Comme le poète ou le peintre, le traceur de première trouve de grands instants où son oeuvre naît, jaillit hors de lui-même : les gestes s'enchaînent sans hésitation, les prises, comme les mots du poète ou les couleurs du peintre, apparaissent où et quand il le faut.
Comme tous les êtres humains, les alpinistes donnent une valeur symbolique à de nombreux objets de leur pratique, à des détails de leur environnement ou à des comportements particuliers.
L'alpinisme est un art complexe qui consiste en particulier à apprendre à survivre, et donc à passer le plus loin possible de la mort.
Tous les écrivains de montagne ont dit leur admiration pour les paysages d'altitude, et ont tenté d'en décrire les magnificences.
Les apports de la montagne ont été largement décrits par la littérature alpine. Le premier est sans doute l'intensité de l'action à laquelle oblige l'expérience de la haute montagne. Elle focalise toute l'attention du grimpeur sur les gestes à accomplir et l'observation du milieu dans lequel il évolue, et ce faisant lui permet un oubli total de ses inquiétudes.
Contempler un sommet ou le gravir suscite des associations d'idées que nous ne contrôlons pas.
Comme tous les animaux, l'être humain garde en lui un attachement intime à son territoire d'origine. Il le marque pour le rendre reconnaissable, il y trace les itinéraires qui seront ceux de son lieu de vie.
En fait, il y a toujours eu des personnes pour admirer la montagne et des personnes à qui elle fait peur.
En 1336, l'ascension du Mont Ventoux par le poète Pétrarque préfigure ce qu'on a appelé "l'esprit de l'alpinisme" : le sommet était certes d'altitude plus que modeste, les difficultés d'ascension plutôt dérisoires, mais la course n'avait aucune utilité pratique, sinon celle d'atteindre le sommet, et surtout le récit qui en a été fait est celui d'un poète tout entier pris par la subjectivité de ses émotions.
Elévation vers le monde de l'altitude et bonheur de la création : ce sont là les deux caractéristiques de l'alpinisme qui non seulement contribuent à sa richesse, mais surtout lui donnent sa spécificité.