Citations sur Matière solaire - Le poids de l'ombre - Blanc sur blanc (45)
J'ai aimé ces endroits
où le soleil
secrètement se laisser caresser.
Où étaient passées des lèvres
où les mains avaient couru innocentes,
le silence brûle.
J'ai aimé comme on brise la pierre ;
comme on se perd
dans l'insensible floraison de l'air.
(Matière solaire, XVIII)
MATIÈRE SOLAIRE 1980
II
Le mur est blanc
et brusquement
sur le blanc du mur tombe la nuit.
Il y a un cheval proche du silence,
une pierre froide sur la bouche,
pierre aveuglée de sommeil.
Je t’aimerais si tu venais maintenant,
si tu penchais
ton visage sur le mien tellement pur
et tellement perdu,
ô vie.
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V
Bien sur, tu les désires, ces corps
où le temps n’a pas encore planté
ses cornes profondes - le désir n’est-il pas
l'ami le plus intime du soleil?
Oui, tu les désires, comme si chacun d’eux
était le dernier, le dernier corps
que ton corps ait le pouvoir d'aimer.
(Matière solaire)
J’ai aimé ces endroits
où le soleil
secrètement se laissait caresser.
Eu amei esses lugares
onde o sol
secretamente se deixava acariciar.
(...)
c'est ce regard qui nuit après nuit vient
de très loin par quelque chemin de traverse,
et me dérobe le sommeil,
sans épargner le coeur.
(Blanc sur blanc, X)
C'est un lieu au sud, un lieu où
la chaux
en émeute défie le regard.
Où tu as vécu. Où parfois dans le sommeil
tu vis encore. Le nom imprégné d'eau
s'écoule de ta bouche.
Par des sentiers de chèvres tu descendais
à la plage, la mer frappait
sur ces pierres, ces syllabes.
Les yeux se perdaient noyés
dans la lueur
du dernier ou du premier jour.
C'était la perfection.
(Blanc sur blanc, II)
Fais une clef, même petite,
entre dans la maison.
Consens à la douceur, aie pitié
de la matière des songes et des oiseaux.
Invoque le feu, la clarté, la musique
des flancs.
Ne dis pas pierre, dis fenêtre.
Ne sois pas comme l'ombre.
Dis homme, enfant, étoile.
Répète les syllabes
où la lumière est heureuse et s'attarde.
Répète encore : homme, femme, enfant.
Là où plus jeune est la beauté.
(Blanc sur blanc, I)
J'entends courir la nuit par les sillons
du visage - on dirait qu'elle m'appelle,
que soudain elle me caresse,
moi, qui ne sais même pas encore
comment assembler les syllabes du silence
et sur elles m'endormir.
(Le poids de l'ombre, LIX)
J'avais traversé l'été pour te voir
dormir, et rapportais d'autres contrées
un soleil de blé dans la pupille ;
quelquefois la lumière s'attarde
sur des mains fatiguées ; je ne sais en lequel
de nous explosa une soudaine
jeunesse - explosa, ou chantait :
l'air était plus frais.
Qui chante en plein été espère voir la mer.
(Le poids de l'ombre, XXVI)
Je t'écoute comme si j'écoutais venir l'été,
ses innombrables doigts courir à travers jours
et nuits avec à l'intérieur les eaux,
j'écoute ces voix, cette rumeur de lumières
monter dans l'obscurité, buter sur les vitres,
avec le matin avancé tomber sur les sables,
mordre les murs, brûler de démence.
(Le poids de l'ombre, XVIII)