J'ai songé au mot qui servait communément à nommer les M. et les Franz : des bâtards. J'ai écouté le son glorieux que faisaient ces deux syllabes. J'ai pensé que naître bâtard c'était savoir d'avance que les autres ne vous feraient pas de cadeau. C'était apprendre d'emblée le grand partage entre ceux qui osaient nommer les choses et ceux qui préféraient les taire. Naître bâtard c'était gagner du temps, mûrir à vitesse accélérée, apprendre à composer dès les premiers pas avec le boitement inévitable de la vie. C'était grandir plus courageux, plus honnête avec soi-même et avec la vie, tout simplement plus vrai. N'était-ce pas ce que l'on disait des chiens bâtards : qu'ils étaient beaucoup plus intelligents que les chiens de race. Que pour eux la débrouille était une question de survie.