Naître est la chose la plus difficile qui soit. Non pas seulement en ce la que les conséquences en sont pénibles, mais surtout parce qu’on n’y arrive pas. Nous sommes extirpés vers l’ouvert inaboutis, incomplets, bâclés, hilflos et nus face à l’existence sans merci ni pardon.
Genèse : moment précis auquel Dieu a atteint son seuil d’incompétence.
Il est vrai que la mère est la chose qui te dit (que la personne l’articule en mots ou non) : tu es celui à qui je manifeste mon amour en t’aimant plus que tu n’aimerais être aimé ; tu es celui à qui je donne mon amour en l’accablant de ne pas m’aimer assez ; tu es celui à qui je demande de na jamais aimer que moi et de me le prouver en aimant une autre femme par le moyen de laquelle tu attesteras ton amour pour moi en me faisant le cadeau des enfants de cette femme ; tu es celui que j’ai choisi d’aimer quoi qu’il advienne de lui et à qui je demande de justifier inlassablement cette confiance infinie, ce don illimité, en réussissant tout ce qu’il entreprend.
Mais il est vrai aussi que le père est la chose qui te dit (que la personne l’articule en mots ou non) : tu dois m’obéir et être un homme, un vrai, c’est-à-dire quelqu’un qui ne se laisse donner d’ordres par personne ; tu dois faire comme moi : être toi-même et n’imiter personne ; tu devras prendre ma place lorsque je serai mort, c’est-à-dire la place d’un mort, car la vie continuera.
Et il est vrai aussi que l’épouse est la chose qui te dit (que la personne l’articule en mots ou non – mais généralement elle le fait) : je te demande de toujours me surprendre de la manière qui est précisément celle que j’attends ; je ne te demande pas de faire ce que je veux que tu fasses, quand ce n’est pas ce que tu voudrais faire, je te demande de vouloir le faire ; je te demande que nous nous laissions toujours tous deux un espace de liberté par rapport à l’autre, sauf lorsque j’ai besoin de toi ; je te demande d’être l’homme dont je suis tombée amoureuse, avec toutes les qualités et les idiosyncrasies qui te caractérisaient et qui m’ont fait anticiper que tu deviendrais autre.
Et il est vrai aussi que l’époux est la chose qui te dit (que la personne l’articule en mots ou non) : tu es pour moi le corps soumis qui n’est que le prolongement de mon désir - de mon désir d’un être à jamais insoumis ; tu es l’indicible perverse éprise de toute abjection qui ne s’est jamais donnée qu’à moi ; tu es cette liberté qui m’appartient.
Et il est également vrai que l’enfant est cette chose qui te dit (que la personne l’articule en mots ou non) : aime-moi pour ce que je suis, et ce uniquement parce que je suis à toi ; guide-moi vers mon autonomie, accepte que je sois responsable de moi-même, car je dépends de toi ; reconnais-toi en moi, car je suis unique.
Endive : l’endive est la chicorée des jardins (cichorium endivia), et sa vertu comestible a été découverte, longtemps avant notre ère, par un individu dont le nom a été oublié – mais, où que tu sois salopard, on finira par te retrouver.
Marriage is a wonderful institution. But who wants to live in an institution? (Groucho Marx)
Uniquement des fous, la raison nous l’enseigne. Et il me semble que ça se passe de commentaire.
Décadence : vue rétrospective sur le progrès.
Tout comme la syphilis, le mariage – et donc la famille - débute avec l’amour.
France : bande de terre précédant immédiatement l’océan quand tu viens du Danube à cheval.
Country : musique dont Dieu a eu l’idée entre les ères quaternaires et ternaires, période pendant laquelle il s’ennuyait, et grâce à laquelle il escomptait satisfaire le jour venu son sens de l’humour. Par synecdoque désigne également l’étendue inflammable dans laquelle il faudrait entasser ceux qui en jouent.
Démagogue n.m. : démocrate pris la main dans le sac.
Tes parents sont bien les responsables directs de l’horreur d’exister, qu’ils t’ont passée comme on refourgue un fardeau ou comme on transmet une maladie, et dont ces salopards se paient le luxe de te donner à croire qu’il s’agit d’un cadeau merveilleux (les malfaiteurs pour leur part, au moins, s’abstiennent ordinairement d’une telle fourberie lorsqu’ils te rouent de coups et t’abandonnent ensanglanté au fond d’une ruelle obscure), t’incitant par là à émuler à ton tour leur aveuglement.