intime des choses pour ne se préoccuper que des relations invariables qu’entretiennent les uns avec les autre des événements observables.
Auguste Comte, fondateur du positivisme, n’a cessé de dénoncer la vanité des spéculations des hommes sur la nature, l’origine ou la destination des objets physiques. Nous devons nous garder de douer d’une existence objective les constructions subjectives auxquelles nous avons recours pour expliquer ce que nous ne pouvons observer. Autrement dit, le savant doit considérer les questions auxquelles il ne peut apporter de réponse grâce à l’expérience comme vide de sens. Observer, et non imaginer, telle pourrait être la devise de celui qui a renoncé à connaître jamais l’exacte réalité.

Logiques plurivalentes
Si l’on applique maintenant le principe de non contradiction, les entités élémentaires de la matière ne peuvent être à la fois des ondes et des corpuscules.
Cependant la physique quantique nous oblige à admettre qu’elles apparaissent, selon le dispositif expérimental, tantôt sous un aspect ondulatoire, tantôt sous un aspect corpusculaire !
C’est pour toutes ces raisons que Rudolf Carnap propose ici aux physiciens de réformer leur langage en ayant recours aux logiques plurivalentes (reconnaissant au moins trois valeurs de vérité : le vrai, le faux et l’indéterminé, par exemple) ainsi qu’à la méthode axiomatique.

Comme les autres sciences, la physique n'a cessé d'améliorer l'exactitude et l'efficacité d'ensemble de son langage. Elle continuera certainement à le faire. Pour l'instant, cependant, le langage physique, dans son progrès vers la précision et la rigueur, n'arrive pas encore à refléter avec fidélité le développement de la mécanique quantique. (page 87)

On n’en finirait pas d’établir la liste des présupposés sur lesquels repose une affirmation prétendument « tirée » de la simple observation de « faits ». (page 7)