Rien n'est plus redoutable que le diable avec un visage d'ange.
Il y a des rencontres auxquelles on ne s’attend pas, et qui, sans le vouloir, changent le cours de votre vie.
Les mots que je formule mentalement ne veulent pas franchir le seuil de mes lèvres.
Je tente de rendre leurs sourires à ces gens, mais je n’y arrive pas. Mon cœur saigne et pleure, il m’est impossible de faire semblant, d’agir comme si toutes ces paroles me réconfortaient. Au contraire, cela me rend plus triste que je ne le suis déjà.
Perdre un parent est la chose la plus terrible qui soit. On se retrouve amputé d'une partie de soi qui ne reviendra plus, même avec le temps. C'est une blessure qui ne cicatrise jamais.
Pendant un long moment, nous restons ainsi, ses bras m’enlaçant, comme si le temps s’était arrêté, comme si rien ne pouvait nous rattraper, pas même nos passés.
J’ai parfois l’impression qu’elle fuit quelque chose, mais qu’elle ne peut pas s’empêcher d’être elle-même.
La vie est une salope, et le destin, une belle connerie. Tous ceux qui disent que la roue tourne se bercent d'illusions. Quand on est dans la merde, on y reste jusqu'au bout, peu importe ce que l'on peut bien faire pour s'en sortir.
J'ai parfois l'impression que deux personnalités l'habitent. L'une est froide, arrogante et superficielle, tandis que l'autre peut se montrer presque gentille – je dis bien presque –, souriante et enjouée. C'est très déstabilisant.
— Je ne te déteste pas…
— Ce n’est pas l’impression que tu donnes, pourtant.
— Je ne t’apprécie pas, mais ça ne veut pas dire que je te hais.
— Merci pour la nuance, raille-t-il.
Je fais mine de ne pas entendre et me recule afin d’observer le résultat. Je ne me suis pas trop mal débrouillée, pour quelqu’un qui n’a aucune formation dans ce domaine.
— J’ai terminé. Mais, je me répète, tu devrais quand même aller voir un médecin.
— Ça ira, ne t’inquiète pas. J’ai l’habitude.
— C’est bien ce qui me fait peur, marmonné-je pour moi-même.
J’attrape les affaires éparpillées un peu partout et les range, pendant que Zeke se lève et contemple l’ampleur des dégâts dans le miroir. Puis il se retourne et s’appuie contre la vasque du lavabo.
J’ai une légère impression de déjà-vu…
La mission que je m’étais donnée est accomplie, je n’ai plus besoin de rester ici, avec lui. Je me dirige vers la porte, mais au moment d’attraper la poignée, une main puissante me retient par le bras et me ramène doucement contre son torse. La délicatesse de son geste me surprend. Je relève la tête, et son regard accroche mien. Ce que j’y lis est bien différent de ce que je peux y voir d’ordinaire. La dureté habituelle de ses yeux a laissé place à une lueur bleue plus calme, presque plus tendre. Nous sommes si près l’un de l’autre que son souffle caresse mon visage. Je suis comme hypnotisée, happée par l’intensité de ses iris opalescents. Ma paume est posée sur sa poitrine, comme pour maintenir une certaine distance, et je sens toute la chaleur de son corps se diffuser entièrement dans le mien. Il vient poser sa main libre sur la mienne et ce contact me fait fondre instantanément. Derrière son apparente brutalité, il peut être si délicat… Il porte son attention sur ma bouche et tout mon être rêve de sentir ses lèvres sur les miennes. À tel point que si je n’étais pas totalement tétanisée par ce qu’il se passe, je passerais moi-même à l’action et l’embrasserais.
— Merci, April, murmure-t-il sans cesser de me fixer.
C’est la deuxième fois qu’il m’appelle par mon prénom. Dans sa bouche, ce dernier a une résonance particulière, douce.