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Critique de elisecorbani


Je poursuis ma découverte de Tchinguiz Aïtmatov avec Djamilia, incontestablement son livre le plus lu et diffusé en France, sous l'impulsion de Louis Aragon.
J'ai retrouvé dans ce court roman des caractéristiques présentes dans le recueil de nouvelles La Pluie Blanche : la prégnance du travail agricole dans ces plaines d'Asie Centrale, les relations sociales et familiales profondément bouleversées par la guerre et l'histoire violente de l'union soviétique.

Dans ce roman rédigé à la première personne le narrateur opère un flash back sur son adolescence et le portrait de Djamilia, une femme de sa parenté, incarne un moment décisif dans la construction et la révélation de sa vocation personnelle.
Personnellement je n'ai pas été sensible à la dimension amoureuse de ce texte qui a été tant vantée par Aragon, ce qui à mon sens réduit le texte à une anecdote alors qu'il désigne bien plus.

Bien sûr ce texte parle de l'amour, mais pas d'une histoire entre un homme et une femme : déjà parce qu'ils sont trois, le narrateur étant pleinement acteur de cette dimension amoureuse. Ensuite parce qu'il ne s'agit pas d'amour au sens romantique du terme, comme on pourrait le lire superficiellement, mais bien d'une forme de vocation à l'amour à laquelle tout humain se sent appelé, qui passe par son âme et sa liberté intérieure.

L'amour passionnel entre Djamilia et Daniiar s'ancre effectivement dans cette aspiration, qui devient une espérance, à pouvoir vivre au delà d'un carcan social que de son côté, elle n'avait jamais remis en question. L'apparition de cet étranger lui même hors cadre par son parcours de vie douloureux bouscule la jeune femme et vient toucher son besoin d'être reconnue pour ce qu'elle est personnellement, d'être rejointe dans son intimité.
L'invitation à chanter pour se relier sur le chemin de la gare devient un appel à la connexion des âmes sur le chemin de la vie.

La communion qui se crée entre les personnages révèle leur aspiration à vivre leur propre vie et pour cela à quitter la maison familiale qui les réduit à être membres d'un dispositif social sans égard pour leur spécificité personnelle.
Leur vocation à vivre leur propre vie, leurs choix, à vivre de son art, pour ce qui concerne le narrateur, apparaît au grand jour, déclenchant la rancoeur, la tristesse, le mépris de leur famille.

Un très beau texte qui donne à penser longtemps et nous relie aux aspirations profondes de l'humanité.
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