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Critique de Albina


Albina
12 septembre 2020
Pauvre Bérénice, pauvre Aurélien! C'est ce qu'on a envie de dire en refermant ce livre. Il y est question d'amour, mais est-ce bien d'amour dont il s'agit? Quand l'Autre n'est souvent que prétexte pour fuir une vie de vacuité, que ce soit celle d'un Aurélien désabusé et brisé par une guerre dont il a subi les atrocités ou celle d'une Bérénice mal mariée à un pharmacien manchot ? L'auteur a voulu nous dresser le portrait d'une sorte d'anti-Bovary certes toujours insatisfaite, mais qui, cette fois, préfère rêver sa vie en refusant l'accomplissement d'un amour dangereusement réciproque pour privilégier l'absolu, révélant par là une inaptitude complète au bonheur qu'elle biffe d'un trait pour se complaire dans l'idéal quitte à se montrer cruelle et inhumaine. L'épisode du masque aux yeux clos qu'elle fait mouler pour Aurélien est significatif, de même que le dessin de Zamora qui mêle les lignes des deux expressions de Bérénice. Il y a coexistence de la morte et de la vivante et, contre toute attente, elle choisira de se figer et de demeurer la morte, la femme idéalisée, aux yeux d'Aurélien.
Louis-Aragon à travers ses personnages nous met face à des rencontres et des amours divers et variés, mais, à chaque fois, on y découvre in fine un certain opportunisme. L'autre n'est que prétexte, conscient ou non, pour fuir une réalité frelatée soit par l'appât du gain soit par une existence oiseuse qui jusque-là n'avait aucun sens. Et c'est souvent un jeu qui tourne mal, car la réalité reprend vite les rênes.
Aurélien y parait comme victime d'une guerre qui apparait absurde. L'auteur s'attache à nous faire sentir ce qui en lui est brisé jusqu'à en faire un homme dépourvu d'honneur qui accepte la défaite et la collaboration avec l'ennemi vainqueur. Bérénice qui désapprouve lui enverra le coup de grâce en le rejetant après vingt ans d'un amour sublimé par la séparation. On peut rêver qu'un amour digne de ce nom en ouvrant les portes de la compréhension aurait pu lui permettre de penser autrement.
J'ai trouvé de très belles pages où le poète était présent, mais j'ai aussi souffert de scènes ennuyeuses et interminables qui ressemblaient à un habile remplissage pour maintenir le suspens dans les décors surannés d'une bourgeoisie poussive avec des rentiers oisifs qui cherchent à tuer l'ennui.
Bref, j'ai refermé le livre avec soulagement, pas du tout convaincue que l'amour –le vrai – ce n'est que cela, même si bien des épisodes peuvent tout à fait s'apparenter à des situations que l'on observe dans la vie courante.


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