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Critique de JLBlecteur


Forest Gump en Haute-Provence ?

C'est lui qui se raconte, ce gamin que l'on devine rapidement ‘attardé'. Il vit seul avec ses parents âgés qui tiennent une station service là ou plus aucune voiture ne passe. Une ambiance de bout du monde à la Bagdad café (je devine ‘I'm calling you' derrière la stridulation des cigales ou ‘a road to nowhere' des têtes qui parlent).

Il est seul.
Seul au monde.
Seul dans sa tête ?

Seul, c'est bien le qualificatif qui lui sied le mieux à notre petit narrateur de douze ans, retiré de l'école ou il n'a plus sa place parce qu'il est différent, seul, sur une route sans trafic, seul, contemplatif au milieu des trépidantes sixties, nous sommes en 1965.

Par imprudence et innocence, il manque mettre le feu à la station essence familiale alors ses parents comprennent qu'il lui faut sortir de sa coquille, connaître d'autres horizons, partir découvrir la dure réalité du monde auquel il devra être confronté   mais surtout finir son éducation…au sein d'un institut spécialisé.

Lui ne l'entend pas de la même oreille alors il fugue dans l'intention d'aller faire…la guerre que lui a montré l'écran incurvé en noir et blanc, sa seule fenêtre contrastée sur le reste de l'humanité !!!

Mais où est-elle, cette guerre idéalisée, juste derrière la montagne qu'il va escalader vêtu de son blouson Shell (qu'il aime), sa coquille ?

Il est ailleurs, lui.

Lui, c'est un escargot dans un univers parallèle où les règles sont régies par son simple esprit d'une innocente naïveté, d'une évanescente poésie liée à sa faculté singulière de tout prendre au premier degré.

Il fugue, donc, et tel un petit Prince égaré sur sa planète déserte où ne vit ni mouton ni renard, il rencontre son Alice au pays des merveilles. Mais elle porte le prénom de la fée d'Arthur, son Alice, et c'est donc Viviane qui va lui fêter son non-anniversaire en l'entraînant derrière le miroir, au bout d'un terrier-tunnel  qui mène à une grotte magnifique, son Avalon dont elle est la Reine mais…sans jeu de cartes et avec ses propres blessures.

Qui est-elle donc cette Viviane apparue de nulle part autrement que le phare hypnotique qui guide le jeune garçon égaré ?

Son guide, sa reine.

Seulement, elle finira par s'évanouir, la fantasque fée Viviane (petite parisienne en vacances en fait), et c'est exsangue que notre petit héros sera recueilli par Matti, un autre personnage atypique parce que muet de convenance.

Celui qui ne dit mot mais qu'on sent sensible à ce gamin esseulé saura-t-il entrer en communion avec lui ?
Quelle résonance aura cette interaction étonnante entre celui qui n'utilise pas les mots que l'autre entendrait au premier degré ?

Viviane aura-t-elle vraiment disparu ?

Un conte contemporain qui nous ramène à la lisière de l'enfance, mais de l'enfance brisée par la difficulté de vivre la différence et par la violence ambiante de notre société qui n'entend pas les appels au secours exprimés pas seulement par les mots.

Un conte contemporain semblable à ceux de notre enfance parce que cruel tout autant.

La poésie de l'innocence qui mène à l'inadaptation mais au rêve aussi, à l'accès vers des contrées parallèles, des compréhension alternatives qui ouvrent à d'autres bonheur mais à d'autres danger périlleux également.

Un petit bémol stylistique cependant, toute la narration se fait au travers de la perception de la vie d'un enfant de 12 ans retardé qui vit dans un hameau isolé. Peut-être eût-il été plus crédible d'utiliser un vocabulaire plus limité et des constructions de phrases plus simples parfois afin d'accentuer ce côté autobiographique voulu par l'auteur !?
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