Cette lecture fut divertissante. Ce n'est pas mon livre préféré, mais il m'est sympathique et il m'a changé les idées, je lui trouve un côté rafraîchissant.
L'histoire aborde plusieurs thèmes qui me font envie, comme le moyen-âge et les dragons. Toutefois, il inclut une nouvelle idée, l'emploi du monde asiatique. Le moyen-âge est très bien exploité, on nous parle de la peste, la religion est fidèle à l'Histoire, le conflit entre chrétien et païen l'est tout autant. L'idée d'un dernier dragon a tuer, malgré la grande chasse orchestrée soixante ans plus tôt est bien pensée, j'aime le concept que cet animal soit passé de réel à légende au fil du temps. Il est tellement devenu légendaire que son retour suscite interrogations.
Dans ce cadre très intéressant, nous suivons un curieux protagoniste principal. Je dis curieux parce qu'il a plus l'étoffe d'un anti-héros que d'un héros. Ses réactions devant la chinoise ou bien la vieille chinoise sont très drôles, on évoque les monstres et la sorcellerie en raison de sa peur de la différence. J'ai trouvé ses réactions normales pour l'époque, elles ne m'ont pas dérangées, en plus de ses préjugés, Jude de Doran devra aussi apprendre à maîtriser sa peur, et ça non plus, ce n'est pas gagné !
J'aime l'idée que les apparences sont trompeuses, Lan serait une sorcière, mais ce n'est pas clairement dit, en fait tout dépend de ce que l'on croit. Personnellement, je la vois plus comme une marginale que comme une sorcière, de même que pour Tybalt et l'un de ses fils Richard, ils ne sont pas tels que nous les voyons. C'est un aspect du livre qui m'a énormément plu.
Jude n'est pas seul, il est accompagné d'une chinoise Jing-Wei qui était Lizzie, une créature de foire en raison de ses pieds. En Chine, la coutume veut qu'on écrase tous les os des pieds des femmes, je ne sais pas si c'était vrai historiquement parlant, je ne suis pas très calée en moyen-âge chinois. Quoi qu'il en soit cette coutume est aussi horrible que le fait qu'elle fut exposée comme une bête ignoble, enfermée en cage et maltraitée. Toutefois, au lieu de s'apitoyer sur son sort, Jing-Wei nous offre une belle leçon, elle est toujours souriante et pleine de sages paroles, elle est l'opposée totale de Jude.
Leurs différences deviennent leurs forces, car ils doivent tuer le dernier dragon. Un dragon qui a ravagé et calciné des villages entiers – habitants inclut, dont celui de Jude. J'ai apprécié leur périple, pas réellement semé d'embûches physiques, mais plutôt psychologiques, car ils doivent apprendre à vivre ensemble et Jude doit contrôler ses peurs. Cela change du chemin parsemé de quêtes et toutes sortes de péripéties, en même temps le roman est court – à peine 200 pages, son but n'est pas de rivaliser avec Tolkien, mais de proposer un autre genre de quête. Une quête intérieure.
Le style est très travaillé, nous avons des expressions et un vocabulaire typique du moyen-âge, même si c'est une œuvre jeunesse, je le conseille à ceux connaissant déjà ce genre de phrasé et de mots. Toutefois, une fois les vocables acquis, la lecture se fait facilement, l'emploi de la première personne du singulier aide à se plonger dans les pensées de Jude. On entre aisément dans l'histoire dès ses premières lignes et la forme du roman est intéressante.
En somme, nous avons un bon roman sur le moyen-âge. Les personnages principaux sont attachants, même si Jude peut exaspérer quelques fois en raison de ses propos. Le style est travaillé et la lecture est fluide, l'histoire est prenante et sympathique, nous avons là une quête différente de la fantasy traditionnelle, plus intime, plus personnelle. Il s'agit bien sûr de l'éternel combat d'un jeune innocent des rudiments des armes contre un dragon affamé, mais le but est plus poussé. Comme l'indique Lan, chaque être humain possède son dragon intérieur, pour Jude, ce sont ses peurs et ses préjugés qu'il lui faudra repousser s'il veut parvenir à tuer le dragon et venger sa famille.
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