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Critique de Agneslitdansonlit



"Choses qui tombent du ciel" est construit de façon originale, car il mêle habilement quatre nouvelles successives et pourtant reliées les unes aux autres.

Reliées par la récurrence de certains protagonistes qui, tour à tour, sont héros ou personnages secondaires. Mais reliées aussi par un fil ténu et invisible, que l'on pourrait personnifier comme étant la chance, le hasard, la coïncidence, le destin, la fatalité, voire la malédiction... Et de façon sous-jacente, affleure alors l'interrogation quasi existentielle de savoir pourquoi les évènements s'agencent ainsi, aboutissant à des coups du sort ou à des coups des chance.

Une des protagonistes reste ébahie de l'enchaînement des évènements qui lui permettront d'échapper à un accident.
✒"Rien ne lui était arrivé, mais elle a passé des années à s'interroger:
Pourquoi j'étais justement là ?
Pourquoi je n'étais pas tout à fait là-bas ?
Si le bus n'avait pas été en retard, je ne serais pas allée à ce magasin.
Si j'avais choisi une autre caisse, je serais allée plus vite.
Pourquoi le bus était-il en retard ?
Pourquoi suis-je où je suis à chaque instant ?
Pourquoi ne m'est-il rien arrivé, mais presque ?
Et elle m'a raconté qu'elle restait bloquée."🖋

Par sa forme, ce roman pourrait paraître naïf, féerique, voire lunaire. Il est avant tout et sans conteste d'essence poétique et doit beaucoup à sa première nouvelle "La fillette enterrée dans le mur". Ce récit conté, à hauteur d'enfant, par une petite Saara, qui nous fait rentrer dans son monde enfantin, innocent et pourtant parfois très grave, m'a totalement happée par l'émotion pure que cette petite fille dégage. Elle partage ses réflexions que j'ai accueillies amusée, mais toujours parfaitement consciente que, sous l'apparent constat candide, dort une sage vérité.

✒ "Les adultes croient que l'enfant sur la banquette arrière compte le nombre de camions croisés ou les lettres sur les panneaux routiers, ou joue avec ses doigts comme s'ils étaient des princesses, mais en vrai l'enfant peut être en train de réfléchir au contour d'un adulte ou de penser au temps. Moi, je pense beaucoup au temps. Dans mon cerveau j'ai des petites cellules grises, comme Hercule Poirot. Avec elles, je pense au fait que le temps avance et guérit les blessures." 🖊(P.14)

Et ce que l'on comprend de la douleur que vit cette petite fille est d'autant plus saisissant qu'elle l'exprime toujours avec cette grâce enfantine détachée.

✏"Au cinéma on montre les souvenirs en noir et blanc.
On laisse la personne morte au bord de la route, la voiture s'éloigne et à travers le pare-brise arrière on voit la personne qui rapetisse et finit par disparaître entièrement. C'est comme ça qu'on meurt dans les films.
Mais ça ne ressemble pas à ça, en vrai. le temps ne fait pas rapetisser ma mère et les couleurs ne s'effacent pas."🖊

le style de l'auteure sert parfaitement le ton narratif de l'enfant, que Selja Ahava a émaillé de références à l'univers féerique (mais aussi cruel) de contes comme Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll, les Contes des frères Grimm et Crasse-Tignasse de Heinrich Hoffmann.


N'ayant eu aucun retour sur ce roman avant de débuter ma lecture, je n'en connaissais pas la structure : quelle déception lorsque j'ai réalisé que cette petite héroïne me quittait là, me "laissant en plan" avec la frustration de ne pouvoir poursuivre cette balade douce-amère, et passant le relais aux narrateurs suivants...

Les nouvelles qui suivent furent pour moi d'un intérêt décroissant, avec une lecture rendue parfois ardue (voire pénible) tant l'auteur décolle de la réalité pour nous entraîner dans un monde un peu flou, qui doit se vouloir onirique mais ne parvient qu'à être confus (en particulier pour la 3ème nouvelle).
Je reste au final un peu mitigée quant à cette lecture,
• trop charmée par la 1ère nouvelle pour ne pas opérer une comparaison qui nuit aux suivantes,
• et peu convaincue par le propos de l'auteure dont je suppose qu'elle souhaitait souligner l'impénétrable étrangeté de l'agencement des évènements qui ponctuent nos vies, tous tentés que nous sommes de leur donner un sens et d'expliquer l'inexplicable.
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