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Biographie :

Willy Gianinazzi est historien et auteur d’ouvrages sur le syndicalisme révolutionnaire.

Il a été chercheur associé à l’IMEC (Institut Mémoires de l’édition contemporaine) pour le fonds André Gorz.

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[Le travail : Son irrationalité capitaliste]

L’invention du travail moderne consacre l’avènement de la rationalité capitaliste. Celle-ci s’est façonnée sur le mode du calcul comptable, à l’exclusion de toute autre considération non monétaire. Car le calcul sert à maximiser le rendement des facteurs de production et donc le profit qui est le seul but qu’a en tête le capitaliste. Comme Max Weber l’a entrevu, la rationalité capitaliste produit une première inversion : « Considérée du point de vue du bonheur personnel, elle exprime combien irrationnelle est cette conduite où l’homme existe en fonction de son entreprise et non l’inverse. » L’« esprit du capitalisme » a aussi cassé, puis inversé le rapport entre travail et besoin. « Le but du travail n’était plus la satisfaction des besoins éprouvés et l’effort n’était plus proportionné au niveau de satisfaction à atteindre. » En maintenant les salaires à un bas niveau, la rationalité capitaliste empêchait les travailleurs d’arbitrer entre durée du travail et niveau de consommation. Par là même, elle exigeait d’eux un travail quotidien et à plein temps qui est devenu une norme. Difficilement mais inéluctablement, cette norme a fini par s’imposer dans la vie des gens comme allant de soi – à la fin du Second Empire encore, les ouvriers dits « sublimes » célébraient la saint-lundi et les plus qualifiés d’entre eux limitaient le travail à trois jours et demi hebdomadaires ; intermittence et turnover caractérisèrent ensuite les ouvriers syndicalistes révolutionnaires qui faisaient revivre le principe de l’« autolimitation selon la norme du suffisant ».

La consommation elle-même s’est trouvée soumise à cet engrenage du « toujours plus » mû par la recherche du profit maximal. « La rentabilisation de quantités croissantes de capital » requérant que « les productions croissantes trouvent des acheteurs », il fallait que « la consommation continue de croître bien au-delà de ce qui était nécessaire à la couverture des besoins ressentis à un moment donné » : « La consommation allait devoir être mise au service de la production. » Gorz l’avait déjà souligné dans La Morale de l’histoire et dans Stratégie ouvrière et néocapitalisme, il s’agit là encore d’une inversion de l’ordre des choses :

[𝘓𝘢 𝘱𝘳𝘰𝘥𝘶𝘤𝘵𝘪𝘰𝘯] 𝘯’𝘢𝘭𝘭𝘢𝘪𝘵 𝘱𝘭𝘶𝘴 𝘢𝘷𝘰𝘪𝘳 𝘱𝘰𝘶𝘳 𝘧𝘰𝘯𝘤𝘵𝘪𝘰𝘯 𝘥𝘦 𝘴𝘢𝘵𝘪𝘴𝘧𝘢𝘪𝘳𝘦 𝘭𝘦 𝘱𝘭𝘶𝘴 𝘦𝘧𝘧𝘪𝘤𝘢𝘤𝘦𝘮𝘦𝘯𝘵 𝘱𝘰𝘴𝘴𝘪𝘣𝘭𝘦 𝘥𝘦𝘴 𝘣𝘦𝘴𝘰𝘪𝘯𝘴 𝘦𝘹𝘪𝘴𝘵𝘢𝘯𝘵𝘴 ; 𝘤𝘦 𝘴𝘰𝘯𝘵 𝘭𝘦𝘴 𝘣𝘦𝘴𝘰𝘪𝘯𝘴, 𝘢𝘶 𝘤𝘰𝘯𝘵𝘳𝘢𝘪𝘳𝘦, 𝘲𝘶𝘪, 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘶𝘯𝘦 𝘮𝘦𝘴𝘶𝘳𝘦 𝘤𝘳𝘰𝘪𝘴𝘴𝘢𝘯𝘵𝘦, 𝘢𝘭𝘭𝘢𝘪𝘦𝘯𝘵 𝘢𝘷𝘰𝘪𝘳 𝘱𝘰𝘶𝘳 𝘧𝘰𝘯𝘤𝘵𝘪𝘰𝘯 𝘥𝘦 𝘱𝘦𝘳𝘮𝘦𝘵𝘵𝘳𝘦 𝘭’𝘦𝘹𝘱𝘢𝘯𝘴𝘪𝘰𝘯 𝘥𝘦 𝘭𝘢 𝘱𝘳𝘰𝘥𝘶𝘤𝘵𝘪𝘰𝘯. 𝘓’𝘦𝘧𝘧𝘪𝘤𝘢𝘤𝘪𝘵𝘦́ 𝘮𝘢𝘹𝘪𝘮𝘢𝘭𝘦 𝘪𝘭𝘭𝘪𝘮𝘪𝘵𝘦́𝘦 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘭𝘢 𝘮𝘪𝘴𝘦 𝘦𝘯 𝘷𝘢𝘭𝘦𝘶𝘳 𝘥𝘶 𝘤𝘢𝘱𝘪𝘵𝘢𝘭 𝘦𝘹𝘪𝘨𝘦𝘢𝘪𝘵 𝘢𝘪𝘯𝘴𝘪 𝘭𝘦 𝘮𝘢𝘹𝘪𝘮𝘶𝘮 𝘪𝘭𝘭𝘪𝘮𝘪𝘵𝘦́ 𝘥’𝘪𝘯𝘦𝘧𝘧𝘪𝘤𝘢𝘤𝘪𝘵𝘦́ 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘭𝘢 𝘤𝘰𝘶𝘷𝘦𝘳𝘵𝘶𝘳𝘦 𝘥𝘦𝘴 𝘣𝘦𝘴𝘰𝘪𝘯𝘴, 𝘦𝘵 𝘭𝘦 𝘨𝘢𝘴𝘱𝘪𝘭𝘭𝘢𝘨𝘦 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘭𝘢 𝘤𝘰𝘯𝘴𝘰𝘮𝘮𝘢𝘵𝘪𝘰𝘯.

Le capitalisme ne rompt donc pas tout rapport entre travail et besoin : l’axiome accepté comme une évidence demeure celui de « travailler pour gagner sa vie », non pas cependant en fonction d’un niveau choisi de besoin, mais en fonction d’un niveau toujours plus haut de besoin qu’il faut satisfaire par le travail à plein temps. De même que la production prime la consommation qui n’est là que pour la faire fonctionner, le travail prime les besoins qui, secourus par l’immanquable publicité, ne sont là que pour le rendre nécessaire. Ainsi en va-t-il de l’individu sous le capitalisme, aliéné et soumis une fois comme producteur, une seconde fois comme consommateur.
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Dès qu'un produit devient accessible à tous, l'inégalité est reproduite par l'offre d'un produit "meilleur" accessible aux privilégiés seulement. Le produit "meilleur" frappera d'obsolescence le produit accessible, le dévalorisera et déterminera la "pauvreté" de ceux qui n'ont accès à ce dernier. La reproduction de l'inégalité de la pauvreté et du privilège - à des niveaux toujours plus élevés - est une condition nécessaire de la croissance indéfinie de la demande.
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