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Critiques de Sándor Tar (4)
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Notre rue

Une rue, Radnoti, pas très loin de la grande ville, probablement Debrecen en Hongrie. Figée dans le temps, quelques années après l’instauration du communisme au pays. Pour ses habitants, c’est tout simplement « Notre rue ». Pour le lecteur, c’est un voyage dans le temps intéressant, parfois comique, parfois touchant. En effet, l’auteur hongrois Sandor Tar pige dans ses souvenirs d’enfance pour la reconstituer, pour en dresser le portrait, un peu comme certains regarderaient une photographie. Il ne s’agit pas d’une de ces artères importantes pour le monde, où il se passe des événements cruciaux, même pas une de ces rues commerçantes ou passantes, non. C’est un bout de nulle part, presque anodin, mais qui vaut tout aux yeux de ses habitants.



« [Cette rue], elle est pauvre, aride, les cours sont vides, sales, négligées, des mouches partout, des tas de fumier nauséabonds, des toilettes sans porte, même les nouvelles maisons se pavanent sur un ramassis d’immondices, la plupart n’ont pas de crépi, les fenêtres sont bouchées avec des briques, et personne ne va au temple. » (p. 85) Certes, ce n’est pas une description des plus objectives, elle est faite par le pasteur qui ne l’aime pas. Mais ses habitants, eux, ils l’aiment. Ils y sont nés, y ont grandi. C’est tout ce qu’ils connaissent. Ils s’en foutent que la rue ne soit pas pavée où qu’il n’y ait pas l’eau courante. Tout ce qui compte, c’est « chez Michi, où les habitués se retrouvent par temps de pluie, et également quand il ne pleut pas. » (p. 91) Le débit de boisson a un vrai nom nom mais tout le monde dit chez Michi, à cause du patron.



« Notre rue » est un recueil de nouvelles mais chaque courte hsitoire complète la précédente et annonce la suivante. C’est que les personnages de cette même rue – on ne se fait pas d’idée, c’est eux qui sont important et moins cette artère qui les réunit – reviennent d’une nouvelle à l’autre.

Sandor Tar jette sur « sa » rue un regard nostalgique mais surtout lucide. Il n’enjolive pas. Il montre, c’est tout. C’est qu’il ne se passe pas grand chose sur cette rue. Ses habitants mènent leur petite existence qui n’a d’importance que pour eux. Ils ne sont pas parfaits, oh non, mais ils sont humains. Et attachants malgré leurs faiblesses. Par exemple, ces ivrognes invétérés, ces pauvres diables, ces proftiteurs de toutes sortes, mais aussi ces amoureux et ces travailleurs. Il y a le vieux Vida, sage, qui a construit une des premières maisons de la rue. Jancsi Hesz qui gagne toujours aux cartes. Mme Piroska, Jozsef Sudak, Attila le plus beau garçon de la rue, Dorogi et son épouse Mancika, le pasteur Marton Vegso, c’est un passionné d’histoire mais il est peu compréhensif et conduit mal. Et tous ces autres. Des portraits colorés mais, en même temps, ordinaires et criant de vérité. On pourrait presque y reconnaitre nos voisins et amis d’enfance...



Tous ces familliers sont une partie intégrante de « Notre rue ». À vous de découvrir ce monde qui n’existe plus que dans la mémoire de quelques aînés, puis chez les lecteur de ce petit ouvrage.
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Choucas et autres nouvelles

Dernièrement, j'ai lu Notre rue, un recueil de nouvelles de l'auteur hongrois Sandor Tar. J'avais apprécié cette description de l'après-guerre appauvri, entrant dans le communisme. C'était dur, un peu sombre, mais ponctué de moments tendres, un peu comme une chronique de village avec ses personnages pittoresques. Suffisamment douce-amer pour que je puisse apprécier l'expérience. Choucas, cet autre recueil de nouvelles, n'a pas opéré le même charme. Je n'ai pas détesté mais ce ne fut pas un coup de coeur non plus. Disons que, cette fois-ci, l'auteur a misé davantage sur le côté amer, dur et sombre.



La nouvelle éponyme, Choucas, fut difficile à suivre. On y rencontre Maté, Ipogy et Horog – ouf ! pour un lecteur francophone –, trois jeunes tziganes qui cherchent emploi et gîte et autour d'eux gravitent un choucas, un oiseau. C'était intrigant. Alors que le trio se fait repousser par les humains, cet animal leur reste fidèle. Mais je n'ai pas eu le loisir de réfléchir aux thèmes tellement j'avais l'impression de m'embourber dans l'intrigue plutôt dense. Par exemple, assez tôt, le choucas devient un garçon qui parle. Étais-je tombé dans un récit fantastique ? J'ai dû relire deux fois pour essayer de comprendre. Finalement, il semble y avoir un quatrième jeune tzigane. Mélangeant ! Mais j'ai poursuivi ma lecture : malgré tout, c'était hors de l'ordinaire, étrangement attirant. Ce paysage de chantier de construction, d'immeuble en béton, aussi dur que les gens qui y travaillent et y vivent, il m'interpelait. Et, après tout, c'est là que trouvent refuge les âmes en peine, les jeunes tziganes n'y rencontre pas que l'hostilité, ils y font également de belles rencontres. C'est là qu'ils trouvent le courage de s'ouvrir les uns aux autres. Puis, la finale m'a intrigué, mystérieuse et poétique. Je ne m'y attendais pas du tout et ce fut agréable.



Malgré cela, je suis resté sur ma première mauvaise impression et le style d'écriture de Sandor Tar y est pour beaucoup. En particulier les dialogues, qui sont intégrés à même les paragraphes, sans tirets ni guillemets pour les distinguer ou les faire ressortir. En soi, ce n'est pas un problème, je trouvais ça original, stylisé dans Notre rue. Mais, quand ces dialogues sont nombreux et que les pragraphes sont longs, ça ajoute inutilement à la complexité.



Les autres nouvelles sont encore plus dures. Ces gens, jeunes et moins jeunes, alcooliques, sans situation, sans avenir… sans espoir ? Terrible ! le pire, c'est qu'ils sont voués à répéter ce cycle de violence et de haine. Par exemple, dans la deuxième, le quartier de chaux, un grand garçon se croit meilleur que son père et sa mère, alcooliques invétérés mais brutalise son frère et sa soeur. Sans doute suivra-t-il l'exemple de ses parents…



Et ça continue ainsi. Comme je l'ai écrit plus haut, c'est dur, c'est terrible. Tout n'a pas besoin d'être beau (ou décrire de belles choses) pour qu'on puisse l'apprécier… mais ça aide énormément. Ceci dit, il faut aussi des gens courageux pour écrire avec passion sur des réalités noires ou, du moins, faites de gris et d'ombres. Et Sandor Tar s'est donné comme mission de faire connaître cet univers qu'il a connu de si près. Je me suis toujours senti privilégié d'être né en Occident et des livres comme celui-ci me le rappellent...
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Notre rue

Des courts chapitres décrivent la vie de quelques habitants d’une rue d’un village ou bourg quelque part en Hongrie. Une rue misérable, aux maisons inachevées ou délabrées, dont les occupants n’ont plus de travail. Licenciés après les privatisations du régime post-communiste, ils vivotent de pensions ou indemnités, ou vivent à crédit. La boisson devient inéluctable, la seule façon de supporter le quotidien. Les vieux attendent la mort, les jeunes ne voient aucune perspective.



Cela pourrait sembler très noir, cela l’est incontestablement, mais en même temps Sándor Tar pose un regard tendre sur ses personnages, dont il semble comprendre les faiblesses et les souffrances mieux qu’ils ne le font eux-même. Et il y a une sorte d’humour, certes un peu désespéré, mais très présent, qui donne à toute cette misère et à toute cette tristesse, une dose d’humanité, de fraternité, qui fait qu’on s’attache à ces être humains, aussi abîmés soient-ils. Qui au final ont, ou ont eu, les mêmes joies, espérances et soucis et souffrances que tous les autres êtres humains de la terre, mais qui sont nés à un moment et à un endroit qui ne leur a pas laissé une trop grosse part du bonheur.



Il y a ton original, une façon d’agencer le récit, qui m’ont embarqué dans cette histoire, dans ces histoires plutôt, parce que les différents personnages et leurs vies se bousculent, chacun pour quelques pages, avant de laisser la place à une autre maison, à une autre histoire, quitte à revenir un peu quelque chapitres plus loin dans le vie de tel ou tel personnage.



Une très bonne lecture.
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Tout est loin

4 hommes âgés de vingt à trente ans sont réunis par la force des choses.

Ils sont ouvriers du bâtiment et travaillent sur le même chantier, quelque part en Hongrie.

Ils partagent 1pièce-cuisine-SDB dans une maison dont la propriétaire est

« une femme voûtée aux cheveux décolorés, pour ne pas dire bossue et boiteuse, voire myope, et qui comme toutes les vieilles filles hideuses portait des tricots échancrés, des shorts et des pantalons moulants, bref tout ce qui va à ravir aux jolies mômes. Elle s’appelait Adel, fumait énormément et avait une bouche épouvantable dans tous les sens du terme, ce qui sortait de cette fente informe barbouillée de rouge était en général tout aussi ignoble, … » (p.12)

Leur logement est à la mesure de la description de leur logeuse ! Totalement insalubre, où ils respirent des odeurs nauséabondes et où des cafards grouillent jusque dans leurs lits !

Leur vie quotidienne se passe en beuveries, sexe, moqueries, chamailleries et engueulades. Voilà toutes leurs distractions ! C’est comme s’ils n’avaient pas d’autre chose à espérer dans leur petite vie miséreuse…

Mais un jour, pourtant, se présente à eux l’opportunité d’aller travailler à l’étranger et de mieux gagner leur vie… Leur patron les envoie par le train en Allemagne vers un nouveau chantier…

Ils vont vers l’inconnu, ne connaissent pas leur destination précise, ni ce qu’ils vont y faire, mais ils espèrent seulement vivre de façon plus décente que jusqu’à présent.

Effectivement leurs salaires et leurs conditions de vie sont meilleurs en Allemagne qu’en Hongrie, mais leur travail y est tout à fait glauque et rebutant ! Ils reçoivent des camions qui sont chargés de déchets nauséabonds pour le moins inquiétants ! « …un lot de restes hospitaliers, comme il disait, contenant les choses les plus diverses, mais il n’en dit pas plus. » (p.56)

« Parfois les sacs se perçaient, une barrique s’entrouvrait et des choses répugnantes s’en échappaient au milieu d’une puanteur effroyable, ou bien c’étaient des vapeurs de produits chimiques, une fois il y eut même une charogne en décomposition. » (p.67)

Ils doivent les enfouir dans la nuit et couler du béton par-dessus, jusqu’au jour où, c’est le corps de Loboda (un de ces quatre ouvriers) qui fait partie du déversement dans la fosse !

Les personnages que dépeint Sandor Tar sont des êtres imparfaits à bien des niveaux, mais avant tout ils sont humains. Ils n’ont pas choisi leur situation.

Ils vivent dans une misère matérielle, intellectuelle et sexuelle effrayante et l'alcool est pour eux le moyen d’oublier leur vie sordide.

Bien qu’ils soient souvent éméchés et vulgaires, on se dit qu’ils auraient certainement mérité mieux dans la vie, mais leur pays ne leur offre pas de poste à la hauteur de leur niveau d’études et de leurs savoir-faire.

Ils apparaissent comme des êtres résignés à leur sort, sans perspective, sans véritable rêve.

Le ton est amer, caustique, acerbe.

Ces personnages désoeuvrés sont attachants et émouvants.

Une lecture qui bouleverse.

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