Citations sur Les couturières d'Auschwitz (31)
Le serment d’obéissance jusqu’à la mort qui liait les SS au Führer et au Reich fut une excuse commode pour les criminels de guerre.
"J’obéissais aux ordres !" clamaient-ils, mais le fait d’enfreindre le règlement en puisant dans le butin amassé à Auschwitz démontre à lui seul qu’ils avaient choisi d’obéir aux ordres qui les arrangeaient et d’ignorer les autres.
Les convois qui se succéderaient ensuite, composés surtout de familles et de personnes âgées, seraient « accueillis » par les gros camions ornés de l’insigne rassurant de la Croix-Rouge. « Là où elle agit, ça ne peut pas être si mauvais », songerait une autre jeune Slovaque en juillet 19424, sans savoir qu’Oswald Pohl, chargé de la gestion des camps de concentration, était également président du conseil d’administration de la Croix-Rouge allemande. De fait, à partir de l’été 1942, ces véhicules qui inspireraient confiance conduiraient directement aux chambres à gaz la majorité des nouveaux arrivants, c’est-à-dire toutes les personnes jugées inaptes au travail.
Puis venaient le dernier shabbat en famille, la dernière promenade à travers les rues calmes avant le couvre-feu, le dernier repas, les derniers baisers.
En réalité, si ces hommes n’avaient pas officiellement le droit de piller, même au plus bas niveau de la hiérarchie, c’était en raison du manque à gagner pour les caisses de l’État, et surtout parce que les gros bonnets de Berlin comptaient bien s’enrichir au maximum.
Les détournements par les SS d’effets personnels de Juifs déportés devinrent si nombreux à Auschwitz qu’une commission d’enquête fut constituée.
Le SS-Obersturmführer Robert Mulka ordonna la fouille des affaires des femmes SS.
Il découvrit des bijoux et de la lingerie subtilisés au Canada. Les peines allèrent de deux à trois ans de prison.
En revanche, aucune investigation ne fut menée sur les meurtres arbitraires et les actes de sadisme ou de torture : tout cela relevait du travail de routine.
La transformation de tant d’histoires familiales en une série de marchandises impersonnelles prouvait que l’existence des Juifs avait été purement et simplement effacée. N’importe lequel de leurs biens avait beaucoup plus de valeur qu’eux et son transport faisait l’objet de beaucoup plus d’attention que celui des déportés.
Elle avait aussi noté "Entièrement d’accord" après avoir lu la phrase suivante : "De nos jours, beaucoup d’Allemands savent que l’Allemagne a versé des milliards de marks à Israël ou aux rescapés en guise de réparation, mais personne ne semble se souvenir des milliards que les Allemands ont volés aux Juifs."
Richard Glücks, un proche d’Himmler, avait ordonné dès 1940 qu’on récupère les cheveux en provenance des camps après avoir séparé ceux des hommes de ceux des femmes. Les premiers pouvaient être feutrés ou utilisés comme fil.
Les seconds devenaient des chaussettes pour bébés ou équipages de sous-marins et des caleçons pour cheminots ; ils étaient aussi mis en pelotes pour étanchéifier les ogives des torpilles.
Avant transformation, les cheveux étaient lavés puis suspendus dans les combles situés au-dessus des fours crématoires : la chaleur qui en montait les séchait. Ensuite, ils passaient entre les mains de peigneurs.
Ils étaient vendus par exemple cinquante pfennigs le kilo à des entreprises qui cardaient la laine, ce qui représentait une source de revenus intéressante pour Auschwitz. Les comptes des livraisons pour tous usages étaient établis le cinquième jour de chaque mois.
Un tel commerce n’était pas propre à ce camp : on sait par exemple qu’en l’espace de onze mois ceux de Treblinka, Sobibór et Bełzec fournirent à eux seuls vingt-cinq camions de cheveux de femmes.
Aujourd'hui, je fais connaissance avec une femme qui a survécu à un lieu et à une époque synonymes d'horreur.
Toute opposition dans un tel contexte nécessitait un très grand courage. Néanmoins, la résistance prenait des formes très diverses et les vêtements y avaient eux aussi un rôle à jouer: ce pouvait être un habit chaud pour sauver une vie, un cadeau pour se réchauffer le cœur, une couverture pour se cacher ou un déguisement pour passer inaperçu.
En 1946 le docteur Frantz Blaha, ancien détenu de Dachau et moi témoignant sous serment, décrirait la pratique ignoble du tannage de la peau humaine afin de produire du cuir pour équipements équestres, gants, chaussons et sacs. La maîtresse d'immersion, Hedwig Potthast, aurait même posséder un exemplaire de Mein Kampf relié dans cette matière.