Dégénitaliser le genre, c'est changer de focale et adopter un point de vue plus inclusif sur les genres, les corps et les désires.
Symptômes de ces dessaisissements médicaux, juridiques et corporels qui entourent les identités de genre, les identifications non binaires sont le signe d'un mouvement récent dans les pratiques du genre : celle d'un effacement de la dichotomie genrée.
Comme il n'y a pas d'arc-en-ciel sans pluie, il n'y a pas non plus de militantisme sans une certaine dose de radicalité.
Nous ne sommes jamais totalement socialisés par le genre mais le genre nous socialise partout.
L'administration du genre est institutionnalisée et l'école, la famille, les loisirs, l'espace public, les médias ou le travail sont des théâtres d’expressions privilégiés. Au commencement était le genre. Etre une femme, un pédé, ou être un travelo est inaugural des identités meurtries.
Il n'y a pas d’extérieur au genre : il est au cœur des questions d'inégalités femmes-hommes, de violences faites aux femmes, de préjugés et de stéréotypes, d'éducation, de discriminations sexistes ou homophobes, transphobes ou intersexistes. Plus encore : ni les questions de racisme, de classe sociale, d'urbanisme ou d'environnement n'échappent au genre. Le genre est amniotique. Il nous entoure, nous aborde, nous nourrit - parfois contre notre volonté.
Le genre est un verbe. Il est une action. Il classe, il valide... Il déclasse, il invalide. Le genre est une attente. Sociale, parentale, personnelle. Comme toute attente, il s'agit de ne pas décevoir ce qui est censé advenir.
Faire et être
Assignation de genre. Violences de genre. Inégalités de genre. Identité de genre. Harcèlement sexuel ou de genre. Développement genré. Interactions de genre. Privilège de genre… De quoi parle-t-on, lorsque l’on parle de genre ? On parle de faire « contre » ; contre un genre qui ne dérange pas tout le monde, pas tout le temps, mais qui s’impose dans son silence comme un fantôme souverain. « Je ne dis pas qu’être une femme et en soi une contrainte pénible, il y en a qui font ça très bien, mais c’est l’obligation de l’être qui est dégradante » écrit Virginie Despentes dans King Kong Theorie.
Il n’y a pas d’extérieur au genre . Là où nous regardons, l’horizon est fait de genre. Lorsqu’on lutte contre le genre, c’est avec le genre. Sans cesse, nous sommes contre le genre. Être contre, c’est résister. Résister aux injonctions, aux inégalités. Être contre, c’est aussi se blottir. Être tout contre. Suffisamment contre pour y faire son lit et fatalement pousser, déplacer, faire glisser ce genre qui nous entoure. Être contre ou etre tout contre : même combat. Il suffit de se faire sa place dans l’univers de normes ; faire sa place pour habiter le monde...A sa façon.
C'est ce que Judith Butler souligne lorsqu'elle rappelle que le "scalpel de la norme" s'impose sur les corps intersexes, à même leurs corps, sur l'autel de la binarité.
Genre est un verbe
Le genre est un verbe. Il a une action. Il classe, il valide… Il déclasse, il invalide. Le genre est une attente. Sociale, parentale, personnelle. Contre toute attente, il s’agit de ne pas décevoir ce qui est censé advenir. Le genre est donc une prescription qui n’autorise l’errance qu’à de rares exceptions. Le genre est une répétition. « C’est la nature » : alors, longtemps, on a peu interrogé le genre. « C’est le développement normal des êtres » : alors, longtemps, on a eu peur de toucher au genre. La peur d’intervenir, la peur de perturber l’ordre des choses.
Il n’y a pas d’extérieur au genre : il est au cœur des questions d’inégalités femmes-hommes, de violences faites aux femmes, de préjugés et de stéréotypes, d’éducation, de discriminations sexistes ou homophobes, transphobes ou « intersexistes ». Plus encore : ni les questions de racisme, de classe sociale, d’urbanisme ou d’environnement n’échappent au genre. Le genre est amniotique. Il nous entoure, nous aborde, nous nourrit – parfois contre notre volonté. Ne cherchez donc pas de rivages au genre. Pas de frontière. Pas d’ailleurs. Tout est genre car rien ne se soustrait aux différences, aux hiérarchies et aux inégalités produites par les catégories « homme », « femme », « homo », « hétéro »...