Valérie Gobrait

Lors d'une déambulation en bibliothèque, j'ai découvert sur un présentoir une anthologie consacrée au théâtre océanien. Aimant les découvertes les plus inattendues, j'ai embarqué le livre. La dernière Vierge du paradis est la première pièce que je lis dans le volume.



Cette pièce est rattachée dans la présentation de l'anthologie à Rotuma, un archipel formant une dépendance spéciale des Îles Fidji, avec une langue et une culture particulière, différente de celles des autres Fidjiens. La pièce a été écrite à quatre mains, par Vilsoni Hereniko, écrivain et cinéaste (il aurait réalisé le premier film fidjien) et Teresia Kieuea Teaiwa, universitaire et poétesse.



La pièce est composée de quatre scènes. Dans la première, qui présente les personnages et pose le contexte, nous découvrons Jean, une apprentie anthropologue américaine, venue faire ses premières recherches dans l'île, et Helmut, un psychologue allemand vieillissant, sur le point de se marier avec une jeune fille originaire de l'endroit, Hina, qu'il est venu épouser sur ses vieux jours, à la recherche d'une vraie vierge, en payant pour l'obtenir. Temanu, une jeune femme originaire de l'île qu'elle a quittée dans l'enfance pour aller vivre et étudier en Australie, revenue chercher ses racines, essaie de contrarier le mariage, en s'attachant à convaincre Hina, qui est sa cousine, de ne pas se marier et de rester dans son île. Il aura pourtant lieu, mais les choses ne se passeront pas complètement comme prévu. Chaque personnage aura l'occasion de s'exprimer, et de changer de point de vue, avec la participation des esprits traditionnels.



La pièce pose des questionnements sur l'intérêt des anthropologues pour les populations censées être primitives et proches de la nature, sur les mariages arrangés, sur le rapport à sa culture, d'une population qui à l'heure de la mondialisation voyage, et échange avec d'autres cultures. Chacun a ses stéréotypes et ses attentes de l'autre, l'échange est faussé à la base, même s'il peut être possible de rectifier un peu les choses dans la durée. C'est plus complexe que ce que la première scène pouvait laisser penser, et il y a une vraie évolution dans la situation, et la manière de voir les personnages. Par exemple, Hina au final n'est pas forcément uniquement une innocente victime d'un vieillard lubrique, elle a des ressources.



Sans être une grande œuvre universelle, la pièce est bien construite et présente de manière non dépourvue d'humour, une situation qui questionne, qui pose le problème des rapports des cultures, entre domination, fascination, et montre comment des individus y sont confrontés dans leur quotidien, et comment ils arrivent à trouver leur positionnement, et peut-être évoluer un peu.

Qui eut cru que je lirais un jour du théâtre océanien; je remercie le challenge Globe-trotteurs qui invite à faire d’intéressantes découvertes, de même qu’à sortir des sentiers battus. La Dernière vierge du paradis, la pièce de cette anthologie que j’ai lue, s’ouvre dans un motel de Marawa. Trois personnages s’avancent et se présentent aux spectateurs: Temanu, de retour au pays après l’avoir quitté à l’âge de douze ans pour aller étudier à l’extérieur; Jean, une anthropologue récipiendaire d’une bourse venue pour ses recherches; et Helmut Klinghast, un professeur de psychologie à la retraite, en quête d’une vierge à épouser. Ce dernier la trouve en la personne de Hina, qui s’avère être la cousine de Temanu, qui est bien choquée de la situation, et essaie de la dissuader d’épouser cet homme alcoolique qui a payé pour l’avoir, alors qu’Hina, elle, y voit une occasion d’aller voir le monde. J’ai pris plaisir à lire cette pièce dans laquelle chaque personnage est archétypal, et arrive avec ses préjugés et son regard sur l’autre, tout à fait teintés de l’héritage du colonialisme. Temanu, à Jean : « Vous croyez vraiment qu’on peut comprendre les gens de mon pays en quelques mois ? On est aussi simples que ça ? Et puis, il y a votre homologue masculin, Helmut, le chasseur de vierges au paradis ! Vous êtes tous pareils, vous venez ici pour piller et voler; vous prenez et vous prenez jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien de sacré. » (p. 325) Jean, à propos de Temanu : « Elle veut se décoloniser l’esprit, mais elle n’est pas capable de vivre sans les symboles de la belle vie du colonisateur. » (p. 346) La pièce se termine sur un retournement amusant, poussant à confronter nos propres préjugés.

Du théâtre (5 pièces), en numérique... pour explorer la littérature des petites îles d'Océanie, il faut faire des trucs qu'on ne fait jamais...



1ère pièce lue : La dernière vierge du paradis.

Par Vilsoni Hereniko, spécialiste de la tradition orale et clownesque en Océanie, l'adaptation théâtrale d'une histoire vraie donnée par Teresia Kieuea Teaiwa (père des Kiribati, mère afro-américaine d'Hawaï, vie aux Fidji et Nouvelle-Zélande), universitaire et poète.

Une mise en scène bien décrite qui m'a permis à peu près d'imaginer cette anthropologue occidentale blanche, cette exilée de retour en recherche de racines, cet homme blanc âgé qui veut épouser une vierge, la jeune fille qui veut partir, le séducteur magouilleur, la famille et les anciens. Les traditions sont racontées (des chansons en samoan, des mots traduits), il y a un peu d'humour et de surprise, les stéréotypes servent à dire des vérités.



2e pièce lue : Les dieux sont borgnes - Pierre Gope & Nicolas Kurtovitch (Nouvelle-Calédonie)

Conversation à travers les temps entre le capitaine Cook, des matelots, des kanaks, une princesse et son mari chef, des dieux mythologiques... Difficile à comprendre pour moi.



3e pièce lue : Kamau (Tiens bon et à la tienne) par Alani Apio, auteur hawaïen qui nous emmène sur son île avec la souffrance d'un natif, devenu à son corps défendant guide pour touristes. Un peu difficile à saisir au départ avec des histoires de "voix off", la pièce aborde la culture d'Hawaï qui cherche à "tenir le coup" face à l'appropriation états-unienne. J'ai fini par être touchée.

Je suis quelque peu sceptique à la fin de cette lecture qui m'a laissé un avis très mitigé.



Et c'est dommage parce que l'idée de receuillir des pièces de théâtre d'auteurs océaniens dans une anthologie était excellente, nous permettant ainsi de découvrir la plume de certains auteurs de ce continent.



Certains thèmes abordés étaient malgré tout intéressants, comme les difficultés de cohabiter parfois avec les haole (étrangers), qui semblent avoir le droit de beaucoup de choses, les problèmes d'expropriation et de pauvreté, la question de la transmisison et de l'héritage culturel. J'ai apprécié qu'il y ait également des phrases en langue originale.



Mais j'ai trouvé certaines pièces parfois un peu vulgaires (cela m'étonnerait que le capitaine Cook parlait comme ça) et étais très portées sur la dénonciation des étrangers, caricaturant ces derniers à l'extrême (je pense notamment à la pièce "La dernière vierge du paradis"). Des scènes m'ont mise mal à l'aise. Vous pouvez tout à fait me dire qu'il fait prendre tout cela au second degré, mais pour ma part je n'ai pas réussi.



Récapitulatif des titres des pièces :

- Kāmau

- Le Partage de la terre

- Les Dieux sont borgnes

- Outcasts

- La dernière Vierge du paradis.

Splendide album jeunesse, aux illustrations merveilleuses et délicates, à l'image du récit qui mêle une légende polynésienne à une mésaventure du quotidien : la rencontre onirique entre la déesse Hina, femme-oiseau, et un petit garçon en pleurs.



Les illustrations de Jonathan Mencarelli, par ailleurs professeur d'arts plastiques et sculpteur sur pierre de l'île de Moorea, ses peintures sont très inspirées des tableaux du célèbre artiste Bobby Holcomb.



Une magnifique voyage pour petits et grands, à lire, à écouter, à chanter, à observer...
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