Viviane Cerf - La dame aux nénuphars
" Vous comprenez pourquoi on parle la langue de Molière ? " gueule-t-il.
" C'est parce que ce mec c'est un héros. " " Parce que ce mec, il a tout pigé, encore aujourd'hui. " " Parce que ce mec, il a pris des risques insensés. " " Parce que ce mec, ce serait Dieu, si Dieu existait et qu'en plus il n'était pas un salaud. "
" Glorifiez donc Dieu dans votre corps. "
Les gosses qu'entendent ça.
Eh bé.
Heureusement, par ailleurs, ils suivent des cours de SVT.
Sinon bonjour leur degré d’imbécillité.
Huab n'est à personne. Et certainement pas à un homme. Huab était au ciel, à l'air, au vent. Huab les défiait tous. Huab les emmerdait. Huab, le nuage.
Les paupières, comme les pétales rosés des nymphéas de Monet.
La pupille noire, le tour marron: le coeur.
Elle dit que oui.
Elle dit que les gens ne savent pas.
Les gens ne savent pas cette énorme ressemblance.
Entre leurs yeux et les fleurs.
Leurs yeux nénuphars.
(...)
Elle t'apprend.
Elle dit que ce sont ces fleurs que les gens ne savent pas faire éclore.
Et que c'est pourtant ce qu'il faut.
Elle dit que les nénuphars poussent surtout en eau trouble.
(...)
On peut pas couler, elle dit.
On peut pas couler, tu répètes.
Les nénuphars flottent.
Sur l'eau boueuse, trouble, sale, souillée.
Ils flottent.
Elle explique.
Son maquillage, ses grands yeux.
Le mascara sur ses cils, indéfiniment.
Son seul maquillage.
Unique.
Elle explique.
Les nénuphars, elle veut les faire éclore.
Elle veut que leurs feuilles, leurs pétales s'ouvrent le plus grand qu'il soit possible.
Elle répète: les nénuphars flottent.
Alors tu lui demandes.
Comment l'éclosion des nénuphars permet de vaincre les eaux boueuses.
Tu lui demandes si ses cils infinis l'ont rendue plus heureuse.
rien n'a été fait pour empêcher la foule de respirer un air irrespirable, de bouffer des saloperies et de crever la bouche ouverte sous la violence d'un feu solaire.
Guillaume n'avait pas pris ses cachets euphorisants ce soir. Il en était radicalement dégoûté. Il ne s'était pas pardonné cet éclat de rire.
Vous savez bien, dit la soeur, qu'il y a toujours eu, qu'il y a eu de tout temps deux sortes de vieux : les vieux qui se réjouissent du bonheur des jeunes et sont prêts à les aider.
Les vieux qui les envient et les haïssent et qui, s'ils pouvaient leur ôter leur jeunesse, le feraient bien volontiers.