AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Isidoreinthedark


Olivier Adam explore inlassablement les mêmes thèmes : la disparition, la rupture amoureuse, la crise de la quarantaine, le déclassement social, la force vivifiante des embruns bretons, la beauté délicate des jardins de Kyoto, le charme suranné des alentours montmartrois, le temps qui passe, ce sentiment que la vie nous file entre les doigts.

Le quatrième de couverture de son dernier roman avait un air de déjà-vu, évoquant une rupture conjugale, des allers-retours entre le Japon et la Bretagne, la force de l'amour paternel, et un désarroi à forte teneur en alcool.

Incapable de résister à un titre qui claque, alors un titre issu d'une chanson, impossible de dire non. « Tout peut s'oublier », c'est le très beau titre du dernier livre d'Olivier Adam, qui m'a fait songer au roman de Delphine de Vigan « Rien ne s'oppose à la nuit ». J'avais à peine aperçu le livre dans une petite librairie de la butte de Montmartre que je fredonnais déjà « il faut oublier, tout peut s'oublier... », tout comme j'avais murmuré quelques années plus tôt « plus rien ne s'oppose à la nuit, rien ne justifie... ».

Si l'on sait d'avance à quoi s'en tenir, le nouveau roman d'Olivier Adam réussit malgré tout à nous surprendre, tant le charme désenchanté d'une intrigue pourtant exempte de suspense opère une nouvelle fois.

Nathan, récemment divorcé de sa femme japonaise, tient un cinéma dans une bourgade de bord de mer bretonne. En allant chercher son jeune fils chez Jun, il découvre un appartement vide, et doit faire face à la disparition aussi soudaine qu'inexpliquée de son ex et de Léo. Depuis son divorce, il s'est lié d'amitié avec sa voisine Lise, qui souffre mille maux depuis l'envol de son fils Gabriel à Paris. Enrôlé par un groupe d'ultra-gauche, celui-ci se pose en adolescent révolté contre des parents qu'il juge trop bourgeois et joue au casseur pendant les manifestations des « gilets jaunes ».

La trame narrative est centrée autour du combat que mène Nathan pour retrouver son fils tant aimé. L'originalité du roman est de faire fi de tout suspense, alors même que la quête du narrateur s'y prêtait. Ce parti pris courageux permet à l'auteur de se concentrer sur le ressenti de Nathan, sur la colère et le sentiment d'injustice qui menacent de l'emporter. Olivier Adam profite des pérégrinations désespérées de son héros vacillant pour questionner le gouffre culturel qui sépare la France du Japon, et nous offre un portrait sans concessions du caractère impitoyable de la justice japonaise, en insistant sur le peu de cas qu'elle fait des droits du père, en particulier lorsque ce dernier est étranger.

« Tout peut s'oublier » est un roman doux amer, au goût salé des vagues qui s'échouent sans fin sur la côte bretonne, à la beauté vénéneuse de l'île de Miyajima, au large d'Hiroshima. « Tout peut s'oublier » nous dépeint le désespoir indicible qui s'empare d'un père qui réalise que son enfant lui a sans doute été enlevé à tout jamais, ainsi que la tristesse infinie d'une mère qui comprend que son adolescent est en train de lui échapper. « Tout peut s'oublier » est au fond et avant tout un livre sur le courage, la persévérance, la résilience, qui questionne notre manière de faire face à ce qui précisément, ne peut pas s'oublier...
Commenter  J’apprécie          464



Ont apprécié cette critique (42)voir plus




{* *}