Félix Thiollier exposé à Paris.
Ces tableaux furent exposés à Paris. Il s’ensuivit une polémique à laquelle prirent part les critiques les plus en vue de la capitale, et entre autres Théophile Gauthier ; en province, Victor Smith consacra au Poème de l’Âme une petite brochure dans laquelle on remarque les observations fines et humoristiques, bien dignes des autres ouvrages de l’auteur qui a laissé dans notre région le meilleur souvenir comme homme, et la plus brillante réputation comme écrivain.
J’aimais Ravier. Comme homme, il était grand, avait une allure toute cordiale ; c’était un sensitif dans une charpente de colosse. Comme peintre, il a dans son oeuvre plus que du tempérament. Il y a le je ne sais quoi qui fait penser, la franche et forte sincérité de tout poète épris d’art et de sentiment.
Ses études peintes remplissaient deux grandes malles qu’il confia à un ami. Mais toutes disparurent pendant son absence, car plusieurs de ses camarades s’étaient partagé le butin sans le moindre scrupule.
Un membre de l’Institut nous confirmait la chose dernièrement en ajoutant : « Ravier faisait si peu de cas de ses produits que l’on « pensait rendre service à l’art en sauvant ces petits chefs-d’œuvre « qui risquaient de tomber entre les mains des Philistins. »
Lorsqu'arrivent les beaux jours, le jardin du Luxembourg est envahi par les habitants du quartier de Saint-Sulpice. Le matin, on y est partout à l'aise : à ce moment Paris dort ou travaille. Mais, dans l’après-midi, l’encombrement se forme. Les flâneurs, les enfants, les bonnes et les mamans sont en majorité. Les travailleurs s’éloignent de cette foule bruyante et cherchent les allées solitaires. Quand le soleil décline, le public s’écoule; on devient plus silencieux; des étudiants et des ouvriers viennent après leur journée respirer le bon air; des groupes de sénateurs continuent à discuter politique après la séance et se livrent parfois à des conversations moins sérieuses; des artistes admirent le soleil couchant à travers les branches d’arbres moins mutilés ici qu’ailleurs; des gens studieux lisent ou dessinent en attendant la retraite. Ainsi que vous, lecteurs, nous avions remarqué au milieu de cette foule deux personnes jeunes de caractère sous leurs cheveux blancs,
Le Christ au tombeau et la Résurrection du fils de la veuve de Naïm sont les œuvres principales de cette première période de sa vie. Il exécuta plus tard la fresque de l’Antiquaille représentant la Cène et qui peut être comparée aux plus belles manifestations de l’art religieux de notre époque. Dans cette composition très classique les figures ont la plus noble expression, le dessin est correct, l’harmonie blonde de la couleur complète cette oeuvre capitale.
La fresque de Saint-Polycarpe, exécutée plus tard, affermit à Lyon la réputation de l’artiste.
Outre les beaux vers de son Poème de l’Âme, il a laissé, sous le titre d 'Opinion d’un artiste sur l’art, un volume d’une forme piquante et originale contenant d’excellentes appréciations ou plutôt un véritable traité d’esthétique. Ce livre peut être lu avec intérêt et profit par tout le monde; le résumé d’un pareil ouvrage serait pour la jeunesse un enseignement de haute portée.
Ravier fut un méthodiste renforcé dans sa manière de procéder en fait d’art. Il savait se gouverner et faisait, selon sa volonté, de l’évaporé, du transcendantiel, du sage, du modeste, du réservé ou de l’enragé.