Au lycée,
il y a bien longtemps, un de mes camarades me fit connaître la poésie d'
Apollinaire, qu'il qualifiait de pleine de fantaisie et de rêverie. Et il me prêta un recueil de
poèmes en livre de Poche, je ne me souviens plus si c'était
Alcools ou un ensemble de
poèmes choisis. Un autre me parla des
Poèmes à Lou, dont il avait beaucoup apprécié le lyrisme d'amour fou et la sensualité.
C'est ainsi que commença mon voyage, qui se poursuit toujours, dans le vaisseau Appoll(o)inaire.
C'est un poète qui me touche par ses côtés extrêmes: fougue, voire exaltation, mélancolie, désespoir, mais aussi par sa merveilleuse capacité à associer de façon surprenante et quasi cinétique quelquefois, des images féeriques et oniriques, un poète de l'imaginaire revendiqué.
Et donc pas étonnant qu'il soit considéré comme le créateur du surréalisme, mot qui apparaît pour la première fois en sous-titre des "Mamelles de Tiresias", qualifié de drame surréaliste. Une partie de ses
poèmes utilise en effet ce vecteur qu'est la divagation dans le rêve, l'inconscient, les associations d'idées.
Dans
Alcools, pour simplifier, car c'est un peu plus complexe que cela, on peut dire qu'
il y a des
poèmes longs: Zone, Cortège, le Voyageur, L'Emigrant de Landor Road, Vendémiaire, qui sont les plus originaux, où la versification est fort libre, aussi bien la métrique que la rime, et formés souvent d'associations très libres et surprenantes d'images qui évoquent le cubisme....et le cinéma, deux tendances fortes de l'époque.
Il y a aussi de très beaux
poèmes constitués de plusieurs parties, souvent les
poèmes les plus mélancoliques, je trouve, dont les magnifiques Chanson du Mal Aimé, le Brasier, Les Fiançailles (mes préférés), et qui sont aussi des divagations poétiques de structure très libre.
Et puis, entre les deux, des
poèmes souvent plus courts, parfois même très, très courts: un seul vers pour Chantre, et de facture plus classique, tels le cycle des Rhénanes, et À la Santé, poème relatant l'emprisonnement abusif du poète pour recel d'oeuvre d'art. Ils sont souvent plein de fantaisie, de rêverie, tel ce Clair de Lune magique ou Nuit Rhénane, l'Adieu, Marizibill, La Dame, la Tzigane, Annie etc...
Les
poèmes du début Zone et de la fin Vendémiaire se répondent en quelque sorte, tout deux ayant pour thème central Paris et d'autres villes, divagation triste dans Zone, exaltation lyrique et "soif" universelle dans Vendémiaire.
Cette diversité ne fait pourtant de ce recueil un objet hétéroclite. Ce qui le traverse, je trouve, de bout en bout, c'est la quête folle de l'amour impossible et celle de l'identité.