La conscience elle-même est tout aussi inconnaissable. La conscience en effet nous est donnée comme une série de modifications subjectives. Mais
cette série ne saurait être infinie. Une quantité infinie est une contradiction. Elle n'est pas plus finie : les deux extrémités de la chaîne nous échappent. La série des modifications dans sa totalité est donc irreprésentable, par
conséquent inconnaissable. Et nous ne pouvons pas plus concevoir que percevoir, parce qu'en réalité les deux actes n'en forment qu'un. La conscience suppose changement d'état de conscience. Concevoir un premier ou un dernier état, c'est-à-dire un état qui ne serait pas la transformation d'un état antérieur ou qui ne se transformerait pas en un état postérieur, en un mot concevoir un commencement ou un terme absolu implique contradiction.
Du panthéisme au criticisme, du criticisme au positivisme, la négation de toute certitude métaphysique va se complétant. Le courant, la chute qui entraîne les esprits de l'absolu au relatif, de l'intelligible au sensible, a, de nos jours, acquis une puissance comme irrésistible.