L'absence - Serge Reggiani

C'est moi, c'est l'Italien
Est-ce qu'il y a quelqu'un
Est-ce qu'il y a quelqu'une
D'ici j'entends le chien
Et si tu n'es pas morte
Ouvre-moi sans rancune
Je rentre un peu tard je sais
18 ans de retard c'est vrai
Mais j'ai trouvé mes allumettes
Dans une rue du Massachussetts
Il est fatiguant le voyage
Pour un enfant de mon âge
Ouvre-moi, ouvre-moi la porte
Io non ne posso proprio più
Se ci sei, aprimi la porta
Non sai come è stato laggiù
Je reviens au logis
J'ai fais tous les métiers
Voleur, équilibriste
Maréchal des logis
Comédien, braconnier
Empereur et pianiste
J'ai connu des femmes, oui mais
Je joue bien mal aux dames, tu sais
Du temps que j'étais chercheur d'or
Elles m'ont tout pris, j'en pleure encore
Là-dessus le temps est passé
Quand j'avais le dos tourné
Ouvre-moi, ouvre-moi la porte
Io non ne posso proprio più
Se ci sei, aprimi la porta
Diro come è stato laggiù
C'est moi, c'est l'Italien
Je reviens de si loin
La route était mauvaise
Et tant d'années après
Tant de chagrins après
Je rêve d'une chaise
Ouvre, tu es là, je sais
Je suis tellement las, tu sais
Il ne me reste qu'une chance
C'est que tu n'aies pas eu ta chance
Mais ce n'est plus le même chien
Et la lumière s'éteint
Ouvrez-moi, ouvrez une porte
Io non ne posso proprio più
Se ci siete, aprite una porta
Diro come è stato laggiù

L'absence
C'est un volet qui bat
C'est une déchirure légère
Sur le drap où naguère
Tu as posé ton bras
Cependant qu'en bas
La rue parle toute seule
Quelqu'un vend des mandarines
Une dame bleu-marine
Promène sa filleule
L'absence, la voilà
L'absence
D'un enfant, d'un amour
L'absence est la même
Quand on a dit je t'aime
Un jour
Le silence est le même
C'est une nuit qui tombe
C'est une poésie aussi
Où passaient les colombes
Un soir de jalousie
Un livre est ouvert
Tu as touché cette page
Tu avais fêlé ce verre
Au retour d'un grand voyage
Il reste les bagages
L'absence, la voilà
L'absence
D'un enfant, d'un amour
L'absence est la même
Quand on a dit je t'aime
Un jour
Le silence est le même
C'est un volet qui bat
C'est sur un agenda, la croix
D'un ancien rendez-vous
Où l'on se disait vous
Les vases sont vides
Où l'on mettait les bouquets
Et le miroir prend des rides
Où le passé fait le guet
J'entends le bruit d'un pas
L'absence, la voilà
L'absence
D'un enfant, d'un amour
L'absence est la même
Quand on a dit je t'aime
Un jour
Le silence est le même
https://www.youtube.com/watch?v=XOeYWuZ1OmA
Paroliers : Jean Loup Dabadie / Jacques Datin

T’as pas de quoi prendre un avion, ni même un train
Tu pourrais pas lui offrir un aller Melun
Mais tu l’emmènes puisque tu l’aimes
Sur des océans dont les marins n’ont jamais jamais vu la fin
Tu as le ciel que tes carreaux t’ont dessiné
Et le soleil sur une toile de ciné
Mais tu t’en fiches, mais tu es riche
Tu l’es puisque vous vous aimez
Venise n’est pas en Italie
Venise, c’est chez n’importe qui
Fais-lui l’amour dans un grenier
Et foutez-vous des gondoliers
Venise n’est pas là où tu crois
Venise aujourd’hui c’est chez toi
C’est où tu vas, c’est où tu veux
C’est l’endroit où tu es heureux
Vous n’êtes plus dans cette chambre un peu banale
Ce soir vous avez rendez-vous sur le canal
Feux d’artifices, la barque glisse
Vous allez tout voir, tout découvrir
Y compris le pont des Soupirs
Ca durera un an ou une éternité
Le temps qu’un Dieu vienne vous dire « assez chanté »
Quelle importance, c’est les vacances
Tout ça parce que vous vous aimez
Venise n’est pas en Italie
Venise, c’est chez n’importe qui
Fais-lui l’amour dans un grenier
Et foutez-vous des gondoliers
Venise n’est pas là où tu crois
Venise aujourd’hui c’est chez toi
C’est où tu vas, c’est où tu veux
C’est l’endroit où tu es heureux
Venise n’est pas en Italie
Venise, c’est chez n’importe qui
C’est n’importe où, c’est important
Mais ce n’est pas n’importe quand
Venise c’est quand tu vois du ciel
Couler sous des ponts mirabelle
C’est l’envers des matins pluvieux
C’est l’endroit où tu es heureux ... !

Monsieur Baudelaire
Il y a dans cette France
Quelque chose de rouillé
Comme des larmes d'enfance
Où jouent des écoliers
Et nous vivons ensemble
Uniformes déguisés
Nos sentiments ressemblent
À des nuages usés
S'il vous plaît, Monsieur Baudelaire
Encore un verre d'opium
Pour la route, le dernier
S'il vous plaît, Monsieur Baudelaire
Une page de delirium
Sous les yeux des douaniers
Il y a dans cette France
Trop d'idées poétiques
Trop de roseaux qui penchent
Trop de mots sans musique
C'est pas ma voix qui tremble
C'est moi qui suis lassé
De ces hommes qui me semblent
Intouchables et glacés
S'il vous plaît, Monsieur Baudelaire
Un peu de Fleurs du mal
Quelque chose à fumer
S'il vous plaît, Monsieur Baudelaire
Ça peut pas faire de mal
C'est du rêve imprimé
Il y a dans les cerveaux
Des cellules en vacances
C'est à croire que les veaux
Ont pris deux tours d'avance
Moi qui reste sur place
Je me plais à penser
Que quelque chose se passe
Avant qu'on soit passé
S'il vous plaît, Monsieur Baudelaire
Une petite poésie
Pour deux mots, pour la frime
S'il vous plaît, Monsieur Baudelaire
Un peu de fantaisie
Entre nous, pour la rime
S'il vous plaît, s'il vous plaît, Monsieur Baudelaire...
Il est des êtres si proches qu'on n'imagine pas leur écrire, comme si les lettres étaient réservées aux absents. On ne songe pas à leur dire combien on les admire ou combien on les aime. Un jour, il est trop tard...

combien de temps...
Combien de temps encore
Des années, des jours, des heures combien?
Quand j'y pense mon cœur bat si fort...
Mon pays c'est la vie.
Combien de temps...
Combien ?
Je l'aime tant, le temps qui reste...
Je veux rire, courir, parler, pleurer,
Et voir, et croire
Et boire, danser, Crier, manger, nager, bondir, désobéir
J'ai pas fini, j'ai pas fini
Voler, chanter, partir, repartir
Souffrir, aimer
Je l'aime tant le temps qui reste
Je ne sais plus où je suis né, ni quand
Je sais qu'il n'y a pas longtemps...
Et que mon pays c'est la vie
Je sais aussi que mon père disait:
Le temps c'est comme ton pain...
Gardes en pour demain...
J'ai encore du pain, J'ai encore du temps, mais combien?
Je veux jouer encore...
Je veux rire des montagnes de rires,
Je veux pleurer des torrents de larmes,
Je veux boire des bateaux entiers de vin De Bordeaux et d'Italie Et danser, crier, voler, nager dans tous les océans
J'ai pas fini, j'ai pas fini
Je veux chanter
Je veux parler jusqu'à la fin de ma voix...
Je l'aime tant le temps qui reste...
Combien de temps... Combien de temps encore?
Des années, des jours, des heures, combien?
Je veux des histoires, des voyages...
J'ai tant de gens à voir, tant d'images..
Des enfants, des femmes, des grands hommes,
Des petits hommes, des marrants, des tristes,
Des très intelligents et des cons,
C'est drôle, les cons, ça repose,
C'est comme le feuillage au milieu des roses...
Combien de temps... Combien de temps encore?
Des années, des jours, des heures, combien?
Je m'en fous mon amour...
Quand l'orchestre s'arrêtera, je danserai encore...
Quand les avions ne voleront plus, je volerai tout seul...
Quand le temps s'arrêtera.. Je t'aimerai encore
Je ne sais pas où, je ne sais pas comment...
Mais je t'aimerai encore...
D'accord?
C'est drôle, les cons ça repose,
C'est comme le feuillage au milieu des roses
Il faut vivre partout, dans la boue et le rêve
En aimant à la fois et le rêve et la boue
Il faut se déplacer d'adorer ce qui passe
Un film à la télé, un regard dans la cour
Un coeur fragile et nu sous une carapace
Une allure de fille éphémère qui court
Je veux la chair joyeuse et qui lit tous les livres
Du poète au polar, de la Bible à Vermot
M'endormir presque à jeun et me réveiller ivre
Avoir le premier geste et pas le dernier mot
Étouffer d'émotion, de désir, de musique
Écouter le silence où Mozart, chante encore
Avoir une mémoire hypocrite, amnésique
Réfractaire aux regrets, indulgente aux remords
Il faut vivre, il faut peindre avec ou sans palette
Et sculpter dans le marbre effrayant du destin
Les ailes mortes du Moulin de la Galette
La robe de mariée où s'endort la putain
Il faut voir Dieu descendre une ruelle morne
Pour nous, les exilés, la terre natale a une saveur particulière : plus on s'éloigne, plus elle est corsée, plus on se sent imprégné de sa patrie, ne serait-ce que dans le regard des autres, qui te font bien comprendre que tu n'es pas d'ici.
Pour lutter contre l'insomnie, certains comptent les moutons ; moi je pourrais compter les amis que la mort m'a arrachés.