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Critique de pompimpon



"Il ne m'échappe pas que mes mots forment une supplication. Peut-être que, au pied du mur, même les athées comme moi finissent par espérer que quelque chose d'extraordinaire arrivera."

Douleur du deuil ?
Folie ?
Ou remontée d'un passé enfoui sous quinze années d'un mariage heureux et d'une amnésie que Tara avait pu croire réelle ?

Les premières pages, comme les morceaux épars d'un miroir brisé reflétant une bribe, un objet, une idée, puis d'autres et d'autres encore, nous entraînent dans ce maelström submergeant Tara peu à peu, alors qu'elle attend Eli, son beau-fils, qui a demandé à la voir.
Lui qui n'aime rien tant que le téléphone.

Rien ne lui appartient, pas même son nom, plus même ses souvenirs qui s'effilochent, ou ce garçon portant "un pantalon de toile et une chemise à manches courtes avec une poche à l'avant" qui vient s'asseoir en silence dans le fauteuil du salon.

"J'ai l'impression que des parties entières de mes journées se déroulent sans moi, je crois que je perds la tête, c'est à cause de l'eau, toute cette eau, c'est à cause de ton père, c'est à cause du garçon dans le fauteuil, je ne sais pas ce qu'il me veut, viens je vais te montrer."

Après la tempête, la noyade, il y a cette lente remontée vers une enfance heureuse, loin, très loin d'ici, dans un pays si différent, longtemps avant la guerre, avant d'être définie comme une "fille gâchée", avant la rencontre avec Emmanuel.

Rien ne lui appartient, vraiment ? La force sensible de sa mémoire, sa détermination, ce qui la constitue, ce qui la tient debout et la pousse à avancer, à s'accrocher à un tronc d'arbre pour ne pas couler quelle que soit l'envie qu'elle en ait, il n'y a aucun moyen de le lui arracher, c'est en elle, ça lui appartient.

"Pendant longtemps, je suis persuadée que la vie que je mène est immuable."

Les mots choisis par Nathacha Appanah nous entraînent au plus près de Tara, juste à côté d'elle, dans le flot de ses impressions, des épreuves qu'elle traverse, des émotions qui l'engloutissent.
"Tout est ici plus intense – les couleurs, les textures, les sensations."

Pluie, fleuve, vague, tsunami, l'élément eau est omniprésent, saturant l'air, oppressant.

J'ai été portée par un courant qui m'a fait remonter de la ville européenne où je rencontre cette femme comme égarée dans le salon de son appartement, aux horizons saturés de vert d'un autre continent où elle a grandi.

Nathacha Appanah ne raconte pas, elle n'explique pas, elle fait ressentir, elle laisse entendre. Elle a un style qui lui est propre, une voix particulière qui me touche beaucoup.

Je remercie infiniment les éditions Gallimard et Babelio qui m'ont permis cette belle découverte.
Rien ne t'appartient est paru le 19 août 2021.
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