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Moi, ce que j'aime, c'est les monstres

Tout le monde n’a pas les mêmes capacités avec un stylo-bille quatre couleurs : quand moi je trace péniblement deux zigouigouis, Emil Ferris, elle, dessine son chef d’œuvre « Moi, ce que j’aime, c’est les monstres ».



Dans ce roman graphique original et passionnant, qui se déroule à Chicago à la fin des années 1970, Karen est une petite fille à part : trop différente des autres, avec son goût immodéré pour les films d’horreur, elle vit dans un monde peuplé de monstres bienveillants, et retranscrit ce quotidien étrange dans son journal intime graphique. C’est sa manière d’extérioriser ses difficultés à s’intégrer, de vivre pleinement sa singularité et de prendre de la distance face aux brimades dont elle est l’objet à l’école.



Sensible, Karen est aussi une petite fille curieuse et observatrice de ce qui l’entoure, notamment de son immeuble des bas quartiers de Chicago, avec ses habitants hauts en couleur. Jusqu’au jour où sa voisine Anka Silverberg est assassinée dans d’étranges circonstances. Qui était cette voisine allemande si torturée qu’elle en semblait dérangée ? Karen mènera l’enquête à sa manière, et son journal, d’intime, deviendra la transcription d’un parcours vers une vérité qui dépassera celle du seul meurtre de sa voisine.



« Moi, ce que j’aime, c’est les monstres » est magistral, tant les dessins sont impressionnants de réalisme et de maîtrise. Il mériterait d’être lu rien que pour eux !

Mais il n’est pas qu’un bijou de graphisme, c’est aussi une leçon d’analyse artistique et picturale assez passionnante et intellectuelle : Karen nous explique ce qu’elle a compris de la composition technique des tableaux lors d’une visite au musée avec son frère Deeze, mais aussi parce qu’elle vit et voit les choses par synesthésie artistique : « Si, en général, les sous-sols sentent le surréalisme, les cuisines et les jardins, eux, sentent toujours l’impressionnisme. Alors, comme notre cuisine est dans un appartement en sous-sol, ça sent un peu l’impressionnisme des débuts, celui de Van Gogh, terre d’ombre et ocre, une odeur poivrée et graisseuse qui dit « je t’aime ». Toutes ces années, alors qu’Anka dansait et chantait là-haut, mes oeufs n’avaient pas vraiment un goût d’œuf mais plutôt celui de La nuit étoilée. Ces airs de valse triste avaient une saveur de bleu et de jaune, comme un mélange de myrtilles et de jonquilles. »



C’est un roman vraiment foisonnant, parce qu’outre l’enquête et l’art, il est dédié à Chicago, et particulièrement au quartier d’Uptown, dont tous les habitants ont pour point commun d’être arrivés par « l’express de ceux qui en chient » (les latinos, les noirs, les indiens, les blancs des Appalaches). Le roman graphique se double alors d’une critique politique et sociale, l’action se passant au moment de l’assassin de Martin Luther King.



Ce mélange des genres permet ainsi d’explorer avec nuance la question de la monstruosité qui se cache en chacun, et d’aboutir à une question vertigineuse : est-ce que les monstres réels ne sont finalement pas plus effrayants que ceux de fiction ?

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Moi, ce que j'aime, c'est les monstres

“Moi, ce que j’aime, c’est les monstres” se distingue par son style artistique captivant, combinant l’expressionnisme à des influences de Robert Crumb. L’héroïne, Karen Reyes, est attachante dans sa quête pour résoudre le mystère de la mort d’Anka Silverberg, bien que l’intrigue complexe qui intègre le passé historique et des thèmes familiaux et sociaux puisse nécessiter une certaine réflexion.



L’œuvre aborde des thèmes universels, tels que l’identité, la différence et la liberté, et son messae est clair. Les émotions des personnages sont bien développées, et les rebondissements ajoutent de la profondeur à l’histoire. Bien que la lecture puisse parfois être intense, elle offre une expérience émotionnelle riche pour ceux qui apprécient des récits nuancés.



Dans l’ensemble, “Moi, ce que j’aime, c’est les monstres” est un roman graphique qui mérite l’attention des lecteurs cherchant une histoire visuellement envoûtante avec des thèmes significatifs. Bien que l’œuvre puisse demander un certain investissement, elle récompense avec une immersion dans un monde complexe et des personnages fascinants.
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