Susan King

- Brighid des Mantes, poursuivit Alainna, Maey la Douce et Alainna la Vierge, vous possédez les neuf grâces, dons des anges qui veillent sur nous.
Elle inclina la tête, attendit un instant, puis continua:

Sois la flamme qui brille devant nous,
Sois l'étoile qui nous guide,
Sois le chemin où nous marchons,
Aujourd'hui, ce soir, et à jamais.

Je suis las et je suis étranger;
Conduis-moi au pays des Anges,
Sois mes yeux dans les ténèbres,
sois mon bouclier contre les armés des fées,
Sois mes ailes jusqu'à ce que je trouve un lieu où me reposer.

Pour survivre, il faut autant d'imagination que de courage et de détermination. Nous savons ce qu'il nous faut faire pour y parvenir. Le problème, c'est de savoir si nous souhaitons ou non nous plier aux règles édictées par la société.

Il interrompit leur baiser, mais elle réclama de nouveau sa bouche et se laissa emporter dans un tourbillon de sensations.

- Ah! fit une voix au dessus d'eux. Je vois qu'il est temps de parler mariage.

Alainna sursauta et leva les yeux. Du haut de l'escalier, le père Padruig leur souriait.

- Venez, venez, dit-il. Sortez des ténèbres pour entrer dans la lumière, si vous le voulez bien. Cette crypte gèlerait le nez du diable lui-même, quoique vous ayez trouvé le moyen d'y mettre un peu de chaleur, hein?

L'honneur es chose délicate.

Ses chemins sont chemins de délices,
Ses sentiers, des sentiers de bonheur.

Sept cavaliers apparurent au sommet de la colline couverte de neige. Leurs armures étincelaient au soleil couchant.
Alainna les regarda approcher. Le vent glacé agitait sa chevelure rousse et le tartan drapé par-dessus sa robe. Dans quelques instants, elle serait piétinée à moins qu'ils ne ralentissent ou qu'elle ne s'écarte. Pourtant elle ne se sentait pas en danger.Le soleil disparut, et Alainna eut l'impression que le temps s'arrêtait. Son grand-oncle, le barde du clan, disait qu'aux grands changements de la journée - aurore, coucher du soleil - les royaumes terrestre et céleste pouvaient se mêler. C'était le cas en ce moment, elle en était sûre.

Il contempla son visage ovale aux traits ravissants, encadrés d'une chevelure cuivrée. Ses grands yeux étaient bleu-gris, et quelques taches de rousseur piquetaient sa peau diaphane. Elle était délicieusement naturelle, son expression était franche, ses manières et sa voix douces. Il aurait aimé qu'elle continue à chanter, car sa voix lui faisait l'effet d'un baume.
Elle l'étudia avec attention, sans dire un mot, esquissa un sourire timide, puis se tourna de nouveau vers la bouilloire. Il émanait d'elle un calme bienfaisant. Il inspira profondément, et porta la main à son front. Un linge recouvrait l'endroit douloureux. Son corps entier lui faisait mal, mais il se sentait bien, enveloppé dans ce lainage douillet.

Ils vivent comme des sauvages, utilisent des centaines d'acres pour de maigres récoltes et à peine une centaine de moutons. Bientôt, la productivité de cette vallée va augmenter. Il y aura des moutons par milliers, assez de laine pour vêtir tout le continent, et cela ne nécessitera la présence que de quelques hommes compétents.

Cette société stagne. Ce sont des paresseux qui se promènent sur les collines en veillant sur leurs modestes troupeaux, leurs modestes récoltes, leurs modestes travaux. Ils n'ont aucune ambition, aucun talent. Ils ne savent que tisser, garder des moutons et raconter des histoires. En restant ici, ils n'apprendront jamais rien de nouveau. Loin de la vallée, en revanche, ils évolueront. Nous leur rendons service en les obligeant à partir.

Le son plaintif se répercuta entre les collines et bientôt d'autres femmes y mêlèrent leurs voix, le transformant en chant. L'écho multiplia les sons, comme si les montagnes elles-mêmes pleuraient.
La poignante beauté de la mélodie serra le cœur de Catriona. Elle aimait ces chants traditionnels et n'osait imaginer ce qui se passerait lorsqu'ils auraient disparu.

Nulle trace d'où nous venons
Nulle trace de chansons à transmettre à notre jeunesse
Notre langue se perd par appât du gain
Et la pluie du Sud nous entraîne au loin
 
 
Éternité, Dougie MacLean

Arrivée devant Sébastien, Alainna lui demanda, comme aux autres avant lui:
-Que vas-tu donner à la Vierge?
La prenant par le menton, il bascula son visage en arrière et l'embrassa sur les lèvres .
- Mon coeur, chuchota-t-il. Pour toujours.
Elle le contempla de ses yeux bleus pleins d'amour. Un murmure approbateur parcourut cercle de spectateurs.

- La vérité, c'est que nous prêtons à ce Kinlochan... et pour que la terre vous soit octroyée.
- Je ne suis pas venu que pour la terre.
- Pourquoi, alors?
- Pour vous. Je suis venu pour vous.
Un frisson la parcourut, et elle le regarda, conquise par la sincérité qu'elle entendait dans sa voix.
- Je vous ai vue parlé au roi , dit Sébastien. J'ai lu votre fierté et votre désespoir dans vos yeux. Il est clair que vous aimez votre peuple et que vous aviez terriblement besoin d'un champion. Je suis venu pour vous aider.

Je pose sur toi un bouclier de brume,
Emanant de la bruyere et de la montagne,
De la mer et du roc,
De l'homme et de la vierge,
Jusqu'a ce que tu me revienne.

On dit que la clarsach, la harpe celte, emet trois sortes de musique, chuchota-t-elle en se penchant vers Sebastien.
Celle qui fait couler les larmes, celle qui vous berce comme un enfant et celle qui suscite la joie. Mais toutes ont le pouvoir d'emouvoir l'ame.

Soyez le chemin pour l'autre,
Soyez l'etoile pour l'autre,
Soyez l'oeil pour l'autre,
Soyez le soleil et la lune pour l'autre,
Soyez le grace et la paix pour l'autre,
Soyez le bouclier et la force pour l'autre.
Chaque jour soyez joyeux,
Ne soyez jamais tristes,
Tous les jours soyez benis,
Et ayez longue vie et prosperite.

J'ai trouve dans le jardin, Mon joyau, mon amour.
Son oeil est une etoile,
Sa bouche une baie,
Sa voix une harpe.
J'ai trouve dans la prairie, La vierge aux yeux clairs.
Son oeil est une etoile,
Sa joue une rose,
Son baiser du miel.

En ete, tu es une ombre,
En hiver, tu es un abri,
Un roc,
Une forteresse,
Un bouclier,
Je te cheris,
Je t'aide,
Je t'etreins,
Je te jure fidelite.

Viendra la paix, viendra la joie,
Le courage et la bonte.
La vie ne nous est pas cruelle.
Protege-nous, conduis-nous au port.